C'est l'été, et c'est le dernier jour de lycée dans le Bronx: les lycéens prennent donc le bus pour rentrer chez eux, et... il s'en passe, des choses, dans le bus!
C'est un film effectivement tourné dans un vrai bus, dans le vrai New York, avec des vrais lycéens, qui ont participé à l'établissement d'un scénario basé sur l'idée initiale de Gondry: utiliser l'unit de temps et de lieu pour révéler les caractères, selon la règle suivante: dans un bus, les hordes de jeunes ne se comporteront absolument pas de la même manière selon le fait qu'ils seront plusieurs, ou isolés... Et en vidant peu à peu son bus de ses occupants, certains par réaction contre les autres, certains littéralement exclus, d'autres tout simplement rendus chez eux, le cinéaste permet à l'humanité de surnager de plus en plus au milieu d'un ensemble d'anecdotes, de comportements, de gags et de digressions. Certains plans sont tournés depuis l'extérieur du bus, mais l'essentiel des décrochages sont soit des délires (un gamin qui tente de séduire en se présentant comme u génie de la jet-set, une digression qui fait intervenir un faux Donald Trump), soit des souvenirs recréés à la Gondry bricolo (carton-pâte, accélération, accessoires détournés), voire des mensonges élaborés...
Le film est divisé en trois parties: The Bullies, qui est ancré sur la présence de trois petits cons, particulièrement portés sur l'humiliation agressive de leurs congénères; l'un d'entre eux a des problèmes sentimentaux et les dissimule derrière une attitude de provocateur sans scrupules. The Chaos, qui part d'une partie d'action ou vérité qui dégénère pour montrer l'ensemble du bus partir en vrille, une sorte de conversation à 60... Enfin, The I recentre sur quelques individualités. Et comme on est chez Gondry, de ce chaos parfaitement contrôlé et parfaitement rendu, naîtra non seulement de la confusion, mais aussi et surtout une certaine intimité entre deux personnages soudain confrontés à la vérité d'un drame, ce qui en fait une phénoménale rupture de ton, après le déferlement de situation scabreuses, d'agressions, de gros mots, une agression raciste commise par une septuagénaire, des anecdotes sexuelles auto-glorifiées, etc...
Mis en scène par un éternel réalisateur de douze ans, avec des techniciens et des acteurs débutants (tous affiliés à une association d'entr'aide du Bronx qui leur permet de s'initier au théâtre) mais saisissants de vérité, ce film est à raccrocher au cinéma de Vigo: mal poli, poétique, vrai et turbulent, mais surtout magnifique.