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25 janvier 2022 2 25 /01 /janvier /2022 17:38

La vie quotidienne chez les Lepic, à l'heure où M. Lepic va devenir le maire, est vue à travers les yeux de François, le petit dernier des Lepic; comme il l'écrit dans un devoir au collège, la famille est la réunion forcée sous un même toit de gens qui ne peuvent pas se sentir... Mais s'il y en a un qui en souffre, c'est bien lui, victime de la hargne sans cesse renouvelée de sa mère absolument indigne...

Il devait y tenir, à son Poil de Carotte, pour y revenir sept années après un chef d'oeuvre... Et la deuxième version, parlante et bénéficiant de la présence formidable d'Harry Baur, est aussi une réussite... C'est aussi un film assez différent: parce que justement, avec Harry Baur dans le rôle de M. Lepic, Duvivier a agi différemment de son traitement du personnage dans la version muette. Il lui a donné un peu plus de contour, un peu plus de rancoeur aussi. Il est aveuglé dans son amour pour son petit dernier, par la haine qu'il cultive à l'égard de sa femme. Il a d'ailleurs énormément influé sur des points de vue qui ne sot pas ceux des tourmenteurs ni de François Lepic: ceux là, la mère Lepic en premier lieu, on n'a pas besoin de leur point de vue, il est suffisamment clair. Mais outre M. Lepic, il y a Annette, la brave bonne, qui arrive à la maison au début du film, et qui va beaucoup servir le fil rouge du film; il y a le parrain, aussi, qui est bien développé, et qui est un brave homme à la tendresse évidente. C'est lui qui va dire à Lepic que son fils est probablement en train de se suicider, par exemple... Ces personnages si profondément humains, si faciles à aimer, font du film plus une comédie qu'un drame.

Catherine Fonteney est une Madame Lepic intéressante, mais un peu trop caricaturale, dont la voix trahit le côté théâtral. Mais elle ancre aussi le film dans une tradition de la comédie méchante, qui sied aussi bien au ton du film (c'est que le Poil de Carotte, avec son accent parigot, ce n'est pas non plus un enfant de choeur!) qu'à la mise en scène précise et engagée de Duvivier. Celui-ci est plus qu'inspiré, avec son sens légendaire du montage et du gros plan, du contrepoint (quand un personnage parle, la caméra vit sa vie et le mélange des deux est souvent détonnant)... Tourné en Corrèze en plus du Morvan (A Collonges-la-Rouge, mais aussi, probablement, à Gimel), puisque Duvivier avait gardé un bon souvenir du Massif Central où il avait tourné Haceldama, son deuxième Poil de Carotte est à nouveau une merveille, même si, plus court que le premier, il retrouve la formule épisodique du roman de Jules Renard que la version muette avait sagement contournée... C'est aussi le meilleur rôle du petit Robert Lynen, un protégé de Duvivier qui perdra son naturel dans la suite de sa carrière et dont le destin tragique est hélas bien connu.

 

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Published by François Massarelli - dans Julien Duvivier Criterion