Dans une petite ville minière, sur la Frontière, une troupe de bandits est particulièrement bien renseignée sur les transports d'or; la compagnie qui soupçonne qu'une infiltration des bureaux a bien eu lieu, dépêche sur les lieux John Murdock, leur principal détective (Murdock McQuarrie). Celui-ci ne tarde pas à soupçonner l'ambigu Frank Lawler (Lon Chaney). Le public, lui, le sait depuis le début du film...
C'est jusqu'à preuve du contraire le plus ancien film de Chaney qui ait été conservé. Réalisé pour la compagnie Nestor, qui faisait partie de Universal, il est assez typique des productions de l'époque: nerveux, au montage efficace, et interprété avec énergie par des acteurs qui savent qu'ils n'ont qu'une bobine pour convaincre... En parlant de bobine, bien sûr, le principal atout du film est son méchant, qui montre ici ses deux facettes les plus évidentes: d'une part une qualité physique particulière, un visage à la fois malléable et passe-partout, qui le distingue et l'éloignera longtemps des rôles de jeune premier (quoique Murdock McQuarrie est loin d'un John Gilbert ou d'un Wallace Reid!), de l'autre un jeu au timing impeccable dans lequel chaque partie de son corps peut être décisive.
Un exemple: comme le héros, même en 11 minutes, a droit à un début de romance avec une employée du bureau de la mine (interprétée par Agnes Vernon), il fallait que Chaney puisse aussi être une menace pour elle. Dans une scène qui est typique de son art, l'acteur n'a besoin que d'un geste de la main, précis, visible, mais vite réprimé, pour exprimer son désir pour elle, et installer une évidence dans l'esprit du spectateur: il va y avoir du grabuge... Et dans une scène dont il n'aurait pas dû être le centre, Chaney vole la vedette: ça va devenir une habitude...
Malgré tout, une fois l'intrigue achevée, c'est hors champ que le bandit, démasqué, sera abattu: puis, alors que la caméra ne bouge toujours pas, sa dépouille, portée par les habitants de la ville, est ramenée dans le champ: la plus ancienne mort conservée de Lon Chaney au cinéma n'est pas la plus confortable...