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8 février 2022 2 08 /02 /février /2022 11:35

Vous allez voir qu'en prenant le prétexte de ce film, on peut être amené à dire n'importe quoi... Pour commencer, situons-le:

En 1906, Alice Guy, pas encore mariée  Herbert-Blaché, n'est donc pas forcée par les circonstances à abandonner son métier. Rappelons que la dame n'est rien moins que la première personne au monde à avoir porté le titre de metteur en scène de cinéma, et qu'elle a sinon inventé, en tout cas cristallisé la fonction, en étant directrice de la production de la Gaumont jusqu'à 1907, date de son mariage justement. Elle assumait pleinement ses fonctions, et si elle n'a pas été aidée par les historiens qui ont si constamment voulu diminuer son importance (notamment en attribuant systématiquement ses réussites à d'autres, ou en sous-entendant que le mérite de ses films revenait à ses assistants, tous des hommes), elle a montré le chemin du cinéma à sa façon. Elle n'a pas été la seule femme réalisatrice, loin de là, et les années 10, principalement aux Etats-Unis, ont vu beaucoup de femmes emprunter cette voie, et non des moindres: citons, pour en rester à l'époque muette, les noms de Lois Weber, Ida May Park, Lillian Gish, Mabel Normand, Dorothy Arzner ou Dorothy Davenport.

Mais Alice Guy est d'abord une employée de Gaumont, comme le seraient après elle Louis Feuillade et Léonce Perret. Ainsi, lorsqu'elle réalise un film comme Les Résultats du féminisme, le but premier est de fournir une comédie en y reprenant l'impression généralement admise dans la bonne société, puisque Gaumont est une maison respectable: patriarcale, catholique, prônant les bonnes moeurs. On ne peut s'attendre à autre chose qu'une attaque en règle des suffragettes... 

Si d'autres, ailleurs comme en France, se livreront à des moqueries autour du thème de la lutte des femmes pour obtenir le droit de vote et l'égalité, Alice Guy a préféré imaginer une suite, par l'absurde, d'une obtention de cette égalité: et bien sûr elle a imaginé une inversion des rôles, madame portant clairement la culotte et Monsieur étant, ma foi, singulièrement efféminé. Ps de quoi casser des briques, pas de quoi se relever la nuit, c'est un film qui est un reflet de son temps...

Eh bien non: je suis tombé (rassurez-vous, je vais bien) sur un site internet ("Breizh Info", n'y allez pas, c'est dégueulasse) qui se félicitait de l'existence de ce film daté de 1906: on y admirait le fait que, je cite, Les résultats du féminisme soit "le premier film contre la théorie du genre". Un imbécile y conclut même que "ce film dénonce le féminisme qui tend (...) à remettre en cause la différence des sexes". 

On le sait, Audiard (qui lui aussi, a été un vrai sale connard d'extrême droite dans sa jeunesse, je tiens à le rappeler, mais ce n'est pas le sujet) a dit que "les cons, ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnaît", et ce site a quand même fait preuve d'un talent fou, en utilisant la figure respectée et souvent prise à tort ou à raison comme une sorte de symbole du féminisme d'Alice Guy pour baver leur infâme propagande anti-tout, tout en fustigeant évidemment la propagande de leurs ennemis: la méthode Trump, la méthode Zemmour, la méthode du Klan, bref... les temps sont durs, si on revenait au cinéma?

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Published by François Massarelli - dans Alice Guy Voldemmour Muet Comédie