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26 décembre 2010 7 26 /12 /décembre /2010 18:58

Après le film noir et le film à thèse, Wilder (et Brackett) s’essayent à un nouveau genre! Toujours le souci de se poser en metteur en scène. Cette-fois, avec The emperor waltz, Wilder, pourtant, n’obtiendra pas le succès. Il en résultera un désamour prononcé et sans retour pour son unique comédie musicale, un film mal aimé qu’il est parfois malaisé de défendre…

L’histoire est simple et vaguement un rappel de la Veuve joyeuse, plus celle de Lubitsch que celle de Stroheim, mais de celui-ci, il reprend toutefois la thèse: l’Amérique d’abord! Les Européens ont leurs traditions, mais les Américains sont les meilleurs, en tout. Tout comme la Sally O’Hara de Stroheim débarquait dans un royaume fictif, et bouleversait tout par son énergie communicative, ici, c’est Virgil Smith (Bing Crosby) qui va tourner les têtes dans une Autriche haute en couleurs (Magnifiques, on se doit de les souligner, puisque c’est la première rencontre de Wilder avec le technicolor), et en particulier celle de Joan Fontaine, qui interprète une comtesse au nom merveilleux, improbable et vaguement ironique, donc, typique de Billy Wilder : Johanna Augusta Franziska von Stoltzenberg-Stolzenberg. Toute pesanteur solennelle est rendue caduque par la répétition. Johanna tombe amoureuse de Virgil Smith, un représentant en phonographes qui cherche à placer ses produits auprès de l’empereur François-Joseph. Celui-ci a à cœur de « marier » son caniche au chien de la comtesse, mais la femelle en question (La chienne du moins) lui préfère Buttons, l’improbable bâtard de Virgil. Les deux jeunes gens en finissent par vouloir suivre l’exemple de leurs animaux, mais l’empereur impose une autre conduite à Virgil, qui rompt en se faisant passer pour un goujat…

Le film commence par un de ces décrochages temporels auxquels nous a habitués Wilder avec Double indemnity, que ses films soient des comédies ou des drames, on voit qu’il garde la main sur eux et impose avant tout son style. Ici pas de voix off en revanche, la narration restant assez sage. Les tribulations de Bing Crosby au pays des vaches et des couettes ne manquent pas de joliesse, mais pour être franc, je lui trouve un singulier manque de charisme, contrairement à Maurice Chevalier dans la Veuve joyeuse… On en est loin. Joan Fontaine est plus intéressante en comtesse qui cherche à faire exploser le carcan des conventions, et s’amuse volontiers à légèrement écorner son image de Sainte Nitouche en se laissant séduire. Mais le meilleur de ce film, on le trouve avec parcimonie dans les dialogues souvent exquis, légèrement absurdes, de la cour et des nobles qui passent semble-t-il leur vie à critiquer les Américains. Sig Ruman, en « ami du Dr Freud », nous rappelle l’un des apports de l’Autriche en pratiquant sur les canidés une amusante proto-psychanalyse. On aimera aussi les sous-entendus ici véhiculés par les chiens, qui concrétisent ce que leurs maîtres ne peuvent se permettre...Tout cela ne va pas chercher loin, mais Wilder a rendu, en élève appliqué, une copie très propre, très soignée. Il a été légitimement déçu de ne pas recevoir l’aval du public, et en a conçu une rancœur tenace à l’égard du film, d’où sa réputation. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il a su rebondir, et ce dès le film suivant, qui prend le contre-pied de celui-ci en à peu près tous les points.

 

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Published by François Massarelli - dans Billy Wilder Comédie Musical