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2 décembre 2024 1 02 /12 /décembre /2024 15:18

Ce film est le premier de Capra à sortir du cadre des petits compléments de programme (Policiers, comédies, mélos, tous réduits en durée, et en budget) à la Columbia. Comme on le sait, ces compléments de programme sont généralement d'une qualité bien supérieure à ce qui était attendu, donc il est probable qu'Harry Cohn était à l'aise pour lui confier un budget conséquent... Ce film sera non seulement un gros succès, mais il consolidera encore plus la position du metteur en scène au studio, tout en inaugurant un cycle de film d'hommes, dont les deux qui suivront (Avec les deux mêmes acteurs dans les rôles principaux) seront parlants: Flight et Dirigible.

Jack Dorgan (Jack Holt) et Bob Mason (Ralph Graves) sont deux marins et scaphandriers, habitués à remplir des missions ensemble. Ils ont sillonné la terre entière, et se sauvent mutuellement la vie à chaque occasion qui se présente, sans jamais arrêter de se chamailler comme des gosses. Bref, des hommes, des vrais... Mais Mason, plus jeune que son copain, est généralement le plus rapide à séduire les dames. Il a même un truc: il leur offre des jarretières affriolantes... Mais alors que son compagnon est en mission sans lui, Dorgan rencontre dans un bar la jolie Bessie (Dorothy Revier), tombe amoureux, et l'épouse. Quand il part en mission à son tour pour une semaine, elle retourne faire la fête, et rencontre un beau marin qui la séduit tout de suite: Bob Mason...

Tout ce qui précède occupe essentiellement la première moitié du film, un prologue au drame, que Capra utilise pour installer du suspense dans la relation des deux amis. La deuxième moitié de ces 90 minutes concerne un naufrage, celui du sous-marin dans lequel travaille Mason. Le seul homme qui pourrait plonger et permettre de dégager le sous-marin de l'extérieur, c'est Dorgan. Le problème, c'est qu'il ne veut pas, en dépit de ses remords: la trahison de Mason lui reste en travers de la gorge.

Oui, mais... s'agit-il vraiment d'une trahison? Le moins qu'on puisse dire, c'est que dans ce film d'hommes, donc, les femmes n'ont pas une image très reluisante. Dorothy Revier n'a pas d'autre rôle que celui de garce, et à ce titre elle anticipe furieusement sur la Viviane Romance de La belle équipe! Donc, on est dans un monde de conventions dramatiques, mais celles-ci servent surtout à nous accrocher à l'histoire. Pour moi, l'important dans ce petit grand film, c'est de voir à quel point Capra a su trouver la mise en scène la plus efficace pour le projet. En terme de montage, d'atmosphère, de petites touches par-ci et par-là, le film est un sans fautes, parce que la mise en scène ne faillit jamais... Capra, dans son sous-marin dont les hommes meurent à petit feu, laisse l'urgence de la situation lui dicter un suspense impressionnant. Et même si le film louche sérieusement du côté des autres films de ce genre, qui étaient légion depuis The blue eagle de Ford ou What price glory de Walsh, la caractérisation musclée des deux acteurs principaux emporte sérieusement l'adhésion.

Et puisque on est à parler de ces films Fox avec Victor McLaglen ou George O'Brien, il me semble utile d'ajouter que si A girl in every port, de Hawks, est sorti en février 1928, et ce film de Capra en novembre de la même année, il serait déloyal de les comparer. Non par rapport au statut "supérieur" de la Fox sur la Columbia à cette époque, non: le Capra est franchement le meilleur des deux.

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Published by François Massarelli - dans Muet Frank Capra 1928 **
1 décembre 2024 7 01 /12 /décembre /2024 11:36

Le temps a passé... Lydia Deetz (Winona Ryder), devenue adulte, n'a pas perdu sa capacité à voir des fantômes et elle est devenue célèbre avec une émission consacrée à des exorcismes. Sa belle-mère Delia (Catherine O'Hara) lui annonce le décès de son père, mangé par un requin lors d'un voyage. Lydia s'est matriée mais son mari a disparu dans la forêt Amazonienne... Ce qui la hante, sans jeux de mots, mais elle n'est pas seule dans ce cas: leur fille Astrid (Jenna Ortega) qui bien sûr est en conflit avec sa mère, a un grand trou dans sa vie depuis le décès du papa. Tout ceci, finalement, ne ressemble pas à Beetlejuice...

