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30 juin 2016 4 30 /06 /juin /2016 16:05

Ne confondons pas JFK et ce Nixon, qui vient cinq années après: JFK N'est pas la biographie de Kennedy, qui est à la fois le grand absent, et le principal sujet du film, à travers l'enquête du procureur Jim Garrison autour de son assassinat. Nixon, lui, est bien un film biographique, qui se concentre essentiellement mais pas que sur les années de présidence de celui qu'on a appelé "Tricky Dick" (Richard le Tordu), un surnom qui lui allait comme un gant! Nixon est donc joué par Anthony Hopkins, qui est magistral, on n'y reviendra donc pas.

Le film épouse, comme c'est devenu la règle pour se genre de films, une structure qui n'a rien de linéaire. Ca commence par le Watergate, puis on a la réaction de Nixon et de son entourage à cette fameuse affaire lamentable d'espionnage politique (que je rappellerai brièvement dans le paragraphe suivant), avant que la chronologie n'explose au gré de flash-backs initiés par des conversations, des résurgences de souvenirs, et autres. Le film se suit malgré tout asse bien, et traite de beaucoup de thèmes qui permettent de dresser un portrait fascinant du personnage: l'enfance pauvre, dans un foyer tenu par un père entreprenant mais malchanceux, en Californie, et l'influence envahissante d'une mère Quaker (Mary Steenburgen); l'adolescence, marquée par la mort de deux de ses frères, de tuberculose, et par le rejet de ses camarades, au sport, à l'école et à l'université: Nixon était trop pauvre... Puis le mariage avec Pat (Interprétée à l'age mur par Joan Allen, et elle est fantastique elle aussi), et enfin la carrière politique évoquée à travers les coups tortueux (Nixon en chevalier blanc de l'anti-communisme auprès de McCarthy), en coups d'éclat (La vice-présidence avec Eisenhower), en ratages sublimes (la campagne de 1960), en traversées du désert (de 1962 à 1968), puis les sollicitations de l'extrême-droite, la mort de Bobby Kennedy et la présidentielle de 1968. mais le plus gros sera bien sur consacré à a présidence en tant que telle, et l'obsession pour Nixon de se faire aimer, tut en affirmant haut et fort ses droits absolus en tant que président ("Un président, ça bombarde qui ça veut, quand ça veut", dit-il à propos du Cambodge...). Tout au long du film, pourtant, un fantôme: celui de JFK, devenu en quelque sorte le modèle ou repoussoir favori de Nixon, le président auquel on ne passe rien: Kennedy, au contraire, était celui auquel on passait tout...

Le Watergate, si vous voulez vous épargner une recherche sur internet, est donc cette lamentable affaire de "plombiers" à la solde du Parti Républicain qui ont été arrêtés alors qu'ils posaient des micros au siège du Parti Démocrate (Dans un immeuble de Washington appelé "Watergate Building", d'où le nom de l'affaire), en vue des élections de 1972. Très vite, la question de l'implication du président dans l'affaire a été soulevée, en particulier par Woodward et Bernstein, les journalistes du Washington Post qui ont probablement plus fait avancer l'enquête que n'importe qui... Et au final, la classe politique s'apprêtant à voter un impeachment, c'est à dire une destitution partielle, et une mise à disposition de la justice pour Nixon pour parjure, celui-ci a été contraint de démissionner en 1974.

Pour revenir au film, ce n'est pas un portrait de Nixon, d'une certaine manière, le bonhomme ayant été plus ou moins jugé par l'histoire, la télévision, et aujourd'hui la mort, comme le rappelle le réalisateur dans un épilogue qui voit le seul président à avoir été contraint de démissionner enterré en grandes pompes, accompagné dans sa dernière demeure par rien moins que cinq de ses successeurs: Gerald Ford, Jimmy Carter, Ronald Reagan, George H. Bush et Bill Clinton... Nixon est pourtant le héros objectif et paradoxal du film, victime d'une malédiction personnelle, car peu sur de lui et mal à l'aise en de nombreuses circonstances: à force de ne pas être aimé, la recherche de la popularité est devenue, nous dit le film, une obsession personnelle pour Nixon, qui plus est hanté par la haute figure morale de sa maman Quaker rigoriste!

Non, le film est plus un portrait du pouvoir, réalisé par un cinéaste fiévreux, qui tente de faire passer sa passion par la mise en scène. Comme d'habitude avec Stone, c'est énorme, parfois exagéré, mais aussi foisonnant et inspiré. Le film est lus maîtrisé, moins délirant que pouvait l'être JFK. Peut-être que le fait d'avoir exorcisé tout son fiel avec Natural born killers avant de faire ce film a servi! Toutes les techniques de montage subjectif, de truquages sensoriels, les différences de pellicule pour brouiller es pistes entre images authentiques et reconstitution, mais aussi des techniques parfois très anciennes (des fondus à la Griffith, et des fondus-enchaînés à la Eisenstein!) sont utilisés au service d'une narration fleuve sur 213 minutes... Et c'est passionnant, bien sur. Stone règle ses comptes avec un président sous lequel il a servi au Vietnam avant de déchanter, mais le portrait est beaucoup plus nuancé que son W, qui tirait à boulets rouges sur l'affreux George W. Bush, à la fin de son mandat qui plus est!

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Published by François Massarelli - dans Oliver Stone