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10 octobre 2021 7 10 /10 /octobre /2021 09:24

Eugénie Cléry (Lou De Lâage) est une jeune femme très comme il faut, qui appartient à la bonne société... Du moins en surface, car elle souhaite, en cette fin de XIXe siècle, affirmer son indépendance et exister au-delà du rôle promis d'épouse et de mère. Bref, elle veut vivre et pas qu'en rêve. Mais elle a un souci: elle communique avec les esprits... Elle s'en ouvre auprès de deux personnes, son frère et sa grand-mère, qui elle a une preuve que c'est vrai puisque Eugénie a retrouvé un bijou perdu depuis des décennies grâce aux indications de son grand-père défunt...

Ce qui explique qu'aux yeux de l'intransigeant père de la jeune femme, cette dernière soit folle. Elle va donc, sous la responsabilité de son frère qui 'en mord les doigts, intégrer l'hôpital de La Salpétrière et rejoindre les dizaines de femmes, folles, "hystériques", dépressives ou simplement gênantes (l'une d'entre elles à tué son mari en le poussant dans la Seine, mais elle ne me paraît pas pus folle que vous et moi) qui y végèteront sans doute jusqu'à la fin de leurs vies...

Arrière-plan historique 

Le film, adapté d'un roman de Victoria Mas publié en 2019, possède une part importante de vérité, cachée derrière le prétexte semi-fantastique: Mélanie Laurent n'a pas voulu en faire trop au niveau de ce prétexte étonnant, et on n'aura pas ici une débauche d'effets spéciaux. C'est du reste la partie la moins intéressante du film, au contraire de la reconstitution du Paris de 1885: le film commence au moment où Eugénie se rend aux funérailles de Victor Hugo, sans sa famille bien sûr, et nous montre la jeune femme essayant de vivre en se rendant à Montmartre, par exemple; les scènes de rue sont intelligemment suggérées plus que montrées, tout ici est affaire de cadrage, de dosage et de costumes. Et à l'exception d'une chanson d'Arno chantée par une patiente de l'hôpital, la langue est bien celle de la fin du XIXe... Une figure historique prendra beaucoup de place dans le film, celle de Jean-Martin Charcot (Grégoire Bonnet), chef de service et éminent spécialiste de l'hystérie. Il est surtout utilisé pour montrer à quel point la domination masculine prend ici toute la place: ses leçons, assénées froidement et utilisant évidemment les patientes comme matière première, donnent l'impression d'une absence totale de compassion, et tout est affaire de point de vue, mais j'y reviendrai plus bas...

Le "bal des Folles" qui figure donc dans le titre du film est une occasion annuelle de rencontre entre le monde de l'extérieur et celui de l'hôpital. Sans vraie implication de Charcot lui-même dans le film, c'est une plongée dans un univers malsain où les médecins et infirmières semblent plutôt livrer les malades à l'amusement des bourgeois, on bascule dans un univers à la Bunuel, voire à la Browning... Comme si souvent dans les films qui s'intéressent à la vive d'une institution psychiatrique, c'est une de ces moments qui nécessite du baroque tous azimuts... Néanmoins, Mélanie Laurent a ici une mission, et son script doit faire feu de tout bois, ce gigantesque foutoir reste donc presque uniquement un arrière-plan... A part pour une scène de viol.

Mais c'est justement parce qu'après un prologue qui nous attache justement à la jeune femme dont ceci est l'histoire, le  point de vue se démultiplie, au risque pour le spectateur de perdre le fil: chaque protagoniste devient susceptible de nous faire partager son expérience, et en particulier, Geneviève, une infirmière froide qui va devenir une alliée d'Eugénie après avoir constaté qu'elle n'est pas folle. Le film tend à glisser un peu facilement vers l'efficacité satisfaisante d'une production Américaine et perd de son charme, en nous livrant un cahier des charges bien trop satisfaisant pour être totalement honnête. Par contre, l'interprétation globale, les scènes situées à l'hôpital, le traitement de seconde zone accordé à une des deux composantes de l'humanité de l'époque, tout cela ne manque pas de qualités...

 

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Published by François Massarelli - dans Mélanie Laurent