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14 août 2014 4 14 /08 /août /2014 11:04

Il y a un je-ne-sais quoi d'intrigant, de foncièrement excentrique à tous les films de Niccol, y compris à son très conventionnel réquisitoire-coup de poing Lord of war. Mais ce sont bien sur ses films de science-Fiction qui retiennent l'attention (Et j'y inclus un film dont il a écrit le scénario, le magsitral The Truman Show, de Peter Weir). Forcément, un film comme Gattaca ne peut que se prêter avantageusement à toute analyse des spécificités de cet auteur, tellement fasciné par les possibilités (Surtout négatives) de la science et de la technologie actuelle qu'il aime à imaginer des mondes dans lesquels nos possibilités théoriques deviennent des réalités par lesquelles la civilisation est régie. SimOne et son producteur lessivé qui se saisit des possibilités infinies occasionnées par la création d'une actrice virtuelle, ou In time et ses êtres humains qui ont remplacé l'argent par le temps qui leur reste sur terre, augmentable ou réductible, ces deux films ne sont pas autre chose que des variantes sur le type de monde offert dans Gattaca...

Jerome Morrow est un imposteur. De son vrai nom Vincent Anton Freeman (Ethan Hawke), il est un être conçu sans triche, imparfait (Le terme est "in-valide") et destiné à rester un subalterne dans une société décidément élitiste dont les élites sont conçues dans la sécurité grâce aux grands moyens dont dispose la génétique... Mais Vincent a décidé de tout mettre de son côté pour accomplir son rêve: entrer à Gattaca, centre spatial de pointe qui n'emploie que des êtres parfaits, des "valides", puis devenir un membre d'une expédition spatiale. Pour parvenir à ses fins et tromper la vigilance d'une société dont l'obsession est de contrôler en permanence les traces d'ADN que tout un chacun laisse derrière soi, il va s'attacher les services de Jerome Morrow (Jude Law), le vrai, un athlète qui a eu un accident et dont la vie est ruinée, mais dont l'ADN est de toute beauté. Reposant sur le sang, l'urine, les cheveux, la peau de Morrow, le héros trouve des stratagèmes pour tromper encore et encore sa hiérarchie, mais aussi ses pareils, dont la très jolie Irene (Uma Thurman); jusqu'à ce qu'un crime soit commis, et que le seul indice probant soit un cil, celui d'un 'in-valide' disparu, un certain Vincent Freeman...

La création fascinée d'une société valide dans ses moindres détails, c'est l'apanage de grands films de Kubrick ou Scott, bien sur. Il fallait un certain culot à Niccol pour s'attaquer à un film comme celui-ci, et heureusement qu'il n'est pas Michael bay, dont le film The island reste probablement l'un des plus hilarants films d'humour potache involontaire de toute l'histoire de l'humanité. Niccol a laissé à Vincent narrateur le soin de faire les présentations, et le film commence de façon dynamique, tout y est en place et le stratagème (Certes ô combien tiré par les cheveux, si j'ose dire vu les circonstances, mais on veut bien y croire le temps d'un film, c'est la magie de l'art) fonctionne à plein. On se doute qu'un grain de sable va précipiter les choses dans le mauvais sens, mais peu importe: la peinture subtile d'une société tellement enferrée dans ses certitudes élitistes qu'un homme jugé imparfait n'a aucune chance est l'essentiel du film, dans lequel Niccol adopte avec efficacité le ton d'un film de science-fiction léger, au suspense bien assumé. La dénonciation des excès vers lesquels la science ne peut que nous entrainer est saine, et proche des réalités du possible. Et le message du film est aussi tourné vers les êtres imparfaits, dont le très ambitieux Vincent est un héros très ambigu, et l'athlète qui a tout perdu un symbole. La direction d'acteurs repose sur la nuance et une sobriété de tous les instants, car comme le fait remarquer Irene à Vincent, ici si on est enthousiaste on se fait remarquer... Mais Niccol, lui, a su justement s'investir avec enthousiasme derrière son film, qu'il saupoudre en permanence de poésie cinématographique bienvenue, et si les ficelles du scénario tendent à se voir sur la fin (Réapparition inattendue - et inévitable - d'un frère perdu), on l'accepte de bonne grâce, parce que le film en vaut sacrément la peine. Déplorons juste légèrement que Niccol ne soit pas allé plus loin dans la fable, mais après tout c'est exactement ce que Weir fera avec The Truman Show, et Niccol lui emboîtera le pas avec humour dans SimOne.

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Published by François Massarelli - dans Andrew Niccol Science-fiction