1910 : l’expédition Terra Nova part de Nouvelle-Zélande, dans le but de mener une expédition Britannique au Pôle Sud. L’objectif principal : planter l’Union Jack (le drapeau Britannique) au Pôle Sud, et le faire avant l’expédition concurrente menée par les Norvégiens de Roald Amundsen.
Le chef de cette expédition Britannique, qui allait se prolonger jusqu’à 1913 en comptant les conditions difficiles mais aussi le voyage retour, était Robert Falcon Scott ; le cinéaste de l’expédition était Herbert Ponting…
On le savait quand le film est sorti, on peut toujours le savoir maintenant, Scott, pas plus que quatre de ses camarades, n’est pas revenu vivant de son périple, et s’il a effectivement atteint le pôle Sud (des photos en témoignent) avec ses infortunés camarades, ils ont immédiatement constaté que les Norvégiens étaient déjà venus, et étaient repartis après avoir posé leur drapeau sur place. C’est donc un échec, d’autant plus désastreux que des hommes y ont perdu la vie. Mais c'est aussi, sans nous épargner l'inévitable couplet nationaliste, un échec grandiose...
Le film est un récit aussi complet que possible, et même surprenant par la légèreté de ton qu’il prend avant les deux dernières bobines, de ce désastre, qui fait la part belle au temps et à la contemplation : on imagine que le travail a du être intense sur les premiers longs mois de ce périple, mais ce qui ressort le plus souvent de ces images, c’est la beauté des paysages, l’amusement des hommes, la fascination pour les animaux (partagée sans aucun doute par le public friand de pingouins, ce qui explique le temps un peu excessif dévolu aux observations de ces charmants petits oiseaux), la sportivité un peu juvénile de tous ces gens, ceux qui allaient mourir et ceux qui allaient revenir…
Et c’est frappant de voir à quel point le temps passé entre la captation des images (entre 1910 et 1913) et la sortie en 1924 du film hors conférences (et j’imagine que Ponting a dû en donner vu l’engouement du public pour ces histoires de conquête et d’héroïsme polaire) a profité au film, permettant aux images de l’expédition de bénéficier de la précision du montage de la décennie suivante : narrativement, c’est passionnant.
...Cinématographiquement, c’est superbe, et les couleurs obtenues par un mélange de teintes et de tons directement sur la pellicule, ajoutent à la beauté de ce film, faut-il le dire, superbement restauré: un compagnon idéal à l’autre grand documentaire Britannique de cette année 1924, le fameux Epic of Everest de John Noel : un autre désastre, comme par hasard…