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6 janvier 2018 6 06 /01 /janvier /2018 18:36

Tourné à Hawaii, avec ce qui aurait dû être une équipe réduite et un petit budget (mais ce sera tout le contraire), Four frightened people est dans son intention un petit film d'aventures... Qui dégénère sérieusement. Le film est adapté d'un roman oublié de E. Arnot Anderson, mais par certains côtés rappelle furieusement l'un des longs métrages de comédie les plus emblématiques de l'auteur: Male and female n'est jamais très loin. Mais malgré ce pedigree intéressant avec cette réminiscence de l'une des oeuvres les plus enthousiasmantes de DeMille, ce petit (78 minutes) film a été un échec cuisant.

Dommage, car je le répète, ça commençait bien: sur un bateau en partance vers les Etats-Unis, quatre Américains s'enfuient: ils savent que la peste est à bord, et souhaitent survivre. Ils débarquent, et tentent de gagner la civilisation, comme on disait à cette époque. Mrs Mardick (Mary Boland), une femme de la bonne société typique, est attendue chez elle pour donner une conférence sur le contrôle des naissances, une obsession personnelle. Elle ne se départit jamais, ni d'un certain sens pratique un peu décalé, ni d'un pékinois. Arnold Ainger (Herbert Marshall) est un chimiste, assez effacé, et au tempérament facilement cynique. Stewart Corder (William Gargan) est un reporter vedette, qui s'avère d'une impatience assez insupportable, en particulier auprès de celle qui le vénère: Judy Jones (Claudette Colbert) est une vieille fille, c'est à dire, en langage pré-code, une femme portant lunettes... Elle va subir à la fois la solidarité féminine encombrante de Mrs Mardick, et les sarcasmes des deux hommes de l'expédition, qui ne perdent pas une occasion de lui dire qu'elle n' a pas grand chose d'une femme... Avant une scène charnière, sur laquelle je reviendrai plus loin.

Parce que quand même, une fois admis que ce film est plus que politiquement incorrect (Indigènes tous plus primitifs les uns que les autres, discours vaguement eugéniste de Mrs Mardick, et autres fantasmes du film d'aventure classique, voyez les Tarzan pour ça), après tout c'est hautement distrayant. Dès le départ, qui installe rapidement l'intrigue en commençant après un ou deux plans d'exposition (et un montage dynamique) la fuite des passagers. Et on s'amuse beaucoup de voir ces quatre personnes qui n'ont rien à faire dans une jungle, chercher à survivre, et se chamailler pour un rien... Mais le parallèle avec Male and female s'effectue surtout vers la fin du film, quand Ainger et Corder ont enfin reconnu Judy comme une femme (voir plus bas), et se la disputent. Oh, sans véritablement se battre, rassurez-vous. Mais il y a ici un renversement de la situation du film initial, qui voyait deux femmes se disputer les faveurs, sur une île déserte, de celui qui était leur domestique à Londres. Mais en commun entre les deux films, on trouve le fait que l'île déserte devienne un révélateur de l'être profond de chacun des protagonistes. A ce sujet, la transformation de Claudette Colbert est un délice, rappelant l'importance de cette actrice qu'il ne faudrait pas oublier...

Et donc, la scène charnière qui va tout faire changer chez les personnages, est bien sûr... Une scène de douche, sous la cascade qui plus est. Judy s'est éloignée du camp, et les deux hommes la cherchent. quand ils la trouvent, elle est nue, et ça change tout entre eux. A partir de là, le film se pare d'un discours de plus en plus sérieux, et c'est bien dommage, il avait si bien commencé... Mais décidément, entre son utilisation inattendue du lait d'ânesse (The sign of the cross), sa petite habitude matinale d'aller taquiner la vague en oubliant de mettre un maillot (I cover the waterfront, James Cruze, 1933), il semble que Claudette Colbert prenait de mauvaises habitudes avant que le code de production n'y mette bon ordre.

Je le disais plus haut, DeMille considérait ce petit film comme un film de vacances... Mais c'est plus fort que lui, il lui a fallu aller le tourner en pleine jungle! du coup, les ennuis ont dû se succéder, Claudette Colbert a d'ailleurs fini le tournage par une appendicite royale, et les difficultés se ressentent parfois, dans le fait que la caméra reste quand même particulièrement statique. Pour couronner le tout, le film a été retaillé après l'arrivée du code de production, et les quinze minutes qui manquent n'ont pas été retrouvées. 

Du coup, on est en droit de se demander: sachant que cette version censurée contient une scène de trois minutes impliquant Claudette Colbert, nue dans une cascade, secourue par un Herbert Marshall plus flamboyant que jamais, même en peau de léopard, mais qu'est-ce qu'il pouvait bien y avoir dans les scènes qui ont été rabotées? Du cannibalisme? une orgie d'indigènes gays? Henry Wilcoxon?

 

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Published by François Massarelli - dans Cecil B. DeMille Comédie Pre-code