Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
29 novembre 2021 1 29 /11 /novembre /2021 21:09

Dans The We and the I sorti trois années plus tôt, Gondry avait imaginé une étrange conversation entre deux adolescents qui s'ignoraient quelques minutes auparavant: ils se trouvaient tout à coup un terrain de partage en évoquant un parent bricoleur dans l'atelier duquel ils aimaient à se retrouver: de toute évidence, un souvenir tenace chez Gondry, même si dans ce film la situation finissait par dégénérer entre eux! Microbe et Gasoil, tourné en France, dans la région natale du metteur en scène, part de ce souvenir lui aussi...

Durant l'année scolaire, le petit Daniel, 14 ans, est surnommé microbe par les autres, en raison de sa petite taille. Entre ça et sa longue chevelure qui lui vaut de se faire confondre avec une fille (y compris par ses professeurs), il s'en prend plein la figure, et Laura l'élue de son coeur, bien que son jeu soit équivoque, ne l'épargne pas non plus! Un nouveau venu, Théo, va capter son attention, ainsi que celle de tout le collège: mais eux, c'est pour le rejeter... Pas Daniel, qui est fasciné par l'originalité et la culture de son ami (que tout le monde surnomme Gasoil en raison de l'odeur de carburant qu'il semble avoir parfois adopté comme parfum!). Ils deviennent inséparables, parlent de tout et de rien, et se lancent dans des bricolages inattendus: à partir d'un moteur, ils inventent une maison roulante avec laquelle ils décident de prendre la route, vers l'Aubrac (où Théo a un souvenir de colo avec des monitrices, je cite, à gros nichons) ou vers le Morvan (où Daniel sait que Laura est partie en vacances)... Ce sera un périple farfelu, inoubliable...

C'est merveilleux: un film mené par deux jeunes acteurs débutants, sous l'oeil attentif d'un metteur en scène totalement habité par son sujet, hautement personnel, et qui est parfois clairement, une fois de plus, hanté par le fantôme de Jean Vigo; comme chez le cinéaste de L'Atalante, il n'y a pas vraiment de méchants chez Gondry, juste des adultes trop occupés par leurs problèmes pour vraiment accompagner leurs enfants dans la vie: les parents de Théo, par exemple, sont conscients de la fragilité de la santé de la mère et n'ont que des reproches à adresser à leur fils; la mère de Daniel (Audrey Tautou) est une allumée religieuse, membre farfelue d'une secte de timbrés où elle aimerait tant enrôler son fils... 

Comme tant d'autres le film enfile les anecdotes comme d'autres les perles, mais sans jamais perdre le fil de ce qui reste le sujet profond: la façon dont une amitié, une fugue et un été vont à eux tout seuls résumer une enfance enfin devenue, pour quelques semaines, glorieuse! Et le ton adopté, mi-comique, mi-grave, sied parfaitement à cette équipée sauvage un rien burlesque: après tout, le véhicule parfaitement fonctionnel de Théo et Daniel est une voiture-maison, qui dès qu'un véhicule de police s'aventure sur la route, devient une cabane de jardin! Et Gondry, qu'on n'a jamais connu si raisonnable, abandonne son art du bricolage personnel pour se concentrer sur ses personnages et son dialogue aussi: Daniel et Théo, joués respectivement par les deux jeunes acteurs Ange Dargent et Théophile Baquet, nous rappelleront forcément la jeune troupe de la Guerre des Boutons d'Yves Robert, en se lançant parfois de fabuleuses répliques, que je vous laisse découvrir. Tout comme je vous laisse découvrir une course-poursuite entre les deux héros, au volant d'un sommier à moteur, suivi de près par une horde de footballeurs américains d'origine coréenne. Ca, je ne l'avais jamais vu...

 

Partager cet article
Repost0
Published by François Massarelli - dans Michel Gondry