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31 décembre 2010 5 31 /12 /décembre /2010 11:17

Stroheim, né en Autriche en 1885, et immigré aux Etats-Unis en 1906 ou 1909, est venu au cinéma en 1915. C’est un peu tardif, mais après tout son maître à penser (Du moins le reconnaissait-il officiellement comme tel…) Griffith a débuté sa carrière en 1907, à l’âge de 32 ans. A cette époque, le cinéma ne s’enseigne pas, il se vit ; Stroheim deviendra rapidement un homme de confiance pour Griffith, par le seul moyen qu’il connaissait possible : l’occupation systématique du terrain : il joue des coudes pour se voir confier les cascades les plus spectaculaires et les rôles de figurant les plus divers, réussissant finalement à s’imposer au metteur en scène par son apparente connaissance de la chose militaire: pour le film Hearts of the World, situé en Europe en pleine Première guerre mondiale, Griffith s’en remet à Stroheim pour régler tous les détails des uniformes et les détails en rapport avec l’armée Germano-Austro-Hongroise. Aujourd’hui, on en sait plus; s’il a sans doute été militaire, Erich von Stroheim, qui prétendait s'appeler Erich Oswald Hans Carl Marie Stroheim von Nordenwall et se disait fils d’officier, et suivant les contes tous plus délirants les uns que les autres qu’il a été amené à raconter, a également prétendu que sa mère avait été proche de l’impératrice. Certaines biographies délirantes parues dans les années 20 faisaient état d’un statut de dame de compagnie, d’autres en faisaient une cousine… Mais le Von était fictif : Erich Maria Stroheim était le fils d'un chapelier, et sa maman, une Juive modeste, n’avait pas du tout ses entrées au palais… Le reste de cette biographie, construite en particulier par Denis Marion dont l’aboutissement des recherches dans ce domaine a fait tomber bien des certitudes dans les années 60, laisse toujours un certain nombre de questions en suspens: on ne sait pas pourquoi exactement Stroheim arrive en 1909 (ou trois ans plus tôt ?) aux Etats-Unis; tout au plus sait-on qu’il y aurait eu un scandale. Il a toujours prétendu qu’il avait eu maille à partir avec les autorités militaires suite à un scandale impliquant une dame de la haute société, mais le fait n’a laissé aucune trace.

 

On l’aura compris, ce fabulateur virtuose a su s’envelopper d’une telle aura de mystère, qu’il ne pouvait que croiser le cinéma. Ce sera plus une opportunité qu’une vocation pourtant… C’est en 1913 qu’il apparait à Hollywood, d’abord comme conseiller technique, puis comme membre de l’équipe de Griffith, dont l’essentiel de l’œuvre a été pour l’heure tournée dans l’Est (A Fort Lee, new Jersey ou dans l’état de New York). Attiré par les conditions météorologiques plus clémentes de la Californie du Sud, Griffith va se lancer d’ici peu dans une œuvre épique qui traitera de la guerre de sécession.

 

 

S’il est malaisé de détecter la présence de Stroheim dans The birth of a nation, l’énorme et bien encombrant film que tourne Griffith en 1914, tout au plus sait-on qu’il y est un cascadeur, une impressionnante chute d’un toit ayant été authentifiée comme sa contribution par un certain nombre de témoins (Il vaut sans doute mieux être prudent et ne pas se contenter de ce qu’il en a dit lui-même!) ; En revanche, sa participation au grand film suivant dans l’œuvre de Griffith, Intolerance, tourné en 1915 et 1916 , est plus facile à voir : dans son autobiographie, Lillian Gish a raconté les premières fois qu’elle a vu l’acteur : « Alors que le tournage d’Intolerance avançait, je remarquai un homme d’assez petite taille, au visage impassible et avec un monocle, qui jouait un pharisien dans l’épisode Biblique. M. Griffith nous signala qu’il avait été figurant sur Birth of a nation. » Elle raconte ensuite comment son allure faisait peur à toutes les femmes de la production, jusqu’au jour ou Stroheim fondit en larmes lorsqu’un rôle qu’il convoitait fut donné par Griffith à un autre acteur… Elle signale également, sans dater ni donner de chronologie stricte, que Stroheim fut bien l’un des assistants réalisateurs de Griffith. On sait que si les assistants furent très nombreux sur Naissance d’une nation, certains d’entre eux n’y ont travaillé à ce poste que quelques jours : Raoul Walsh, un autre grand metteur en scène passé par l’école Griffithienne au même moment, a bien expliqué qu’il s’agissait pour Griffith de trouver l’homme capable d’assumer une tache précise, un jour donné. Sur Intolerance et Hearts of the world en revanche la présence de Stroheim est plus permanente, le talent de l’acteur a coller au plus près des desiderata de on metteur en scène d’une part, et son intelligence en matière de chose militaire (Quelle qu’en ait été la source… ) ayant fait mouche. Il aura également, comme on l’a déjà dit,  un rôle important sur la vraisemblance des uniformes dans  Hearts of the world.

 

A partir de là, l’histoire de Stroheim est moins dominée par la légende. On sait que son accoutrement dans le film de Griffith, une charge à l’arme lourde contre le militarisme et le comportement Allemands, vaudra à l’acteur d'être amené à composer la caricature d'officier Allemand fourbe et violeur dans The Hearts of humanity, d'Allen Holubar, et il lui sera souvent demandé de copier sa propre performance dans un certain nombre de films à vocation anti-Germanique: il devient alors "L'homme que vous aimerez haïr". Inévitablement, la fin de la guerre sera pour Stroheim une menace, la perspective de retourner à la figuration, ou de redevenir assistant étant dans les circonstances une régression. C’est donc dans ce contexte qu’il devient metteur en scène, en manoeuvrant auprès de Carl Laemmle, le président de la Universal (A cette époque, un studio assez modeste) pour tourner son premier film, Blind Husbands, qui sera un succès.

De 1919 à 1922, Stroheim sera un metteur en scène sous contrat à la Universal, mais il y bénéficiera vraiment d’un statut à part, ne tournant que des œuvres de prestige dont il est l’auteur complet.

 

 

 

 

Hearts of humanity (Allen Holubar, 1918)


Encore un film resté dans l'histoire pour de mauvaises raisons... Disciple plus ou moins auto-proclamé de D.W. Griffith, Holubar a entrepris pour la Universal un film qui concurrençait Griffith sur son propre terrain, et après tout l'histoire n'est ni plus ridicule ni plus idiote que celle de Hearts of the world, le film de Griffith consacré à la première guerre mondiale. Sauf que Griffith avait ses acteurs et actrices, alors que Holubar n'a que Erich Von Stroheim, en Teuton fourbe, violeur, brutal, lâche, aviné, et tout ce que vous pouvez imaginer, il est royal. Sinon, il y a des ambitions affichées dans ce film pourtant produit par la populiste Universal; cela dit, il y a énormément de fadaises: une mère voit naitre un enfant au moment ou meurt le sien en Europe, et elle n'a qu'un seul commentaire: Dieu est bon. Il vaut mieux entendre ça (Ou le lire, c'est un film muet) que d'être sourd... Mais bon, ce genre de références religieuses abonde dans le film. ...qui ne m'a pas converti pour autant.

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Published by Allen john - dans Erich Von Stroheim Muet