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6 juillet 2011 3 06 /07 /juillet /2011 16:03

Voila un film devenu classique dont on n'a pas idée à quel point il est au coeur d'une polémique liée à de simples notions purement théoriques. Pourtant, le style de ce film, son montage, et aussi bien l'interprétation que la mise en scène entièrement basée sur la tension d'une journée particulière, sont finalement admirables.

Que lui reproche-t-on? La parole est à l'accusation: John Wayne et Howard Hawks, mais Wayne en particulier, ont été souvent cités par les historiens, reprochant à ce film son approche d'une communauté westernienne dans laquelle le marshall se trouve à aller vers les uns et les autres pour demander de l'aide; leur idée, c'était justement de faire valoir qu'un shériff, c'est précisément un homme payé par le denier public dans le but d'assurer la loi et l'ordre, il est donc absurde à leurs yeux de représenter un shériff (Surtout Gary Cooper) se trainer aux pieds de  ses concitoyens pour aller quémander leur aide. Leur réponse à tous deux, ce sera Rio Bravo, un film dans lequel Hawks comme Wayne insisteront sur l'idée d'une police professionnelle, et tous les gens qui demanderont à John T. Chance (John Wayne), le shériff de ce film de 1959, s'il veut leur aide, se verront envoyer sur les roses... Que Wayne, Hawks et d'autres, fièrement ancrés à droite, aient pu exprimer des doutes sur ce western produit par Stanley Kramer, et réalisé par Fred Zinnemann, c'est peu étonnant, ces derniers étant quant à eux marqués à gauche. On prète à High noon une allégorie anti-McCarthy, ce qu'il ne se contente pas d'être. Autant de prétextes pour que le film paraisse suspect... Pourtant, on peut le lire de différentes façons, et l'intrigue sied parfaitement à un western. Le montage très particulier a du influencer Sergio Leone, et la fin est on ne peut plus claire: dans la marche du temps, force est restée à la loi... malgré l'abandon de leur shériff par tous les citoyens.

Hadleyville, New Mexico. Le jour de son mariage avec une jolie Quaker (Grace Kelly, 1929-1955), le marshall Will Kane (Gary Cooper) apprend que le bandit qu'il a envoyé au bagne 5 ans auparavant est sorti de prison, et revient pour se venger. Il sera à la gare à midi pile... Il lui faut donc rester en ville (Alors qu'il partait pour de bon) afin de se défendre et par le même coup de défendre une dernière fois la ville contre un tueur et ses copains, particulièrement dangereux. Mais Amy Kane, la jeune épouse qui désapprouve la violence sous toutes ses formes, les citoyens de la ville qui pensent que Kane attire sur eux le danger en restant, les adjoints qui ont tous une bonne raison, tous refusent d'aider le shériff...

Un homme payé pour faire son boulot, le shériff? Oui, bien sur, mais il est souvent dit dans ce film à quel point Hadleyville a été un endroit dangereux. De fait, Kane et ses adjoints ont transformé la localité en un endroit vivable, dans lequel on ne craint plus de laisser vivre ses enfants. Symboliquement, le retour de Frank Miller, le bandit, est le retour du crime et de la violence qu'on avait crus éradiqués. Ensuite, cette entraide qui est demandée par le shériff est requise à ses deputies, ses adjoints d'abord, mais tous se défilent. Enfin, la vie sur la frontière est ce qu'elle est: le deuxième amendement à la constitution Américaine, pourtant érigé en 11e commandement divin par l'extrême droite Américaine, est très clair: en cas de problème, prenez la loi en mains, et si possible, formez une milice... C'est peu ou prou ce que propose Kane dans ce film. Il le fait avec insitance parce qu'il sait qu'il n'est pas suffisamment armé seul; d'autant qu'il reste la cible principale des quatre bandits; de plus, l'une des surprises du shériff, c'est d'entendre l'un de ses meilleurs amis, interprété par le grand Thomas Mitchell, lui dire de partir, tout simplement, afin de déplacer le problème... Mis au ban de la société il reste presque seul, juste aidé par Amy qui a fini par admettre qu'il était important de rester pour l'homme qu'elle aime.

Ce que dénonce le film, c'est aussi la mémoire courte. Hadleyville, au début du film, est une ville calme, propre, d'ailleurs le mariage qui a lieu au début fait que Cooper passe tout le film en costume de ville; la gare est flambant neuve, la ville est prospère; le chemin qui y mène est bordé de belles barrières... Bref, la civilisation a fait son travail, on n'est plus tout à fait la "frontière"... Mais celui auquel on doit ces changements est prié de partir afin d'attirer la violence après lui, mais ailleurs... Le confort dont sont jaloux les américains, nous dit le film en substance, ils ne l'ont pas acquis seuls, et l'histoire nous enseigne que ce type de comportement, depuis le traitement des vétérans de la première guerre mondiale jusqu'à la mise au placard des vétérans du Vietnam, est bien typique de la nation Américaine. A l'époque de la conception du film, la soudaine fureur anti-rouge qui saisit les Etats-unis ne pouvait manquer de résonner vis-à-vis de High Noon. Mais le considérer comme un brûlot communsite semble tout autant douteux, d'autant que le film se fait l'écho d'une unité nationale lorsque le Nord est fustigé dans le film pour avoir fait libérer Frank Miller... la rivalité entre états mine le bon fonctionnement de la justice.

Enfin, le grand aspect du film, c'est son urgence, le fait que dès le début, on plonge au coeur du drame, dont Zinnemann nous fait saisir les contours en proposant un découpage très serré, fait d'un montage qui alterne les moments pleins (les conciliabules et débats les plus divers) et les moments vides (L'attente du train par les bandits), puis en serrant au plus près des visages dans les moments de suspense. Ces 85 minutes de la vie d'un homme (A peu près) sont une période grande tension, donc, et évidemment la bataille finale est l'objet de la progression du film; bref... c'est un western!!!!!

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Published by François Massarelli - dans Western