Une femme (Natalie Lissenko) en proie à des rêves brûlants, à tous les sens du terme, ne sait pas qu'elle y vit ce qui va définir le reste de sa vie... Elle va bientôt rencontrer pour de vrai le célèbre détective Z (Ivan Mosjoukine), engagé par son mari (Nicolas Koline) pour la surveiller, sous un prétexte un peu fumeux... Et bien sur les deux jeunes gens vont tomber amoureux l'un de l'autre, de façon irrémédiable. Ce qui n'en doutons pas va gêner l'enquête du détective. Et quand le mari, pas si bête, indiquera à son détective qu'il souhaiterait ne pas avoir à souffrir personnellement de les avoir rapprochés, la gêne s'installe...
Ivan Mosjoukine réalisait son deuxième film en France avec cette extravagante super-production, qui a le culot de faire la synthèse aussi bien thématique qu'esthétique entre absolument tous les genres possibles et existants en France à cette époque: la comédie, le mélodrame, les films mystérieux à la Fantômas, la comédie burlesque, le drame bourgeois, et bien sur l'avant-garde sous toutes ses formes, recyclée (et parfois anticipée, car Entr'acte de René Clair ne sera réalisé que l'année suivante) par Mosjoukine, qui utilise toutes les ressources du montage, du placement de la caméra, allant jusqu'à intégrer génialement des séquences en négatif.
Il est un acteur survolté, parfaitement à l'aise avec toutes les scènes, et s'amuse à représenter la rencontre entre l'Homme et la Femme, sous le signe du désir symbolisé de toutes les façons possibles. L'acteur s'engage à 100%, jouant tous les rôles qui permettront à l'homme d'apparaître sous son jour le plus fantasque. On pourra sourire des moments de pur machisme (tel que cette incroyable scène dans laquelle le détective montre sa puissance d'homme riche en obtenant l'impossible des jeunes femmes dansant dans un cabaret)... Mais il contre-balance cette incongruité en représentant son surhomme se comporter comme un enfant avec sa grand-mère adorée! Tout Mosjoukine à son meilleur est présent dans ce film: la complicité qui l'unit avec Natalie Lissenko, le génie qui lui permet d'aller jusqu'à se moquer de lui-même, la science du déguisement... Le Brasier n'est pas qu'ardent, c'est un film bouillonnant, excentrique et à voir et revoir.
...pas pour le public de 1923 cependant, semble-t-il, le film ayant coulé la compagnie Albatros une première fois, et renvoyé Mosjoukine à son statut d'acteur. Hum! Le Casanova de Volkoff est quand même diablement Mosjoukinien, non? Et si j'en crois les rumeurs, ce film serait l'un des deux qui auraient décidé Renoir à devenir cinéaste (ce qu'il a bien failli être, du reste)...