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31 décembre 2017 7 31 /12 /décembre /2017 09:37

En à peine plus de temps qu'il n'en faut à Sherlock Holmes pour dire "The game is afoot", le film nous entraîne dans une intrigue de magie noire, avec sacrifices humains, et pentacles tracés à la craie... Mais dans quel type de Sherlock nous a-t-on entraînés?

Je pense qu'on peut ici parler de réactualisation plutôt que de détournement, mis ce Sherlock-là surprend, c'est le moins que l'on puisse dire... Confié à Robert Downey Jr, de retour en grâce après ses années noires, le rôle est délibérément écarté du canon Holmesien... Tout en étant replacé de façon réussie dans un Londres probablement bien plus authentique que les habitudes Victoriennes autour du personnage ne pourraient nous le faire penser. 

L'intrigue n'est pas adaptée d'un roman ou d'une nouvelle spécifique, mais fait écho à l'oeuvre par un certain nombre de détails ou personnages; outre Watson et l'ineffable inspecteur Lestrade, on retrouvera ici Irene Adler, qui n'était apparue que dans une seule histoire, mais qui a durablement marqué les esprits; les noms de Mycroft Holmes et d'un autre personnage de premier plan sont mentionnés, alors que Mrs Hudson, la digne propriétaire et souffre-douleur du détective, est elle bien présente.

1890: Holmes (Robert Downey Jr) et Watson (Jude Law) contribuent à l'arrestation du dangereux Lord Blackwood (Mark Strong), un adepte de la magie noire qui s'est rendu coupable du meurtre de cinq femmes. Cinq femmes tuées aux alentours de 1890? Si ça n'est pas un clin d'oeil, ça y ressemble... Il est exécuté, après avoir déclenché la panique dans la prison, où gardiens et pensionnaires ont tous eu peur de tomber sous son influence psychique. Après l'exécution, Holmes et Watson sont supposés partir chacun de leur côté: Holmes continuant son travail sans assistance, et Watson se mariant avec la belle Mary (Kelly Reilly). Mais bien sûr, les événements vont les empêcher de prendre cette direction dans leurs vies, puisque peu de temps après son exécution, Lord Blackwood ressuscite, et l'aventurière Irene Adler (Rachel McAdams) revient dans la vie de Holmes en lui confiant un travail inattendu...

La réalisation est typique de ce qu'on attend aujourd'hui d'un film d'action: rapide, enlevée, parfois décérébrée, et confiante dans ses moyens, qui sont illimités: le cadre est maîtrisé, les effets spéciaux nombreux, la recréation du Londres de 1890, grouillant et avec son futur affiché dans le film (le London Bridge est en construction, et sert du reste de décor à certaines scènes à la fin), est adéquate, et le ton est plaisant. Pourquoi donc suis-je si mitigé?

Je pense que ça tient d'abord au titre. Iron Man ou Sherlock Holmes? Certes, Downey est bon, mais je ne vois pas Serlock Holmes ici. Pour deux raisons: la première est qu'il est trop physique, là ou le Holmes auquel nous sommes habitués est 100% intellect. Pas le genre d'homme à aller faire des combats pour se défouler, donc... Et puis la tradition établie par Conan Doyle, et reprise adaptation après adaptation, est de montrer Holmes à travers les yeux de Watson, donc une vision déformée, sublimée par ce mélange subtil de jalousie, de frustration, d'amitié et d'admiration profonde. Ici, le bon docteur est un ami sûr, un faire-valoir utile en même temps qu'une caution Londonienne, mais il n'est en rien le principal point de vue. Et si on comprend le désir des auteurs, de mettre leur détective au diapason du Londres de 1890 tel qu'on l connaît aujourd'hui par le travail des historiens, force est de constater que le personnage de détective auquel nous sommes attachés est loin de ce personnage d'intellectuel qui garde malgré tout les pieds dans le glaise de la populace. Holmes n'est pas de ce monde.

C'était probablement volontaire, remarquez: l'idée de changer le point de vue avait d'ailleurs été (Subtilement, cela va sans dire) avancée par Billy Wilder dans son appropriation (The private life of Sherlock Holmes, 1970), et il s'était lui amusé à rester dans un cadre aussi prche du canon que possible. Mais le résultat de ce film au goût du jour, est souvent trop malin, et tend à perdre le public. Le suspense particulier des histoires de Sherlock Holmes est intimement lié à cette notion de point de vue, selon laquelle nous sommes assujettis à la narration via Watson. Ici, nous sommes livrés à un narrateur trop fort pour nous.

D'où cette impression d'assister à un tour de passe-passe permanent, et surtout, un festival pyrotechnique, avec des bourre-pifs à toutes les scènes. Donc c'est sympathique, parfois drôle, parfaitement interprété (Le casting est exceptionnel), mais... 

De façon intéressante, la série Sherlock de Mark Gatiss et Steven Moffat, pourtant située à l'époque contemporaine, est plus proche de l'esprit de l'original. C'est paradoxal, et ça n'enlève pas le plaisir modeste mais certain qu'on peut prendre à la vision de cet aimable petit film de genre pour samedis soirs désoeuvrés.

 

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Published by François Massarelli - dans Sherlock Holmes