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18 juillet 2020 6 18 /07 /juillet /2020 10:29

Un jour du printemps 1917, deux soldats Anglais (George McKay, Dean-Charles Chapman) stationnés au front reçoivent une mission dangereuse: les Allemands se sont retirés, et une offensive Britannique se prépare. L'état-major a reçu la confirmation que c'est un piège et toutes les troupes qui sont prévues pour l'attaque vont se faire massacrer... Les communications étant coupées, il faut que les deux hommes aillent eux-mêmes porter le message... 

Dès le départ, on a une méfiance inévitable: le choix de Mendes a été de traiter le film en faux plan-séquence, sur l'intégralité de ses presque deux heures. Depuis Hitchcock et Rope (1948) on se méfie de ce genre de petit caprice qui favorise la frime... Mais c'est réussi, une fois entré dans le dispositif, le spectateur a droit à quelques zones de respiration. Comment s'étonner, malgré tout, que le film soit une démonstration impressionnante de virtuosité?

Mais pas seulement: d'une part, on s'attache à ces deux soldats, puis un, qui découvrent la réalité du No man's land, cette zone dangereuse entre les deux camps, et arrivent dans une tranchée Allemande vidée de ses habitants, sauf les rats, et qui recèle quelques pièges... Puis on les suit dans leur aventure dans une campagne Française dévastée. L'intelligence du film est de nous faire attendre une hypothétique confrontation, mais elle tarde à venir et quand elle sera là on la prendra en pleine figure! Et Mendes a superbement capté le visage de la guerre sans la guerre, ces moments d'attente, de calme, qui recèlent finalement autant de possibilités que les moments de bataille.

Le metteur en scène enrichit avec son film la notion de point de vue, qui est essentielle au film puisque c'est une avancée dans l'inconnu, bulle en tête, la caméra à la remorque de ces deux jeunes hommes, qui nous est proposée. Le film est inspiré des récits que grand-père Mendes faisait à ses petits-enfants quand le metteur en scène était jeune, et une fois de plus, le cinéma a pu résoudre un paradoxe: cette première guerre mondiale, conflit titanesque, est de plus en plus clair dans l'objectif des cinéastes, au fur et à mesure qu'elle s'éloigne dans le passé.

Certes, il y a du flou dans cette improbable histoire de fausse retraite des "Boches", et on n'est en aucun cas devant un exposé historique de faits d'arme, mais ce n'est pas le sujet. Le sujet, comme dans Un long dimanche de fiançailles, Paths of glory, Sergent York ou The big parade chacun à leur façon, c'est le soldat, sa vie, sa survie, sa peur et ses éventuelles réussites, qu'il s'agisse d'une action d'éclat ou d'esquiver une balle, d'où qu'elle vienne. A l'heure où tous les poilus nous ont quitté, ce film est un nouvel appel, vibrant, au devoir de mémoire, et nous propose à nouveau une vision profondément humaine de la sale guerre.

 

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Published by François Massarelli - dans Sam Mendes Première guerre mondiale