Dave Hirsch (Frank Sinatra), écrivain mais raté, beau gosse mais vaguement alcoolique, quitte l'armée et se retrouve dans un bus... endormi, il est réveillé au moment où il débarque chez lui, dans la petite (tout petite) ville de l'Indiana, où il a grandi, et où il n'avait vraiment pas prévu de revenir. Et la soirée précédente a dû être endiablée, puisqu'il se retrouve flanqué d'une ravissante mais très encombrante jeune femme: Ginnie (Shirley McLaine) l'a suivi sur un coup de tête, on se demande bien ce qu'il lui avait promis...
Installé bien malgré lui, il reprend contact avec son frère, le très raisonnable joaillier Frank (Edward Kennedy); celui-ci lui présente une jeune femme, Gwen French (Martha Hyer), avec l'intention que David soit séduit par la rigueur de la jeune femme, mais il semble plus séduit par une rencontre avec un joueur local, Bama Dillert (Dean Martin). Entre les parties endiablées de poker avec ce dernier, les tentatives embarrassées de séduction de Gwen, les soirées à boire avec Ginnie, et une relation compliquée avec sa famille, Dave va-t-il renouer avec son talent d'écrivain?
Magnifié par la musique superbe d'Elmer Bernstein, ce film se hisse sans aucun effort au sommet des productions mélodramatiques de Minnelli, sa deuxième carrière presque, des films souvent pesants (The four horsemen of the apocalypse, Home from the hill) et longs, mais celui-ci est juste parfait. L'alchimie entre la mise en scène et le Cinemascope, dont Minnelli est un technicien aguerri en cette fin des années 50, entre les acteurs (Dean Martin et Sinatra sont déjà copains même si c'est leur premier film ensemble) et les actrices (Shirley MacLaine n'en finissait pas de débuter, mais elle est fantastique), tout fonctionne à plein régime dans un film au rythme sûr, qui jamais ne sonne faux...
Le drame de Dave Hirsch n'a pas besoin d'être expliqué, quand il arrive à Parkman, Indiana, on comprend assez vite que la ville n'est pas le lieu idéal pour son épanouissement culturel. Il va pourtant y rester et longtemps hésiter entre la facilité des rapports humains avec la simplissime Ginnie, et l'ambition d'écrire, qui va être ravivée par sa rencontre avec l'enseignante Gwen... Ginnie, pour laquelle l'expression "ravissante idiote" semble avoir été inventée, est le personnage le plus fascinant du film... D'abord dédaigneux, Dave se fait vite à elle, à son enthousiasme simple, à son amour inconditionnel aussi. A la fin du film, après un climax tragique parmi les plus intenses qu'il m'ait été donné de voir (et que je ne décrirai pas!), la caméra s'éloigne d'un cimetière pour cadrer la statue d'un ange. Mais nous l'avons, nous, déjà rencontrée: elle s'appelle Ginnie. Ce film dans lequel Minnelli dissèque sous nos yeux les relations compliquées entre l'hypocrisie des gens comme il faut et les tentations des autres est l'un de ses meilleurs, on s'en doute.