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13 mai 2018 7 13 /05 /mai /2018 00:05

En 1994, Zemeckis  triomphé au-delà de toute espérance avec Forrest Gump: il aurait pu cesser toute activité, et se reposer jusqu'à la fin de ses jours sur ce film, un des rares des années 90 à avoir acquis et conservé le statut enviable de classique absolu et universel. Un film qui a révolutionné à sa façon le cinéma, tout en offrant une vision du passé, qu'on peut prendre ou laisser, mais qui est malgré tout une philosophie en soi, et qui parle, finalement, à la terre entière... Mais Zemeckis est un joueur, envers et contre tout, un artiste aussi; quand il s'exprime, il peur être cassant, voire désarmant parce qu'il donne l'impression de ne s'intéresser qu'à la technique. Mais ses films, ses séquences, ses plans mêmes parlent d'eux-mêmes...

Et Contact, le projet immédiatement suivant, nous montre le cinéaste se mettre en danger, car d'une certaine façon il tente d'y résoudre la quadrature du cercle: d'une part, il souhaite réaliser un film de science-fiction plausible, en utilisant la machine à mentir qu'est le cinéma (il vient de le prouver en faisant dialoguer Tom Hanks avec le président Kennedy!); d'autre part il entend confronter la foi en Dieu et la foi en la science au sein d'un film unique. Celui-ci est une adaptation d'un roman de Carl Sagan, qui a eu un énorme succès en 1985, d'ailleurs ravivé par le film. 

Ellie Arroway (Jodie Foster), une scientifique obsédée par l'idée de créer le contact avec les exta-terrestres, est récompensée le jour où elle reçoit enfin un message d'une intelligence inconnue. Avec l'aide de nombreuses personnes, elle va réussir à suivre les instructions des êtres mystérieux qui l'ont contactée, et tenter d'entrer en contact, à travers une mission qui connaîtra bien des péripéties... Mais en même temps, elle va entrer en conflit plus ou moins pacifique avec un supérieur, qui entend bien lui dérober la paternité de sa découverte (Tom Skerritt) et rafler les honneurs à sa place, un responsable ambitieux et sceptique de la défense (James Woods), plusieurs représentants de la foi Américaine, dont un sénateur de droite (Rob Lowe) qui parle au nom des fondamentalistes, un fou de Dieu (Jake Busey) tenté par le terrorisme, et surtout Palmer Joss (Matthew McConaughey), un jeune pasteur progressiste avec lequel elle a eu une aventure. Pour Ellie, la foi religieuse telle que Palmer la conçoit, qui croit en raison de convictions impossibles à étayer, est non-scientifique. Pour lui, la foi reste un élément indissociable de l'humanité. Les questions posées par le déroulement du film sont les suivantes: Ellie va-t-elle oui ou non rentrer en contact avec les aliens? Si oui, va-t-elle pouvoir retirer quelque chose au-delà de la satisfaction, de cette rencontre, qui lui permette d'avancer? Et enfin, va-t-elle se réconcilier avec Palmer, le convaincre ou être convaincue par lui?

En d'autres termes, Zemeckis choisira-t-il de céder aux sirènes du politiquement-et-religieusement correct en rangeant sa scientifique auprès des religieux, ou saura-t-il être un peu plus subtil?

Je ne répondrai pas, parce que la réponse fait le sel du film; ça, et bien d'autres choses: la façon dont Zemeckis inclut son film réaliste dans la fiction des images de synthèse, à moins que ce ne soit le contraire. Il y aura de la sale manie, dans les films d'animation des années 2000 (Beowulf en tête) où le cinéaste s'abîmera, mais la maîtrise qu'il garde sur son film de science-fiction est impressionnante. Il est d'ailleurs intimement lié à Forrest Gump: derrière Ellie Arroway, petit bout de bonne femme qui court contre l'univers entier, Zemeckis donne du sens à l'existence en honorant à la fois la part de conquête et de recherche du savoir inscrite en l'homme, et sa part d'absolu. Bref, il réussit à trouver une manière respectueuse de chacun d'allier la science et la foi, ou plutôt de les faire cohabiter. Sans jamais prendre parti, mais en épousant la part de merveilleux contenue dans la recherche spatiale, et en créant à partir de là un majestueux album d'images qui s'émerveillent d'un rien, et en faisant évoluer ses personnages dans des décors fabuleux (et souvent réels), Zemeckis crée un film d'aventures et de science-fiction à la fois concret et inépuisable: un film qui garde pour lui ses clés, laissant le spectateur se faire son idée. C'est aussi une montagne russe d'émotions, servi sur un plateau à une actrice de génie: bref, c'est un chef d'oeuvre. ...Auquel il faut accéder sans cynisme.

 

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Published by François Massarelli - dans Science-fiction Robert Zemeckis