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26 avril 2018 4 26 /04 /avril /2018 08:36

Le Canadien Paul Haggis interroge, mais il n'est pas là pour nous donner les réponses. Son premier film, le très controversé Crash (qui à la faveur d'un arrangement s'est trouvé affublé d'un encombrant et fort décrié Oscar du meilleur film), auscultait sous le prétexte du rapport obsessionnel de l'Angeleno moyen à ses véhicules, les rapports humains sous l'angle du racisme et de l'héroïsme quotidien. Parfois il faisait mouche en nous montrant toutes les nuances des rapports entre ethnies, et parfois, il se vautrait dans la facilité. Ce nouveau film est cette fois centré sur un personnage précis, qui a une quête; celle-ci, pour tout vous dire, n'était pas dans son plan de vie: Hank Deerfield, un ancien militaire retraité, qui a trouvé dans une petite entreprise une continuation maussade de sa longue vie de baroud, apprend que son fils Mike, qui aux dernières nouvelles était en Irak, serait revenu aux Etats-Unis depuis peu, et aurait disparu de sa base militaire. 

Il se rend donc sur place, et commence son enquête avec des certitudes sur ce qu'est un militaire, sur la moralité et la droiture de son fils, sur la raison d'être de l'armée... Il va être confronté au pire, et tous ses verrous vont sauter les uns après les autres. Mais surtout il va lui falloir faire son deuil car son fils qui a survécu à l'Irak, est mort des suites d'un règlement de comptes absolument crapuleux...

Hank est interprété par Tommy Lee Jones, ce qui est une excellente nouvelle: il est splendide. Chez lui, aucune tentation de rendre le personnage un peu plus séduisant lorsqu'il s'agit de montrer que ce Deerfield est effectivement un brave homme, mais surtout qu'il est irrémédiablement borné. Il incarne cet esprit, qu'en d'autres temps on a appelé "The silent majority", la majorité silencieuse qui s'interdisait de verser dans le moindre doute sur la validité des combats de l'Armée Américaine à l'étranger, par exemple. Et il n'est évidemment pas prêt pour le monde auquel il est confronté... 

Parmi les personnages qui gravitent autour de lui on s'attache essentiellement à Emily Sanders (Charlize Theron), inspectrice de police locale qui a du mal à s'intégrer dans l'équipe qui lui reproche d'avoir couché avec leur supérieur. Cette maman séparée à laquelle on refile tous les sales boulots va elle aussi changer sa manière de voir les choses. Haggis charge-t-il un peu trop la barque? Il a ajouté beaucoup de choses, autour d'Emily comme de Hank: des batailles sans fin entre la police locale et la base militaire, une réflexion certes bienvenue mais un peu lourde sur la loi du silence dans l'armée, et une affaire navrante qui va être un déclencheur por Emily: une visiteuse fréquente du poste de police est une jeune femme de militaire (Zoe Kazan) qui vient régulièrement se plaindre du traitement de son mari envers... son chien. Mais ce qu'Emily ne décode pas, ou trop tard, c'est que le jeune femme va mourir à la suite des coups de son époux.

Dans un film de facture classique, dont la mise en scène adopte le point de vue de ces deux humains en crise, Haggis nous livre au moins une interrogation salutaire sur les institutions, et sur la crise morale d'une civilisation entière en proie au chaos. Le recours à la Bible, aveugle et sans aucun recul, qui est caché derrière le titre (allusion à l'histoire de David et Goliath, à laquelle Hank croit dur comme fer) n'est que l'un des nombreux symptômes. Et la "paire" formée par le vieux dur à cuire et la jeune inspectrice est à mettre au crédit de ce film.

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Published by François Massarelli - dans Paul Haggis Zoe Kazan