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12 mai 2017 5 12 /05 /mai /2017 16:49

On parle parfois de western spaghetti, en faisant allusion à la branche Italienne du genre; Tampopo a été présenté comme le premier western-ramen, du nom de cette spécialité culinaire Japonaise, qui donne son principal argument au film: la restauratrice Tampopo, en effet, entend bien trouver la recette idéale de ramen pour faire venir un maximum de clients dans sa petite échoppe, mais pour cela, il lui faut faire appel à un maître: celui-ci, Goro, sera donc l'élément westernien du film, constamment coiffé d'un vieux chapeau de cuir, et doté d'un caractère volontiers laconique: on n'est donc pas surpris lorsque à la fin du film il part au loin... au volant de son camion. Donc de western, il n'y a point! Par contre, pour ce qui est des nouilles et de leur bouillon, ce n'est pas ça qui manque, et il est bon à savoir que ce film est l'un de ceux qui vous donnera faim quand vous le visionnerez...

Raconter Tampopo s'avère impossible, tant Itami s'est amusé à dynamiter sa propre narration par des digressions, qui toutes tournent autour de la nourriture: anecdotes drolatiques, séquences burlesques, et même une séquence érotique du plus haut mauvais goût se succèdent, venant généralement parasiter l'intrigue principale en se greffant plus ou moins artificiellement. Ca vous rappelle quelque chose? Moi oui: ce film est presque structuré comme un épisode du Monty Python's flying circus! Et ça commence dès le départ, avant même le générique, avec l'étrange vision d'une salle de cinéma dans laquelle s'installent un gangster (Vêtu intégralement de blanc) et sa maîtresse, qui font installer un table sur laquelle un maître d'hôtel dépose des victuailles. Puis l'homme nous parle: car après tout nous avons un point commun, nous allons voir un film aussi! Mais le fait qu'il s'apprête à manger ne l'empêche pas de terroriser les autres spectateurs, qu'il menace de tuer s'il leur vient l'idée de faire le moindre bruit en mangeant des chips... Un écho, peut-être, annonciateur d'une scène dans le film: une dame enseigne à plusieurs jeune femmes les bonnes manières occidentales dans un restaurant, où elle entend bien faire passer l'idée que quand un Italien mange des spaghetti alla vongole, on n'entend pas un bruit... Mais c'était compter sans le client occidental, occuper à manger aussi bruyamment que possible... son plat de spaghetti.

L'humour se fait parfois intrigant et même surréaliste, voire franchement grinçant: la scène durant laquelle un père de famille, constatant que son épouse est au bout de sa maladie, l'exhorte à faire à manger, pensant qu'elle ne pourra pas mourir si on lui permet d'accomplir sa mission... le résultat sera logique, cruel et sans appel. Mais l'humour de l'intrigue principale, celle de Tampopo (Nobuko Miyamoto) et de Goro le routier-cowboy (Tsutomu Yamazaki), reste d'un humour le plus souvent bon enfant, et possède constamment un charme poétique qui rend le film, décidément attachant. C'est donc non seulement un Ofni, un film unique en son genre, c'est aussi le chef d'oeuvre inclassable d'un metteur en scène oublié, pourvoyeur de comédies et excentrique à l'oeil gourmand.

...Gourmand, c'est bien le mot. Ce film entièrement dédié à la joie de manger ne se contente pas de vous donner envie de participer à la fête. Il est une fête, entièrement consacrée au plaisir d'être en vie.

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Published by François Massarelli - dans Comédie Criterion