Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Présentation

  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
  • Contact

Recherche

Catégories

2 novembre 2014 7 02 /11 /novembre /2014 16:15

George M. Cohan (1878-1942) est une grande figure du théâtre et du music-hall aux Etats-Unis, qui a eu un succès phénoménal à Broadway entre 1904 et les années 30. Le film le montre, interprété par rien moins que James Cagney, dans une évocation très allégorique: au soir de sa vie (Cohan est d'ailleurs décédé quelques mois après la sortie de ce film), le vieil acteur reçoit une convocation à la Maison Blanche, et un peu embarrassé, s'en va rejoindre Roosevelt dans le bureau de celui-ci. L'embarras s'explique aisément: dans la pièce qu'il est en train de jouer à Broadway, il interprète sans complexe le président, dans une caricature assez leste... Pourtant l'entrevue va être l'occasion pour lui de lui raconter sa vie. Au dehors, quand Cohan rentre chez lui, une distinction inattendue à la boutonnière, des soldats paradent, au son d'une de ses chansons: ils vont partir pour l'Europe. Cohan rentre dans la parade et chante avec eux...

"Musical", avec Michael curtiz, le mot prend généralement une autre signification que celle généralement acceptée, y compris pour les quelques films du genre que le grand metteur en scène a réalisé à la Warner, c'est-à-dire le studio ou le grand Busby Berkeley a inventé la comédie musicale cinématographique. Curtiz, lui en est toujours resté au genre représenté par The singing fool(Lloyd Bacon, 1928), ou Mammy (Qu'il avait lui-même tourné en 1930): des intrigues situées dans le milieu du spectacle, avec des numéros musicaux certes intégrés au corpus filmique, mais situé sur un espace scénique cohérent et clairement délimité. Yankee Doodle Dandy se trouve donc plus être une biographie d'un homme de spectacle, avec quelques numéros in extenso et des extraits conséquents des spectacles de Cohan. Choix donc délibéré de Curtiz, qui malgré sa propre tendance au baroque flamboyant, ne concevait de films que situés dans un cadre plausible. Une contradiction quelque part, pour l'un des grands illusionnistes de la Warner avec ses jeux d'ombres, mais une contradiction qu'il semblait assumer. Du reste, si bien des films musicaux de Curtiz sont très accessoires pour ne pas dire médiocres (This is the army, Mammy, Night and day) celui-ci est non seulement un classique, c'est aussi un grand film irrésistible...

Grâce à Cagney? l'acteur n'est pas venu les mains vides, le film est en effet produit par son frère, et des membres de sa famille sont présents dans le casting. Il s'est passionné pour un personnage de hâbleur Irlandais, imbu de lui-même mais dont l'énergie indéniable semble propulser tous ses spectacles vers le succès; un personnage de véritable Américain, venu de nulle part et qui s'est construit un empire théâtral à la seule force de ses poignets - et de ses claquettes. Un personnage profondément patriote aussi, et un brin conservateur, ce que le film ne cache pas, mais fait passer de manière un peu subliminale. Et c'est devant l'un des présidents qui aura le plus fait bouger les lignes de la vieille Amérique vers un progressisme mâtiné d'interventionnisme, que Cohan semble, en racontant son histoire, rassembler tous les Américains derrière lui, devant la menace représentée par Hitler. Le film est d'ailleurs largement romancé, dans la mesure ou la médaille obtenue par Cohan à la fin du film, donc en 1941 ou 1942, lui a été attribuée en réalité en 1936.

Mais Curtiz aussi s'est passionné: son film est une réussite de bout en bout, peu importe le personnage, le message reste valide: un message profondément démocratique, réactivé par un cinéaste qui a beaucoup voyagé, comme le font les Cohan dans la première heure de ce film. Solidarité de saltimbanque? L'ancien acteur, dramaturge et homme à tout faire dans le cirque et le théâtre Michael Kertesz, dit Curtiz, s'est sans doute beaucoup retrouvé dans ce héros un peu en marge, qui a été absent des conflits et moments importants (Il nous est présenté souhaitant s'engager pour combattre en 1917, mais est refusé par les autorités en raison de son âge) mais n'a cessé d'incarner, à sa façon, l'esprit d'un pays qui a, en 1926, accueilli à bras ouverts l'éternel exilé Curtiz. Celui-ci a particulièrement soigné son évocation: certes, Cohan n'est pas l'un des êtres les plus fascinants qui soient, mais le Cohan de Cagney et Curtiz est très attachant, et le film est une merveille, qui se bonifie à chaque vision.

Partager cet article
Repost0
Published by François Massarelli - dans Michael Curtiz