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20 décembre 2018 4 20 /12 /décembre /2018 18:25

Annie Rooney, c'est une petite ado pétillante, qui habite un quartier populaire de New York en compagnie de son papa; Tim Rooney senior est un policier respecté de son quartier, qui vit en très bon voisinage avec les parents des copains de sa fille: ils s'appellent touts de noms assez exotiques, et certains sont Irlandais, d'autres Grecs, d'autres Chinois, d'autres Italiens, ou encore Juifs. Tous cohabitent, sans aucun problème, une vie doucereuse finalement et sans enjeu, me direz-vous? Sauf que non: si les plus jeunes cohabitent comme le font leurs parents, et tout en se flanquant des roustes collectives et monumentales, se préparent surtout à vivre une vie d'adultes sans histoires, les jeunes adultes eux louchent plutôt du côté de l'illégalité. C'est de là que viendront les troubles: un de ces voyous, un soir, va tuer un homme, et le problème c'est que la victime sera justement le père de la petite Annie...

Une claque! Une vraie claque! C'est pourtant un film dont l'existence est due essentiellement à la nécessité pour Mary Pickford, qui cumule les postes de productrice, actrice et scénariste, de retrouver le succès après les échecs de deux films consécutifs dans lesquels elle était une adulte. Une seule solution pour celle qui en avait assez de porter des boucles de gamine: retourner à ce qui avait fait son succès, et assurer le spectacle. Donc un film bien dans la formule... Ce n'était pas bien parti, et la seule façon d'ajouter de l'intérêt à ce qui aurait pu devenir un abominable pensum, était de trouver une histoire, des personnages et un lieu emblématique. D'où l'idée superbe de placer la caméra dans un merveilleux quartier populaire et multi-ethnique reconstruit en studio, et plus vrai que les vrais: dès les premières minutes, qui voient un affrontement homérique entre les gamins de la bande d'Annie et ceux de leurs ennemis jurés (à coups de briques fatales!), le film nous capte par le rire, la tendresse et le sourire... mais ça ne durera pas: je parle de cette atmosphère de comédie, qui cesse après une heure environ.

Le film est formidablement construit, superbement filmé (Charles Rosher est aux commandes de l'image et de la lumière et il se fait plaisir de bout en voit) et pour tourner ce retour aux affaires, Mary Pickford a choisi un vétéran du cinéma, le très expérimenté mais quasi inconnu William Beaudine, un choix motivé par le fait qu'il fallait pour obtenir du naturel de la part de son casting juvénile (des vraies numéros d'acteurs sont ici réservés aux enfants), et Beaudine qui avait dirigé plusieurs films de comédie avec des enfants, était en effet le candidat idéal! Il tire de ses jeunes interprètes un jeu naturel, énergique, mais aussi profondément subtil. Il fait en particulier voir de quelle manière Spec O'Donnell interprète Abie Levy, le petit voisin Juif de la petite Annie. La complicité qui les unit est prétexte à de nombreuses scènes qui demandaient un acteur confirmé: il est excellent (et rejouera souvent en grandissant, un rôle similaire aux côtés de Max Davidson). 

Car c'est l'un des atouts du film: la façon dont sont dépeints les rapports entre tous ces enfants d'origine différente, qui parlent parfois des langues différentes, s'envoient des briques pour un rien, mais sont tous prêts à se mettre en quatre les uns pour les autres. Un melting-pot de fait, que les adultes prennent souvent en exemple, et qui a en plus le mérite de souvent nous faire rire. Mais pas que: la façon dont Beaudine et Pickford traitent l'annonce de la mort du père Rooney est un moment de bravoure pour l'actrice, et un modèle d'utilisation de toutes les ressources à sa disposition pour Beaudine: montage, point de vue, champ-contrechamp, et le péché mignon de Miss Picford: les accessoires. Elle réussit ici à nous tirer des larmes avec son utilisation des bougies d'un gâteau. C'est donc sans aucun étonnement que nous retrouverons Beaudine aux commandes l'année suivante du prochain film de la star, Sparrows, dont on peut sobrement dire qu'il n'est pas mal non plus!

J'ai failli oublier: en plus, dans ce film, le jeune voyou fort sympathique qui fait rêver l'héroïne n'est autre qu'un jeune William Haines dans l'un de ses premiers rôles... Il est absolument irrésistible.

 

 

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Published by François Massarelli - dans 1925 Mary Pickford Muet **