Donc de son côté le "Bio-exorciste" Betelgeuse (Michael Keaton, prononcer "Beetle Juice") reçoit une visite de son passé en la personne d'une ex-épouse folle furieuse (et bien sûr aussi morte que possible) (Monica Bellucci). Dans l'au-delà, le commissaire Wolf Jackson (Willem Dafoe) mène l'enquête.

Je ne pense pas qu toute suite soit inutile: juste 99,9% des suites ne servent à rien d'autre qu'à capitaliser d'une façon honteuse sur un succès. Ou, comme dans ce film, de fire semblant de flirter avec sa splendeur passée... 

Donc, on l'aura compris, la déception est grande devant cette superproduction qui revisite avec excès l'univers du premier grand succès de Burton, mais on ne sera pas trop surpris. D'abord la plupart dece que Burton a fait depuis Big Fish est, je le répète et j'enfonce le clou, indigne de lui. Ensuite, le choix ici a été de mesurer le budget du film à l'aune des éventuelles attentes du public, et l'accumulation de stars (On a aussi Justin Theroux et Danny de Vito en plus des noms déjà mentionnés) vient prouver que la production a décidé de faire du film un événement. ce qu'il n'est pas...

Je devrais m'arrêter là... Cela dit il y a ici au moins deux qualités indéniables: l'une d'entre elles est qu'au milieu de cette salade indigeste et trois fois trop riche (combien de sous-intrigues?), il y a un laisser-aller parfois volontaire, qui tranche un peu avec le côté très léché de la production. Par exemple, l'absence (gênante pour des raisons de logique) de Genna Davis et Alec Baldwin est expliquée d'une façon qui souligne à très gros traits le truc de scénario... Ca fait du bien, et on respire un peu quand même... Et la deuxième qualité c'est Michael Keaton en Betelgeuse. On ne peut pas lui résister...

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Published by François Massarelli - dans Tim Burton
1 décembre 2024 7 01 /12 /décembre /2024 10:29

Lors de ses débuts à la Columbia, le jeune Capra connaissait déjà furieusement son métier, et privilégiait la vitesse, avec une sûreté d'exécution qui laisse pantois. Cette histoire de reporter ambitieux est excellente: Clem Rogers, journaliste, est las de devoir faire les chiens écrasés (Ou la météo), et obtient une dernière chance de son patron. Il se retrouve dernier arrivé sur les lieux d'un crime mais le hasard fait bien les choses: il assiste à la fuite d'une jeune femme, et suite à un quiproquo, écrit un papier qui accuse la jeune femme, la fille d'un politicien en campagne... mais la jeune héritière victime de l'histoire en question se rebiffe, et les deux font alliance pour faire éclater la vérité.

Energique, élégant, et attendrissant. un film pré-Tintin qui a bien pu inspirer Hergé, qui était très fan du cinéma Américain (plus que des Etats-Unis eux-mêmes, d'ailleurs...). On y retrouve cette vitesse, cette atmosphère des salles de rédaction qui va envahir en quelques années les films des années pré-code, et Douglas Fairbanks Jr, dont le personnage est souvent considéré comme un ado capricieux par ses collègues, avance dans cette enquête cousue de fil blanc avec humour et charme. Et puisqu'on en parle, il y a aussi un atout fantastique: face à lui, la délicieuse Jobyna Ralston!

Pour vraiment anticiper sur les futures réussites de Capra, il aurait peut-être fallu développer une partie consacrée au doute, mais Clem Rogers, en route vers une carrière prestigieuse, n'a pas de temps à consacrer à une remise en question. Et puis... c'est une comédie.

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Published by François Massarelli - dans Muet 1928 Frank Capra Comédie *
1 décembre 2024 7 01 /12 /décembre /2024 10:07

Handsome Williams (Mitchell Lewis) est un gangster, un vrai dur... Sa seule faiblesse, apparemment, est une jeune femme (Alice Day) qu'il aime à écouter en cachette quand elle joue du violon le soir... Car il est épouvantablement laid et elle est aveugle... Un jour qu'il l'écoute, la concurrence tente de l'éliminer. Il recueille la jeune femme comotionnée, et commence alors un étrange rapprochement: elle lui est reconnaissante de sa délicatesse mais il ne peut accepter qu'elle lui touche le visage... Il utilise donc un de ses "protégés", Dan (Theodore Von Eltz), un pianiste qui n'a pas ses cicatrices.

