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30 mai 2021 7 30 /05 /mai /2021 11:32

Les Souvenirs d'enfance de marcel Pagnol sont totalement à part dans son oeuvre, et sont non seulement un succès significatif d'édition sans précédent, ils sont passés totalement dans l'inconscient collectif. Il est souvent mentionné à quel point l'auteur de ces Souvenirs a su transcrire en mots et rendre visuelle la mémoire de son enfance, ou du moins de ce qu'il en retenait... Yves robert de son côté, a toujours voulu être celui qui les adapterait, au point de maintenir des années durant une correspondance acharnée avec la famille Pagnol! Et quand on voit les deux films, on comprend pourquoi: il s'est totalement approprié ces souvenirs, au point d'en faire, probablement, une réflexion personnelle et tendre sur l'enfance et le bonheur: oui, mais vus par... Yves Robert.

Deux films certes, mais un projet: les deux oeuvres ont d'ailleurs fait l'objet d'un tournage, et sont sorties à quelques jours de distance... On peut, je pense, voir le premier seul, mais pas le deuxième: Le Château de ma mère est totalement fondé sur la familiarité avec La Gloire de mon père... Je pense qu'il ne tiendrait pas debout sans visionner la première partie

Le premier film raconte donc le rapport très particulier de Marcel à ses parents, un père idolâtré et une mère couvée de toute l'inquiétude d'un enfant de 9 ans qui a conscience de sa fragilité. Le petit frère (Paul) et la petite soeur (d'ailleurs c'est son identité, sur presque toute la durée elle n'est que "la petite soeur") sont accessoires, l'intérêt ici étant le rapport du garçon à ses parents et celui du conteur à son auditoire. C'est la base d'un choix: Jean-Pierre Darras prête sa voix au Marcel devenu adulte; une démarche humble d'Yves Robert, généralement satisfaisante, parfois frustrante, quand le commentaire devient redondant ou précède l'image: on est devant un film sacré nom! Mais Yves Robert a livré une adaptation visuellement constamment soignée et enchanteresse: je suis surpris de voir à quel point j'ai eu l'impression d'avoir déjà vu les films. Ce n'était pourtant pas le cas, mais c'est exactement comme ça que je voyais les livres à leur lecture... Avec évidement une préférence pour le premier, tant le deuxième s'embourbe un peu dans cette histoire de passage en douce le long d'un canal...

Les choix d'adaptateur de Robert ont été essentiellement d'aller vers l'épure et la narration fluide, et il a choisi évidemment des acteurs qui se sont totalement soumis au projet. Il n'y a aucune erreur de casting ici, et même les enfants réussissent à obtenir ce que tant d'acteurs chevronnés (j'ai des noms) dans ce pays n'ont jamais été foutus d'atteindre: le naturel, l'évidence... C'est que les paysages à tomber par terre des hauteurs du pays Marseillais, l'impressionnant Garlaban des livres, où ont été tournés ces deux films, les cigales du mois d'aout, les collines et leur soleil insolent, ont fait leur effet magique: c'est très communicatif et c'est du pur plaisir. Des bruits, des sensations et des odeurs qui font furieusement référence aux vacances d'avant... Un souvenir enfantin? Non, pourtant...

Les deux livres sont vraiment l'oeuvre d'un adulte, et on a beau penser qu'il s'agit ici d'attraper et de représenter le bonheur, ce qui ressortira de ces trois heures et quelques de cinéma, c'est à quel point le bonheur est fugace, et laisse autant de souvenirs magnifiques que de regrets. Pagnol, qui n'envisageait sans doute pas d'apposer des suites à ces deux livres, a fait de ces deux récits des évocations de ce qui passe et s'en va, de ceux qu'on a aimés le temps qu'ils soient là, et qui sont partis. Deux expériences qui tranchent sur la superficialité embarrassée de toute son oeuvre (et qu'on ne me parle surtout pas du "cinéaste" Pagnol) par la richesse de cette évocation des petits riens de l'enfance, et bien sûr de l'absence qui se devine en creux, de par l'imposante présence dans ces souvenirs de la frêle Augustine et du magnifique Lili, l'ami et mentor des collines. La leçon est cruelle: devenir adulte, c'est se rendre compte que tout ce qu'on a aimé est arrivé à la fin. Et les films, sous couvert de nous faire plaisir, nous le démontrent fort joliment.

 

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Published by François Massarelli - dans Yves Robert