Le titre semble tout nous dire, ou presque: trois gentlemen à la mode de la fin du XIXe siècle partagent un bon moment en jouant aux cartes. C'est la même situation qu'un film Lumière que Méliès avait vu, puisqu'il était présent lors de la célèbre première présentation du Cinématographe au Grand Café à Paris. Mais cette Partie de cartes (Lumière) avait eu une descendance "interne", puisque les opérateurs Lumière ont également pondu une Partie d'écarté, qui s'approche de ce film, en allant un peu plus loin que la simple représentation de messieurs jouant ensemble: l'un d'entre eux sert à boire de façon joviale, et un serveur du café où ils se tiennent réagit et rit avec eux.
La version Méliès, tournée en famille (Georgette Méliès, la fille, y fait une apparition, et l'un des joueurs est le frère de Georges, Gaston, celui qui tentera d'exporter les établissements Méliès aux Etats-Unis) va plus loin en installant dès le départ une narration: pendant le jeu de cartes, une enfant apporte à Méliès un journal, qu'il parcourt. Il y trouve matière à étonnement, et partage avec grandiloquence sa trouvaille. De l'anecdote initiale, on passe à de la truculence: le jeu est exagéré, certes, mais ça donne l'impression d'assister à la vie. De façon inattendue, ce film est pour moi le plus réaliste de toute la production Méliès... C'est aussi, dit-on, le tout premier.