Le film de gangsters était très à la mode après Underworld, de Sternberg (1927)... Et ce film lui doit beaucoup, transposant les personnages de George Bancroft et Clive Brook, à travers ce chef de gang impitoyable et qui cache sa sentimentalité derrière la brutalité, et ce pianiste alcoolique qui est réfugié dans la pègre pour enrayer sa chute... Mais Capra n'est pas Sternberg, il traite différemment son sujet, allant plus directement à l'expression des sentiments, sans les écarter ou les masquer d'un rideau de fumée. Et il s'amuse de la peinture de tout un milieu en donnant vie aux ennemis du "héros", une bande menée par "Tiger Louie" (William Norton Bailey) auprès duquel on reconnait Margaret Livingston... 

Il faut admettre que le film semble omettre un point important dans son déroulement: le fait est que ces gangsters s'entretient, oui, mais c'est comme si les honnêtes gens n'existaient pas! On ne verra donc jamais Handsome dans l'exercice de sa profession... Mais Capra a tout misé sur l'histoie d'amour, un vrai triangle amoureux d'ailleurs, enytre le boss, son protégé qui bien sûr va tomber amoureux de la jeune femme, et cette dernière. Et pour bien comprendre l'importance de cette intrigue sentimentale, les bandes vont se déchainer autour du kidnapping de la jeune femme... La laideur d'Handsome (au passage, l'adjectif devenu son surnom est à prendre évidemment dans le sens contraire) n'en reste pas moins une métaphore de la laideur de son âme de gangster sans doute...

Un excellent petit film en tout cas, qui montre la versatilité de Capra, qui sans jamais s'abstenir de verser dans la comédie, minimise cet aspect de son style, pour se concentrer sur les éléménts stylistiques du film noir tels que Sternberg, Milestone ou Browning les ont établis depuis quelques années... Et Mitchell Lewis, qu'on a vu dans tant de comédies, est impressionnant dans ce rôle de gangster qui ne peut vivre son amour fou jusqu'au bout...

 

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Published by François Massarelli - dans Frank Capra Muet 1928 **
1 décembre 2024 7 01 /12 /décembre /2024 09:30

Don Wilson (Johnnie Walker) est une vedette de Broadway, à la carrière parfaitement placée sur ses rails, mais le succès lui pèse parfois... Il décide de s'octroyer un peu de repos et de s'aérer, et se rend dans la campagne... Où il tombe en panne avec son agent et des amis. Durant la réparation, les quatre hommes se rendent à un spectacle de théâtre itinérant donné par des saltimbanques, et reconnaissent que c'est "tellement mauvais que ça en devient bon". Don, sous un faux nom, participe même au spectacle et joue lamentablement un petit rôle dans la pièce (un abominable mélo de la guerre de Sécession). Mais il est intéressé par la personnalité de l'actrice principale, Ginger Bolivar (Bessie Love), la fille du directeur de la troupe: il décide demanoeuvrer pour faire venir la troupe à Broadway dans le but de les utiliser, en faisant rire les spectateurs à l'insu des acteurs...

Ca rappelle souvent Spite Marriage de Buster Keaton, sorti l'année suivante, et il est probable que les deux films ont été inspirés de la même pièce: les similitudes entre les deux versions d'une pièce de répertoire sur la guerre civile sont troublantes. Sauf quand dans le cas du flm de Keaton, c'est un spectacle supposé d'une grande dignité qui est saboté par les inepties d'un figurant, quand ce film de Capra pose finalement le cas contraire... En acteur doué qui tente d'adapter son style à son incognito d'une part, et à la mauvaise qualité de son entourage, le très spiritueux Johnnie Walker fait du beau travail. Le reste de la troupe est pour le metteur en scène l'occasion de développer une galerie de portraits parfois un peu outrés, mais qui se situent dans les habitudes de la comédie: Bessie Love, bien sûr, se détache particulièrement, en dominant par son investissement physique la distribution...

