Le film qui a révélé Brad Bird, metteur en scène multi-récompensé de The Incredibles (ainsi que de son excellente suite récente), de Ratatouille, de MI4 et de Tomorrowland, est un film d'animation, réalisé pour la Warner à l'époque où celle-ci cherchait à rivaliser (un peu) avec Disney: sans grande surprise, compte tenu de la qualité parfois douteuse des films qu'ils ont sorti sous cette bannière maintenant défunte, le long métrage réalisé et écrit par le futur petit génie de Pixar est le meilleur film d'animation de long métrage jamais sorti par WB, tout simplement, tout en étant particulièrement personnel et singulier...
On parle ici d'animation à l'ancienne, donc majoritairement en 2D, même si Bird se laisse volontiers aller à utiliser avec une grande efficacité les effets 3D. L'intrigue, adaptée d'un roman de 1968 (The Iron Man) de Ted Hughes, est transposée de la Grande-Bretagne vers la côte Est des Etats-Unis, le Mine plus précisément (déjà un endroit bien connu pour ses attaques de Carcarodon Carcarias, si je ne m'abuse...). Hogarth Hughes est un petit garçon, fils unique élevé par sa maman veuve d'un pilote de chasse décédé, qui a tout du gamin des années 50: fan de films de science-fiction, peu intéressé par l'école, mais surtout désireux d'avoir un peu de compagnie. Il va en trouver lorsqu'un robot géant venu d'une autre planète va se poser à cinquante mètres de chez lui, et devenir son copain. Sauf qu'à cette époque, l'arrivée d'un engin comme celui-ci, non seulement aura du mal à être discrète, mais à l'heure où Spoutnik tourne autour de la terre pour narguer les Américains, les paranoïas vont s'échauffer...
Le style d'animation est d'une grande efficacité, avec un graphisme qui est à la fois l'héritier des Disney des années 60 et 70, et bien sûr des oeuvres de Chuck Jones, et c'est d'autant plus réussi que Bird a choisi de traiter son film comme une histoire avec des acteurs, et obtient de ses créatures aimées la même intensité émotionnelles, sans jamais mobiliser comme le font les plus embarrassants longs métrages de Disney les clichés les plus éculés! Et sa fable, qui traite non seulement avec tendresse d'un garçon à part, et de son amitié avec un tas de ferraille gigantesque qui est profondément attachant, se pare de couleurs particulières pour interroger la part d'ombre de l'humanité, dans son versant Américain. Il le fait néanmoins en ne diabolisant pas systématiquement les militaires, puisqu'il a choisi un agent spécial obsédé par l'ingérence étrangère pour incarner le mal dans son film.
Et il touche aussi des thèmes plus profonds, et qu'on retrouvera au long de son oeuvre cinématographique: la notion de choix de son destin par un protagoniste, est ici la principale leçon de Hogarth à son ami le Géant, quand il lui fait comprendre que ce n'est pas parce qu'il a été construit comme une arme destructrice qu'il doit nécessairement se laisser aller à le devenir... Un thème qu'on peut aussi, sans aucun doute, lire à double sens, là encore en le considérant comme un commentaire sur les USA des années 50, et ce qui en a suivi. Mais il a surtout fait un film, avec talent, justesse, tendresse et humour: ce Géant de fer est un pur chef d'oeuvre, comme les deux films qui suivront...