Dans le magasin Les Grandes Galeries, c'est la révolution: un nouveau directeur a été engagé, M. Lepetit (Fabrice Luchini), dont la mission est apparemment de redresser l'affaire. C'est une mission de la dernière chance, car les Zactionnaires sont très tentés de liquider la chose, devenue peu rentable, au mépris bien entendu du personnel. Par contre, Lepetit, même si c'est parfois maladroit, entend bien ressouder le personnel justement, en leur inculquant une culture collective d'entreprise. Ca passe par des idées, des stages, des activités diverses: saut à l'élastique, chorale, course... Le personnel apprécie, disons, diversement.
Le film commence sans vrais repères, et on passe assez rapidement d'un personnage à l'autre: tous les protagonistes sont pourtant liés par leur appartenance au personnel du magasin Parisien, au nom fictif mais si transparent. Dans ce qui est donc un film choral, Klapisch dont c'est le premier long métrage s'applique à souligner les rapprochements en montrant la façon dont personne, finalement, ne veut quitter sa zone de confort personnel, et donc chacun a une propension à s'éloigner des autres, et à le revendiquer. C'est pourtant jamais un prêche, ni dans un sens ni dans l'autre, mais une suite d'observations superbement orchestrée.
On peut noter qu'outre Luchini, le film nous présente une impressionnante galerie d'acteurs dont beaucoup nous sont devenus familiers. Certains l'étaient déjà, d'ailleurs: Zinedine Souallem, Jean-Pierre Daroussin, Karin Viard, Nathalie Richard, Odette Laure, Fred Personne...
Il y a du Tati là-dedans, mais un Tati verbal. Un plan nous en donne d'ailleurs la preuve: un 'mur' d'immeuble moderne, où vit seul l'un des protagonistes, est en fait une structure de verre. L'espace de quelques secondes, Klapisch en nous montrant ce mur et les personnages que nous apercevons en transparence, nous renvoie directement à une scène de Playtime. Dans ce dernier film, au fond, l'essentiel était aussi de démontrer que si Hulot souhaitait ardemment retrouver et se rapprocher de la jeune Anglaise, et réciproquement, l'environnement moderne et froid ne faisait que les éloigner.
Ici, c'est plutôt l'environnement qui tente d'imposer un rapprochement aux membres du personnel, qui les éloigne les uns des autres car personne, au fond, ne veut faire le premier pas... Pourtant toutes les mini-intrigues auxquelles nous assistons montrent que les uns et les autres ne souhaitent qu'une seule chose: vivre heureux, et si possible ensemble. On y arriverait presque à la fin si...
...Si le "réalisme économique" des années 90 ne prenait le dessus; les Zactionnaires, en effet avaient tout prévu.
Salauds.