Mais cet aspect de farce n'occupe que les vingt premières minutes dont le tempo et le ton sont ceux d'un court métrage de deux bobines: Capra développe différemment sa deuxième partie, en se concentrant surtout sur le point de vue des acteurs: aussi médiocres soient-ils (et ils le sont, vous pouvez me croire...), il apparaît qu'ils croient à ce qu'ils font, et le film souligne à quel point finalement leur public rural est après tout satisfait de l'offre théâtrale des acteurs de troisième choix. Et Don Wilson, en faisant son malin, va découvrir à ses dépens que bonne ou mauvaise actrice, Ginger vaut la peine. Une sorte de préfiguration de Mr Deeds et Mr Smith, avec ses naïfs ruraux pris dans la tourmente citadine, nous apparaît ici.

Et la mise en scène de ces Capra muets réalisés pour la Columbia est toujours aussi dynamique et enthousiasmante, on y sent la rapidité à l'oeuvre (même si cette impression est certainement accentuée par un montage qui a été revu, pour une version qui n'est pas aussi longue que l'originale), et l'efficacité du metteur en scène fait merveille. Dans le cadre de la comédie, bien sûr, et sa touche est déjà bien présente, mais il s'octroie une très jolie scène de révélation sous la pluie, avec Bessie Love au sommet de son art, un mélange subtil de comédie de situation, et même de tragédie, la jeune actrice comprenant qu'elle a été roulée dans la farine par l'homme qu'elle aime...

 

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Published by François Massarelli - dans 1928 Muet Frank Capra Comédie *
30 novembre 2024 6 30 /11 /novembre /2024 16:12

Charlie Driggs (Jeff Daniels) est un yuppie typique, qui un jour quitte le snack où il dîne sans payer, sur une impulsion. Il a sans le savoir ouvert la boîte de Pandore... Une jeune femme affublée comme Louise Brooks, qui en plus se présente comme s'appelant Lulu (Melanie Griffith), lui reproche d'être parti sans régler l'addition. Puis tout s'enchaîne, "Lulu" l'entraine après elle, dans un tourbillon, toujours plus fou, et toujours plus dangereux...

Le film est typique de la manière semi-dicumentaire de Jonathan Demme, qui n'a jamais quitté son style "guerilla" inspiré de ses années de travail pour Roger Corman! Le générique d'ouverture se présente donc sur fond de vues filmées sur l'Hudson, et de la ville de New York, affairée dans sa routine quotidienne... Ce qui est assez ironique, car il n'y a rien de tranquille, ni de quotidien, ni de routinier dans le film!

Le réalisateur s'amuse à lancer son yuppie, qui en devient vite une anomalie dans l'image, dans un rodeo au pays de l'Amérique des snacks, des diners, des motels, des réunions d'anciens de lycée, des stations services crapuleuses... De la débrouille et des hold-ups improvisés aussi. "Lulu", en fait Audrey, et son mari Ray (Ray Liotta) ressemblent à un drame en devenir, auquel Charlie semble conférer une allure de comédie...

Mais Charlie, le businessman modèle, semble de plus en plus décalé, et il a aussi ses petits secrets. La radiographie de l'Amérique profonde questionne aussi sa nouvelle génération, celle des "career men" qi se sont jetés à corps perdu dans la course à l'efficacité du reaganisme triomphant... Ce à quoi Audrey-Lulu et son road trip improvisé apporte un cinglant contraste...

Il sort de tout ceci un film assez typique des années 80, mais sans que cette dernière remarque soit trop péjorative! Une histoire d'amour très originale aussi, entre deux personnes qui s'attendaient sans se connaître... Avec Ray Liotta en vrai psychopathe complètement imprévisible caché dans le placard!

 

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Published by François Massarelli - dans Jonathan Demme
30 novembre 2024 6 30 /11 /novembre /2024 08:54

Hilda Jenson travaille dans la petite épicerie d'un quartier populaire, où elle reçoit souvent la visite du caïd du quartier, Spike Mullins. Celui-ci, un boxeur terriblement imbu de lui-même, ne la remarque pas... Celui qui la remarque en revanche, c'est Jerry, un assistant chez le tailleur d'en face de l'épicerie. A l'occasion d'un bal, il l'invite et lui fournit même des vêtements de sa boutique. Lors de la danse, elle est enfin remarquée par Spike, qui décide d'en faire sa petite amie... de force. Jerry désapprouve, mais Spike le tient à distance par la menace... Et Hilda, revenue de ses sentiments, est touchée par l'opposition de Jerry, mais agacée par son incapacité à se défendre. Jerry va donc apprendre à boxer. Mais Hilda va l'aiderd'une façon spectaculaire...

