Il aurait du appeler son film Alice in Wonderland 2: The mission. C'est vrai, avec cette tendance absurde de la maison Disney à faire exécuter par des tâcherons des suites qui ne sont qu'un copié-collé vaguement retrafiquouillé, on jurerait à voir ce film qu'on est devant ce genre de situation... Sauf que l'animation est soignée, ça oui: d'ailleurs, que voulez-vous, les établissements Burton and Co, c'est une maison sérieuse, ça oui. On jurerait que tout ça est vrai, oui oui. Ca c'est de l'effet spécial...
Oui, je suis volontiers ironique, voire amer, devant un tel naufrage: un film inutile, vide de sens, gâché de l'intérieur, dans lequel rien n'est à sauver: le scénario nous prend pour des imbéciles, ce que certes beaucoup d'entre nous sommes, et considère d'une part que les classiques sont obsolètes, d'autre part qu'il convient de les remplacer, et enfin que cela doit être fait en les adaptant au gout du jour. Exit donc le savoureux portrait en miroir déformant et psychédélique d'une époque délirante dans ses convenances, et bonjour le rêve-qui-n'en-est-pas-un, logique jusqu'à l'extrême, dans lequel tout retombe sur ses jambes. Et en prime, l'actrice principale est nullissime. Ce n'est pas forcément de sa faute... Comme Estella Warren (Planet of the apes), Burton semble ne pas lui avoir accordé le moindre intérêt, tout occupé qu'il était à installer la tente pour son cirque habituel: décors allusifs (Oh, l'arbre de Sleepy Hollow!!), monde bigarré mais inquiétant parce que c'est le contrat, animaux marginaux vendus au poids, et l'insupportable Johnny Depp. Je ne sais pas vous, mais moi, Johnny Depp, je ne peux plus. Sa voix, son jeu, c'est même physique. Il est irritant, et la perruque orange n'aide pas. Carroll, c'est un esprit, ce n'est pas qu'une perruque orange! Et Finalement, Burton fait exactement ce qu'on attend de lui: un remake qui renvoie techniquement l'original aux orties (C'est un vieux film, il a plus de six mois, donc les gens ne voudront plus le regarder, n'est-ce-pas?), en accumulant les effets-spéciaux-qu'on-jurerait-vrais, et en fournissant la dose calculée de faux-marginal-pour-rire. Le style devient un savoir-faire vide, le génie narratif d'avant se transforme en prêt à consommer et nous fait bailler, et Lewis Carroll est trahi... Pourquoi pas après tout: un film est un film, ce n'est pas une oeuvre litéraire. Mais quant à trahir, autant le faire bien. Ici, la trahison de l'oeuvre débouche sur un film d'une vacuité abyssale. ..Et profondément ennuyeux. Remarquez, Burton n'a pour l'instant jamais fait pire, c'est le bon côté de la chose.
Pour résumer ce film idiot, inutile, donc: ridicule, dispensable, beau à voir, mais comme une coquille vide. un film destiné à servir de disque de démonstration pour home-cinema 3D. Rajoutez-en dans le clinquant, faut que le client en prenne plein les yeux...
Pouah.