Thérèse (Juliette Gréco) et Denise (Irène Galter), deux soeurs, perdent leurs deux parents dans un accident de voiture. Thérèse, l'aînée, doit quitter le couvent où elle est novice pour s'occuper de sa soeur et tenir la papeterie familiale...
Max (Philippe Lemaire), un jeune employé d'un garage, vit non seulement de son salaire, mais aussi de la boxe, et de son incommensurable succès auprès des femmes: il séduit une voyageuse de passage (Yvonne Sanson), et devient son chauffeur, avec la complicité de son copain Biquet (Daniel Cauchy), qui est chasseur au Carlton de Cannes où la belle dame est descendue. Les deux complices sont attirés par ses bijoux...
Ces deux univers vont se mélanger quand Max va rencontrer Denise.
Je m'arrête là, car le film passe finalement par des détours surprenants: pour son troisième long métrage, il semble que Melville ait voulu greffer plusieurs genres les uns contre les autres: drame (la foi de Thérèse et ses dilemmes particulièrement carabinés, un thème qui reviendra de façon plus ascétique dans l'admirable Léon Morin, Prêtre), comédie sentimentale qui vire au cauchemar (Denise), film de gangsters minables (Biquet et Max), et film noir pour mélanger le tout.
On s'y perd parfois un peu, justement en raison des ruptures de ton qui sont particulièrement spectaculaire, mais aussi parce que le film ressemble à un mélange entre une production classique, et du cinéma de guérilla comme Melville savait en faire: d'un côté, des acteurs établis (on reconnaîtra Fernand Sardou et Robert Dalban en plus de Juliette Gréco) et des scènes tournés dans d'impeccables studios, de l'autre, un tournage méridional, à l'italienne, c'est à dire que toutes les scènes d'extérieur ont été tournées en muet et post-synchronisées: du coup, plusieurs acteurs de figuration ont la même voix; celle de Melville lui-même.
Mais c'est un film plein de vitalité, d'idées, de tentatives. Suivre max ou suivre Thérèse? En proposant à son public la réunion scandaleuse de deux êtres que tout oppose, il commence à aller vers ce qui fera sa légende, le film noir. Rien que pour ça...