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  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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5 décembre 2018 3 05 /12 /décembre /2018 14:33

Nommé totalement indifféremment The Red Kimona ou The Red Kimono, ce film est l'une des croisades entreprises par Mrs Wallace Reid, de son état-civil Dorothy Davenport, à la mort de son mari. Pour mémoire, celui-ci est décédé suite à une descente dans l'enfer de l'addiction à la morphine, dans laquelle l'avait poussé une blessure; ses besoins en drogue étaient tels qu'il avait commencé à commettre des délits pour se payer une dose quotidienne... Le premier film qu'avait supervisé son épouse, après son décès, était le célèbre film perdu Human Wreckage qui traitait justement de la présence dans le quotidien de gens très ordinaires, de drogues qu'on n'appelait pas encore dures (Morphine, cocaïne, héroïne) et qu'on pouvait encore se procurer, pour certaines, par ordonnance... 

Ce film est par contre entièrement consacré à la prostitution; comme dans Human Wreckage, l'histoire est située plutôt dans une certaine version du quotidien: nous suivons un itinéraire, celui de Gabrielle, une jeune femme qui a tué l'homme qu'elle aimait, parce qu'il l'avait poussée vers la prostitution, avant de partir avec la caisse, et de trouver une femme à épouser à Los Angeles... Pendant son procès, nous assistons à une flash-back qui explique le cheminement de Gabrielle, puis après son acquittement, elle est prise en charge par une femme aisée, attirée par les cas de société dans la mesure où ils peuvent satisfaire son penchant pour la lumière des projecteurs...

C'est un vaste sujet, qui est abordé ici de multiples façons; tout en restant un mélo édifiant, ce que le film ne cherche du reste pas à cacher, c'est malgré tout intéressant de voir la façon dont l'histoire est traitée: le choix, par exemple, de partir du milieu de l'histoire (qui aurait pu être la fin dans d'autres films), à savoir le meurtre opéré par l'héroïne, permet en retour de donner à l'autre "crime" de Gabrielle, le fait qu'elle se soit adonnée à la prostitution, une tournure bien différente. Et la suite du meurtre, à savoir le procès, l'acquittement, et la volonté de rédemption, est montrée sans aucun angélisme. C'est difficile de reprendre pied, le film est clair. Pour Gabrielle, qui était une victime de l'homme qu'elle aimait, le risque est de redevenir une victime, celle du penchant morbide d'une société entière pour le sensationnalisme. Une scène illustre en effet cette situation: devenue presque une bête de foire pour la bonne société, elle doit répondre aux questions humiliantes de bourgeoises qui veulent connaître les détails les plus croustillants de son calvaire...

La direction, créditée au seul Walter Lang, est d'une grande délicatesse, et il obtient de ses acteurs (parmi lesquels Priscilla Bonner, Carl Miller qui rejoue son rôle de The Kid en plus explicite, ou encore George Siegmann) un jeu très naturel qui fait merveille. Le style est à la fois d'un réalisme très factuel, et d'une grande beauté formelle: on n'est pas près d'oublier ce plan qui nous montre Priscilla Bonner devant son miroir, le quel lui renvoie l'image d'une femme vêtue d'un kimono rouge, le vêtement étant teinté sur la pellicule... Ces 76 minutes consacrées au chemin de croix d'une femme des années 20, sont sinon un chef d'oeuvre, en tout cas un passage obligé de cette merveilleuse période du cinéma Américain, et sous celle qui avait adopté le pseudonyme de Mrs Wallace Reid, allait sous son vrai nom enchaîner une courte carrière de réalisatrice dès l'année suivante. En attendant, elle se présente à nous au début et à la fin du film, et nous adresse directement la parole (via des intertitres) en nous regardant dans les yeux...

 

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Published by François Massarelli - dans 1925 Muet **