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25 février 2018 7 25 /02 /février /2018 17:54

Merci, un grand merci à Peter Ustinov. 

Car au départ, ce film ne se serait jamais fait comme on peut le voir aujourd'hui: une comédie policière ultra-light, dans laquelle le héros interprété par David Niven est un bandit international, un Arsène Lupin avec moins de morale et beaucoup de sex-appeal, spécialisé dans le vol de bijoux du grand monde. L'intrigue le voyait hésiter entre deux femmes, une femme mariée avec laquelle il avait combiné bien des coups, et une de ses victimes, une princesse d'un royaume lointain, dépositaire d'un diamant fameux entre tous...

De fait, l'intrigue n'est pas loin de ressembler à ça dans le film tel qu'il a été conçu. Sauf que...

Dans le concept original, la maîtresse du bandit était mariée à un inspecteur de la Sûreté Nationale, un imbécile inepte, mais qui restait un rôle secondaire. Et celui-ci était supposé être interprété par Peter Ustinov.

Donc quand Ustinov est parti du projet et que le tournage était sur le point de commencer, il a fallu que Blake Edwards trouve un remplaçant le plus vite possible... Enter Peter Sellers.

Et le film prend méthodiquement son temps, se comportant le plus souvent en comédie élégante et légère, avec champagne, parties, et ski à Cortina d'Empezzo en compagnie de la jet-set. Un film qui aurait tout pour être ennuyeux, si on ne sentait dès le départ une volonté délibérée d'en décaler le propos et de faire déraper inéluctablement, d'abord en douce avec l'intrusion du caractère distrait, incompétent, mais aussi sacrément loufoque de Jacques Clouseau. Le générique animé, avec sa Panthère Rose (Allusion au surnom du fameux diamant qui sert de fil rouge), sur la musique fabuleuse de Henry Mancini, puis un petit gag par-ci, un petit gag par là... Puis la situation change.

En effet, plus ça va, et plus l'inspecteur prend de la place, dépasse son destin de personnage secondaire dans le casting pour assumer le devant de la scène... Hum, "assumer" n'est peut-être pas le bon terme! Car Jacques Clouseau, s'il est sûr de sa supériorité (Mais pourquoi???), est bien le seul. Venu à Cortina d'Empezzo sur une intuition (qui d'ailleurs s'avère juste), l'inspecteur ne voit pas ce qui est devant ses yeux, à savoir que la maîtresse mystérieuse du "Fantôme" n'est autre que sa propre épouse interprétée par Capucine.

Et inexorablement, le film se reconstruit sous nos yeux, s'adapte à son nouveau personnage principal, en adopte aussi la loufoquerie fondamentale, le tout culminant dans une scène de bal masqué dans laquelle le surréalisme loufoque et souvent muet prend le pouvoir, contre toute attente! Un bal masqué qui se termine par une course poursuite hallucinante dans laquelle une Jeep conduite par un bouffon et un chevalier en armure (Clouseau sait toujours choisir un costume en toute occasion) poursuivent deux gorilles en voiture individuelle. Le tout sous les yeux éberlués d'un homme d'un certain âge, le genre qui pourrait vous dire qu'il a tout vu, jusqu'à ce jour-là, en tout cas.

Et tout s'éclaire: ce film a été piraté par son propre metteur en scène, qui s'ennuyait tellement sur le tournage qu'il en a détourné le propos en s'alliant avec un génie de l'improvisation loufoque, cantonné à un second rôle, et qui s'ennuyait probablement autant que lui. Edwards, libéré de ses chaînes, a eu en plus le culot d'en tirer un gros succès, et s'est enfin adonné à ce dont il rêvait: un film construit comme un court métrage de Laurel et Hardy: établir lentement, avec soin, une situation logique, patiemment, et... lâcher les lions et les fous. Ca a dû lui faire un bien fou, et le film est splendide, car il se bonifie à chaque vision. 

Et il est loin de ce que feront Sellers et Edwards du personnage, dans la série de films qui suivront: un appauvrissement, à coup de mécanique, de gags récurrents qui peuvent irriter, et d'un langage massacré qui est un procédé indigne. Tous les films réalisés  par Edwards avec Sellers (de son vivant, car il y a eu une sacrée faute de goût, un film posthume qui est tout bonnement indigne) ont bien sûr un petit je-ne-sais-quoi de sympathique, mais celui-ci est dans une classe à part, comme tous les films contemporains de Blake Edwards.

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Blake Edwards