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17 août 2017 4 17 /08 /août /2017 17:14

Kikuko (Setsuko Hara) vit avec son mari Shuichi (Ken Uehara) chez ses beaux-parents: ils n'ont pas d'enfants, et le mari boit, découche, et d'une manière générale affiche vis-à-vis de son épouse un mépris de plus en plus encombrant. Les parents, qui ne sont pas dupes, n'ont pas la même façon de réagir à la crise: la mère (Teruko Nagaoka) tend à relativiser, et à se dire que si Shuichi s'est détourné de Kikuko, c'est probablement que celle-ci n'a pas su gérer la crise... Mais le père (So Yamamura) , lui, prend ouvertement le parti de la jeune femme, et va essayer de l'aider à sa façon, en agissant sur la vie de son fils. Mais l'arrivée de Fusako (Chieko Nakakita) , la soeur de Shuichi, qui vient de quitter son mari avec ses deux enfants et a décidé de retourner au domicile parental, va souligner un peu plus le déséquilibre...

Fragilité du quotidien, environnement familial, un Japon en paix, mais dont les tourments intérieurs se manifestent dans la cellule familiale, c'est l'univers habituel de Naruse, qui sonde ici une détresse féminine avec une rare acuité, avec tendresse mais sans pitié pour autant. L'enjeu du film n'est pas le retour de l'amour pour les deux héros, mais la liberté de la jeune femme. Les efforts du beau-père portent évidemment vers un rapprochement, puisqu'il manoeuvre pour que son fils arrête ses aventures, mais il se rend vite compte qu'à se mêler de ce qui ne le regarde pas, il provoque des situations inattendues, et qui portent préjudice à d'autres... En particulier quand il rencontre la maîtresse de Shuichi, juste après que celui-ci l'ait quittée: la jeune femme est enceinte... Subtilement, Naruse introduit des personnages qui prouvent qu'il y a une évolution au Japon, comme la secrétaire du vieil homme, qui va mener son enquête autour de Shuichi, afin d'aider le vieil homme dans son entreprise. Elle est, d'ailleurs, habillée à l'occidentale, contrairement à Kukiko.

Le portrait est double, celui d'une femme admirable, et d'un homme qui va porter vers elle des efforts moraux au chevaleresque certes vieillot, mais il est si gentil... La fin montre la façon dont il va accepter, à la fin, sa rébellion jusque dans ses inévitables conséquences, c'est-à-dire qu'il sait très bien qu'elle va quitter son mari. Mais il l'accepte... Ce que pas beaucoup d'hommes de cet âge auraient accepté, sans doute... Magnifique histoire de femme, cette histoire cruelle n'est finalement pas exempte d'une certaine forme d'optimisme!

Cela étant dit, le cinéaste et don légendaire pessimisme reprennent malgré tout leurs droits, par le biais d'une structure complexe d'une part, dans laquelle la fuite inexorable du temps se fait sentir par un émiettement d'anecdotes et de points de vue (souvent celui de femmes, du reste: la mère de Shuichi, puis Fusako, sa soeur, puis la fille de celle-ci mais aussi les nombreuses femmes qui participent aux épisodes consacrés à l'adultère); et surtout le fil rouge du film reste cette certitude que derrière l'histoire de la tristesse d'une femme négligée, une autre histoire secrète, celle de l'affection grandissante et vouée à l'échec d'une femme pour son beau-père, se cache, manquant de se révéler au grand jour dans l'ultime scène. 

 

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Published by François Massarelli - dans Mikio Naruse