Le cinquième long métrage de Capra, et le deuxième pour la petite compagnie Columbia (Après That certain thing), c'est aussi sa première vraie comdie pour le studio. Et déjà, on y voit quelque chose qui surpasse radicalement les capacités affichées d'une petite entreprise qui ne s'était pas illustrée vraiment, jusqu'à présent... Mais qui avait sans doute rouvé son champion. Et celui-ci avait trouvé son univers, c'est indéniable...

J'ai bien dit que c'est une comédie: c'est l'un des traits les plus "Capraesques" du film, que de développer de la comédie sur une intrigue de mélo, à moins d'ailleurs que ce ne soit le contraire! Et cette histoire lui permet de laisser libre cours à un de ses péchés mignons, la peinture, pour l'instant discrète, d'un milieu éminemment populaire, entre le snack où on mange des sandwiches douteux, la petite boutique du tailleur (Katz, qui est une caricature d'immigré Juif comme on n'en ferait plus, ni exempte de clichés agaçants, ni surtout vile: le metteur en scène aime ce personnage et lui donne presque le dernier mot), un décor de rue particulièrement sommaire, et l'ambiance joyeusement bordélique d'un match de boxe! 

Il n'oublie pas non plus de donner à ses deux héros cette ambiguité, entre la faiblesse (les deux sont bien mal partis dans la vie au tout départ), la gaucherie du héros comique (il transpose les habitudes prises auprès de Harry Langdon lors de leurs films communs), et une force acquise au fur et à mesure de la découverte de leur amour. On pioche ici aussi dans le conte de fée (le tailleur sert de bonne fée, qui laisse Jerry fournir des vêtements de princesse à Hilda, qui la transfigurent)... 

Le rythme est énergique, et le jeu soutenu. Certes, Johnnie Walker en fait des tonnes dans le rôle de Mullins, mais son fier-à-bras totalement désinhibé est un intéressant méchant de cinéma, à commencer par le fait qu'il n'est sans doute pas totalement méchant, il a juste besoin d'une bonne correction! 

Reste à raffiner la formule et l'univers, et à choisir: ici, entre Shirley Mason (déjà aguerrie, elle est une actrice de cinéma depuis 1910, autant dire le déluge à cette époque) et le jeune William Collier, Capra a du mal à choisir. L'actrice la plus connue est la star en titre, et son personnage nous est convenablement développé... Mais Capra aura toujours tendance à donner plus de voix à ses protagonistes masculins.

 

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Published by François Massarelli - dans 1928 ** Muet Frank Capra
30 novembre 2024 6 30 /11 /novembre /2024 08:54

Tout un symbole: ce premier film de Frank Capra pour la Columbia, le studio qui va le mener au firmament malgré sa petite taille (le studio, pas Capra) est sorti le 1er janvier 1928. C'est en fait le quatrième long métrage de celui qui fut longtemps un gagman chez Sennett, puis un scénariste, et que Harry Langdon avait promu au rang de metteur en scène pour Long Pants, son premier long métrage indépendant.

Si That certain thing est d'abord une affaire très économique, avec des vedettes considérées comme étant de seconde zone (Ralph Graves, Viola Dana, Burr McIntosh, tous des oubliés des années 20), l'énergie des comédies de Capra est déjà la: l'histoire est celle de Molly (Viola Dana), une jeune femme qui survit dans un quartier populaire, jusqu'au jour ou elle rencontre le fils (Ralph Graves) d'un milliardaire (Burr McIntosh), et l'épouse le jour même. Le milliardaire déshérite son fil illico, et le jeune homme vient s'installer chez sa belle épousée. Afin de s'en sortir, ils montent une entreprise de confection de déjeuner tout prêts, qui va faire de la concurrence aux restaurants du père...

Le sujet se passe donc dans l'Amérique qui travaille, et le lien entre capital (le père, le fils qui devient chef d'entreprise) et travail (Les ouvriers qu'il faut nourrir) renvoie à l'optimisme Républicain de Capra, qu'il affichera toute sa vie, le mâtinant toutefois d'une générosité que les Républicains d'aujourd'hui ne connaissent plus. Il montre vraiment un vant-goût de son univers chaleureux quand il nous donne un aperçu du quartier populaire où habitent Molly et sa famille... Les ethnies et les cultures s'y mélangent, en bonne logique du melting-pot: la façon dont tout le monde se côtoie, s'épaule dans l'immeuble ou habite Molly nous donne à penser que finalement, tous ces voisins forment une petite famille, soudée dans l'adversité. 

