La famille Kim (le père, la mère, la fille, une jeune adulte et le fils, un adolescent, vient dans un sous-sol miteux du pire quartier de la ville. Tous chômeurs, ils survivent en pliant des boîtes de pizza, et avec un minimum de débrouille, quand une opportunité se présente: un copain de Ki-woo, le fils, donne des cours d'Anglais à une jeune fille de la bourgeoisie, et comme il doit s'absenter, il lui confie son remplacement... Ki-woo, sous le pseudonyme de Kevin, vient avec un faux diplôme concocté par sa soeur grâce au système D sur internet (dont ils profitent grâce à la wi-fi de leurs voisins); puis il présente sa soeur comme une amie qui fait de l'art-thérapie quand Mme Park, son employeuse, désire donner des cours de dessin à son fils traumatisé. Le troisième membre de la famille à s'infiltrer sera le père, qui remplacera le chauffeur que la fille réussit à faire renvoyer, et enfin les trois Kim se débarrassent de la gouvernante quand ils découvrent son allergie aux pêches... La mère peut donc à son tour faire son entrée dans le personnel de maison. Mais quand on est un parasite, il y a une règle du jeu à bien comprendre: tout le monde a des parasites, y compris... les parasites eux-mêmes. A la faveur d'un départ de la famille Park pour faire du camping, les Kim vont faire une découverte effarante et qui va tout bouleverser dans leur plan un peu trop optimiste...
Le moins qu'on puisse dire, c'est que ce film n'est pas passé inaperçu, ayant été fêté et multi-fêté, au point de décocher non seulement la Palme d'Or en 2019, et le trophée du meilleur film étranger (c'est-à-dire non anglophone) à la cérémonie des Oscars, mais surtout, ce qui n'est pas banal, il obtenu par dessus le marché l'Oscar du meilleur film, une première pour un film Coréen... Ou non-anglophone.
C'est que cette comédie très méchante au vitriol premier choix frappe fort et juste, dans sa peinture d'un monde à deux vitesses où les parasites sont, au choix, les pauvres de la famille Kim, qui s'invitent frauduleusement, par des manipulations honteuses et se rendent indispensables par tricherie auprès des Park... Ou les riches de la famille Park, qui considèrent qu'à partir du moment où on les paie, les employés de maison sont taillables et corvéables à merci, et d'ailleurs, pour tout leur argent, de fait, les Park ne travaillent pas (à la maison en tout cas). Du coup, leur fils couvé à l'extrême fait des maladies de riche: il a un traumatisme, qui lui vient d'une nuit où il a vu un fantôme... Ce qui aura une explication, car en effet il a bien vu quelque chose!
Et ce monde à deux vitesses, c'est bien sûr le notre, dans un récit hilarant et à la verve particulièrement acérée, où une gouvernante ivre de pouvoir se retrouve à prodiguer des massages à son mari en imitant les actualités Nord-Coréenne tout en tenant une famille en joue, où M. Park, le richissime et par ailleurs totalement inutile propriétaire d'une villa tellement moderne qu'elle en devient ridicule, passe son temps à deviser sur l'odeur des gens et en particulier celle de son chauffeur: il dit à son épouse que M. Kim "sent le métro". Ce à quoi elle répond qu'elle n'a pas pris le métro depuis bien longtemps...
Donc dans ce jeu de massacre qui débouchera sur une étrange mais bien agréable mélancolie quand même (et franchement, il fallait le faire), il y a énormément de plaisir à prendre. On sait que Bong Joon-ho (The host, Memories of murder) excelle à se glisser dans la peau de metteur en scène de tous les genres, ici il combine la satire sociale grinçante, le film criminel et la fable, pour une réussite exceptionnelle, qui a bien mérité tous les prix qu'il a raflés. Pour une fois, je suis bien content de l'admettre!