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26 juin 2018 2 26 /06 /juin /2018 16:51

Commençons par deux évidences: d'une part, ce film de 1932, le dernier des musicals Paramount réalisés par Lubitsch, est un remake de The marriage circle, qui transpose l'adaptation d'une pièce de Lothar Schmidt dans l'esprit d'une opérette; d'autre part, The marriage circle est un chef d'oeuvre dont le remake ne s'imposait pas. Mais une nouvelle "opérette" de Lubitsch avec Maurice Chevalier et Jeanette McDonald? Et en prime un auto-remake d'un de ses propres films par le grand Lubitsch? On ne va certainement pas faire la fine bouche...

Le docteur Bertier (Maurice Chevalier) et Madame (Jeanette McDonald) s'aiment: la preuve, les policiers de Paris les surprennent dans les bras l'un de l'autre dans un parc de la capitale, enlacés dans une embrassade gourmande et nocturne... Tellement occupés qu'on ne les croit absolument pas mariés. Mais ce mariage idyllique va être soumis à rude épreuve: la meilleure amie de Colette, Mitzi Olivier (Geneviève Tobin), véritable croqueuse d'hommes certifiée, vient en effet de déménager de Lausanne avec le professeur son mari (Roland Young), et si elle se réjouit de retrouver son amie Colette, elle va rencontrer le docteur Bertier avec le plus grand intérêt... Ce que ce dernier va d'ailleurs sentir passer, mais pas forcément à son corps défendant.

Le prologue installe le style du film avec autorité: un mélange permanent entre comédie parlante, scènes chantées, et musique accompagnée de récitatifs rimés, qui permettent à tout un chacun de participer à la comédie musicale, sans pour autant prendre le risque du ridicule, et aux chanteurs chevronnés d'intégrer la musique à la mise en scène, de façon fluide. Bref, c'est le style établi par Lubitsch depuis Love Parade en 1929. Et le ton est résolument égrillard, c'est le moins qu'on puisse dire. D'une certaine façon, One hour with you complète ou plutôt prolonge The marriage circle, avec un certain nombre de scènes qui permettent à Lubitsch d'aller un peu plus loin dans l'audace. Deux scènes, l'une est célèbre, montrent bien cet aspect du film: lorsque Adolph (Charlie Ruggles), le soupirant éternel de Colette lui téléphone pour annoncer sa venue à la soirée qu'elle organise, déguisé en Roméo, il a la surprise d'entendre son amie lui dire que ce n'est pas un bal costumé... Reprochant à son domestique de l'avoir induit en erreur, il s'entend rétorquer par celui-ci qu'il avait envie de le voir en collants... L'autre scène "nouvelle" est celle où, durant la soirée, Bertier et Mitzi se retrouvent seuls à l'extérieur, avec une métaphore insistante représentée par un petit jeu autour du noeud papillon: Bertier ne sait pas le nouer, et Mitzi passe son temps à le lui défaire, ce qui les oblige à passer du temps, intimement enlacés, Mitzi concentrant son attention sur la nécessaire satisfaction de Bertier...

Mais le film a changé le ton de l'histoire originale, aussi, pour des raisons semble-t-il personnelles: Lubitsch, qui devait être seulement le superviseur de la production, a changé en cours de route de fonction, remplaçant au pied levé George Cukor (qui le lui reprochera toute sa vie), afin de relever un peu la sauce, parce qu'il trouvait les premiers efforts de Cukor insuffisants (Et accessoirement parce que Chevalier ne le supportait pas). Et Lubitsch, justement, sortait d'un divorce particulièrement compliqué... Donc le metteur en scène a tout fait pour teinter ses marivaudages, finalement assez flous dans le film muet de 1924 (A-t-il, ou n'a-t-il pas?) de réalisme. Ici, bien qu'il s'en défende, tout concourt à nous faire penser que le Docteur Bertier a bien été infidèle... Et l'image du couple idyllique du début (et du premier film) en prend, quand même, un sacré coup...

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Pre-code Ernst Lubitsch Musical Criterion