...Jusqu'à un certain point: la scène où Viola Dana rentre chez elle après avoir quitté son mari, et se fait accueillir par ses voisins qui la traitent de tous les noms après avoir vu l'annonce de son mariage express dans le journal, est un grand moment de cruauté. ...Qui se termine par la comédie, par la grâce d'une série bien placée de coups de rouleau à patisserie!

Le film est une comédie sentimentale centrée sur deux personnages, dont le début n'est finalement pas très éloigné de ce qu'aurait fait Harold Lloyd, même si ce dernier aurait certainement privilégié une approche plus centrée sur le jeune homme. Mais Viola Dana bénéficie de cette attention, et elle semble "manoeuvrer" pour se rapprocher du jeune homme qu'elle rencontre, avec efficacité, sans qu'aucun intertitre n'ait besoin de nous expliquer la situation. Le futur metteur en scène de It's a wonderful life nous rappelle s'il en était besoin qu'il a commencé dans la meilleure école qui soit, celle de la comédie muette. Ce qui ne l'empêche jamais pour autant d'afficher un savoir-faire en matière de rprésentation des sentiments, sans jamais s'interdire le premier degré de l'émotion.

Ce film n'a sans doute pas fait la moindre vague à cette époque, tant il était acquis que la Columbia était un studio sans envergure. Ca n'allait pas durer...

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Frank Capra 1927 **
27 novembre 2024 3 27 /11 /novembre /2024 16:04

Toots (Thelma Hill) et Casper (Bud Duncan), un couple marié sans histoires (?) arrive au bout du voyage: M. prétend que San Diego est au Sud, alors que Madame affirme que c'est au Nord. Ils décident donc d'en statuer devant une cour de divorce...

Tiens donc: j'ignore si ce film est un remake officiel de Now I'll tell one, le film de James Parrott avec Charley chase (aujourd'hui cruellement amputé de sa première bobine), mais le fait est que si ce n'est pas le cas, c'est plus que troublant: même situation globale (un couple souhaite divorcer et madame raconte des mensonges tous plus gros les uns que les autres), même intrigue secondaire (un avocat totalement à l'ouest pour Monsieur), et même recours à des flash-backs filmés lors du procès... 

Charitablement, on dira que ce n'est pas aussi bon. Ca reste un gentil moment de gentille loufoquerie...

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Published by François Massarelli - dans Muet
27 novembre 2024 3 27 /11 /novembre /2024 15:54

Fidèle à la tradition d'utiliser les titres des gros succès du box-office pour ses courts métrages, qu'il y ait un rapport ou non entre les films, le studio Hal Roach a donc capitalisé avec ce petit film sur le succès de The merry widow, de Stroheim, sorti en 1925. Les films ne pourraient être plus dissemblables...

James Finlayson est marié, mais il passe son temps à la chasse... Pendant ce temps son épouse (Ethel Clayton) se languit et subit la conquête d'un voisin (Tyler Brooke) qui la convoitait avec insistance. Puis Finlayson découvrant la vérité, s'en va... Mais non sans un plan pour reconquérir son épouse.

A travers le dispositif du voisin immédiat qui espionne avec insistance, on pense un peu à So this is Paris, de Lubitsch, mais il se peut que ce soit un pur hasard, les deux films étant contemporains. C'est en tout cas un joyeux film désordonné, assez typique des oeuvres délirantes réalisées par Wallace, avec ou sans Laurel. Le crédit de ce dernier reste assez obscur, si ce n'est que le style profondément idiot du film ressemble assez aux courts métrages en solo qu'il a interprétés quelques années auparavant. Le délire ici va tellement loin, qu'il me semble impossible de raconter vraiment le film... Par contre, je tiens à préciser qu'on y remarquera la présence maquillée mais évidente d'un grand nom de la comédie, qui devait se sentir à l'aise dans ce grand n'importe quoi...

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Published by François Massarelli - dans Laurel & Hardy Hal Roach Muet