Ce film rare, méconnu et... à tout petit budget s'inscrit dans une série de téléfilms commandés par la chaîne Showtime à des grands noms du grand écran (William Friedkin, John Milius, entre autres, figurent parmi les réalisateurs aux côtés de Dante), avec pour consigne de se situer dans les années 50, et de montrer des adolescents en rebellion à travers des remakes de films de série B de la période. Fidèle à sa tradition, Dante multiplie les références au cinéma, en faisant des parents de l'une des adolescentes des propriétaires d'un drive-in qui passe d'abominables nanars (L'une des affiches de film présentes dans le hall de l'établissement est bien sûr celle du film original Runaway daughters, d'Edward Cahn). Le film commence par un clin d'oeil affectueux de Dante, puisqu'on est plongé dans un film de loup-garous fifties, plus vrai que nature...
Mary (Holly Fields), Angie (Julie Bowen) et Laura (Jenny Lewis) vivent dans un trou perdu, au moment ou les Russes viennent de rendre public le lancement du Spoutnik, qui tend à bouleverser l'Amérique. Mais les trois adolescentes sont surtout concernées par les garçons, avec lesquels elles sortent souvent, mais dont les mains baladeuses ne trouvent pas auprès des jeunes femmes la même résistance. Laura est totalement réfractaire et le fait bien savoir; Mary se défend tant bien que mal, au grand désespoir de son copain Bob. Quant à Angie, elle tend à prendre les devants, avec son petit ami Jimmy (Paul Rudd), un vrai voyou certes, mais avec une morale. Mais Bob réussit à manipuler Mary tant et si bien que celle-ci... est enceinte. Bob, en l'apprenant, s'enfuit pour San Diego, où il va profiter de l'ambiance de paranoïa anticommuniste pour s'engager dans la marine. Les trois filles décident de simuler un enlèvement, et partent à sa poursuite afin qu'il ne laisse pas tomber Mary dans sa situation délicate. Elles vont rencontrer beaucoup de gens sur le chemin, dont des serial killers, des policiers corrompus, des miliciens d'extrême droite... Pendant que leurs parents décident devant l'inefficacité de la police de faire appel à un détective privé.
Bien sûr, on est bien devant un petit film à budget fort limité (Les génériques le trahissent, ainsi qu'une animation de spoutnik très indigente...), ce qui n'a rien détonnant quand on se souvient qu'à cette époque, seule HBO soignait vraiment la forme dans la télévision Américaine, avant que le succès de quelques séries ne pousse enfin les studios à quelques efforts. Mais on est aussi dans l'univers typique de Joe Dante, son Amérique profonde, ses gens certes butés mais montrés avec une réelle tendresse. Les préoccupations sont systématiquement soit totalement triviales, soit délirantes, entre le degré de tripotage acceptable et le risque posé par le Spoutnik! Et le film épouse une structure assez proche de celle de Matinée, dont les personnages semblaient obsédés par la menace de la Baie des Cochons. Dante ne se lance jamais totalement dans la comédie, préférant laisser les personnages s'exprimer dans leur premier degré, avec un respect notable. Mais ici, il manque un peu d'ampleur au film pour vraiment atteindre son but; il est probable que ce téléfilm est plus intéressant lorsqu'il est vu en compagnie des autres films de la série, tant on a l'impression d'assister bien plus à un brouillon, voire une copie de travail, qu'à une oeuvre achevée.