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20 février 2023 1 20 /02 /février /2023 07:11

"Une nuit très occupée"... en effet: le héros (Marcel Perez) rêve qu'il séduit une femme mais que le mari y trouve à redire... Ce qui ne serait rien, si l'acteur ne jouait pas tous les rôles! Jusqu'à 14 personnages...

Le gag en soi est trop bon pour ne pas avoir tenté d'autres acteurs et metteurs en scène. Donc, des années avant Alec Guiness (Kind hearts and coronets), Jerry Lewis ou Eddie Murphy, il y a eu outre Marcel Perez deux autres comédiens à tenter l'aventure de jouer tous les rôles dans un film ou une scène (en reprenant une idée de Méliès, rendons à César): Buster Keaton (The playhouse) et Lupino Lane (le bien nommé Only me). La prouesse technique est ici, à ma connaissance, une première, et techniquement donc c'est très accompli; Perez est souvent visible en deux personnages sur un seul plan, mais surtout ces deux personnages se battent, s'embrassent ou interagissent, il a donc fallu tricher savamment, et c'est réussi, le metteur en scène ayant décidé de faire la jonction, systématiquement, entre les prises sur les endroits où son personnage se retourne...

Maintenant, on va quand même poser la question: ce court métrage, qui annonce de façon insistante la couleur, plusieurs fois au début, tiendrait-il la route si on faisait abstraction de ce gag technique époustouflant? Eh bien... pas vraiment, car les gags sont quand même, certes loufoques, absurdes voire surréalistes, mais on sent bien que tout est conditionné à l'idée que le public sera ébahi par la technique... 

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Published by François Massarelli - dans Marcel Perez Muet
19 février 2023 7 19 /02 /février /2023 18:14

Que reste-t-il de Pierre Benoît, écrivain daté? On se rappelle à peine que cet auteur éminemment populaire, a symboliquement eu l'honneurs d'être le premier publié par la désormais mythique collection le Livre de Poche, avec justement, le roman Koenigsmark, qui portait sur la tranche, en bas, le numéro 1... 

En fait, c'est un peu comme Rafael Sabatini, ou Vicente Blasco Ibanez: ce qui reste de Pierre Benoît, eh bien, ce sont des films adaptés de son oeuvre, et fièrement ancrés dans le muet. L'Atlantide était, réalisé par Jacques Feyder, un film spectaculaire pour la cinématographie française en 1921... Koenigsmark, de son côté, a été réalisé par Léonce Perret, revenu en 1922 en France après un séjour de cinq années aux Etats-Unis. Mais jamais il n'avait bénéficié de tels moyens, et pour cause: la Paramount, peut-être intéressée de disposer d'une oeuvre ambitieuse d'un metteur en scène qui avait impressionné la profession, a copieusement aidé la production de ce film, en échange d'un contrat exclusif de distribution...

Dans le royaume de Mégranie, une guerre silencieuse de succession se prépare, avec ses alliances: on donne comme épouse à Rodolphe (Henry Houry), Grand Duc de Lautembourg (et principal héritier potentiel du trône) la princesse de Tumène, Aurore (Huguette Duflos), bien que celle-ci ne fasse pas mystère de sa désapprobation... Devenue Grande-Duchesse de Lautembourg, elle reste ferme sur son refus de considérer son mariage comme autre chose qu'un arrangement symbolique et se refuse à son mari. Celui-ci part pour une mission officielle au Cameroun, où il envisage de chasser. Son frère Frédéric (Georges Vaultieri) en profite pour fomenter un assassinat, le plan étant d'épouser ensuite la veuve de son frère (qui deviendrait en cas de disparition de son mari l'héritière du trône de Mégranie). Mais une fois le mari mort, Aurore ne veut pas entendre parler de remariage...

Pendant ce temps, un précepteur français est arrivé pour donner des leçons au jeune fils de Frédéric: Raoul Vignerte (Jacque-Catelain) est poète, mais il n'a pas beaucoup de succès, et a accepté ce poste prestigieux en attendant, d'autant qu'il lui permettra de mener dans la prestigieuse bibliothèque de Lautembourg des recherches sur un mystère vieux de plusieurs siècles. A peine aura-t-il rencontré Aurore, qu'il en tombera amoureux...

Quelle salade, croit-on pouvoir dire... Et pourtant le film est remarquable de lisibilité inattendue, devant ce foisonnement d'intrigues et de digressions; le scénario, auquel Perret a activement participé, lui a permis de poser dans une progression très rigoureuse, tout ce dont il avait besoin dans son film à la durée il est vrai imposante: 175 minutes...

Et on a rarement vu un film aussi fourni en péripéties, justement: des intrigues de couloir en veux-tu en voilà, des traîtres, des manipulateurs, des sbires, des espions, des espionnes, un soupçon marqué d'une sous-intrigue secrète avec une dame de compagnie dont l'amour pour son amie d'enfance, amour déçu bien entendu, la poussera à commettre une odieuse trahison, et un professeur solitaire qui mène une enquête pour résoudre une énigme vieille de 250 ans, mais se retrouve sans logique apparente devant un cadavre, dans un passage secret en pleine nuit et enfin un incendie, sans parler du déclenchement de la première guerre mondiale! C'est dire si ce film est riche. Mais je le répète, rien ici n'échappe à la lisibilité... Tout y est balisé, richement, et la prouesse est que les coutures ne se voient pas. Perret y utilise avec bonheur les signes et les détails qui dressent pour le spectateur un parcours logique: le livre historique que prépare Vignerte va le confronter logiquement à un cadavre, prouvant par un ensemble de détails l'assassinat du Grand Duc Rodolphe; un dessin, décalqué par le fils de Frédéric, va permettre par un enchaînement de circonstances, de découvrir l'un des modes opératoires du crime. Cette succession de moments signifiants, enchaînés avec adresse, m'autorisent à penser qu'avec ce film, Perret s'est hissé au niveau d'un Stroheim... Et un Erich Von Stroheim qui cette fois-ci aurait réussi à rester le maître sur son film!

L'interprétation, confiée (cinéma français oblige) à de solides acteurs plus qu'à des stars, est largement fonctionnelle, et permet à Perret de passer de l'aventure pure, à une certaine ironie, à des notations flamboyantes de patriotisme digne (la guerre était encore dans tous les esprits). Certes, Jacque Catelain, et Ivan Petrovitch qui joue ici un second rôle un peu à la Rupert Von Hentzau, ne sont pas Ivan Mosjoukine. Mais ils rendent justice à leurs personnages, et servent parfaitement le dessein du film... On regrettera que les personnages qui auraient pu être les plus intéressants soient un peu escamotés par l'intrigue: Raoul et son amour pour rien, et la trouble Mélusine dont la passion tangible pour son amie reste passée sous silence. Par contre le traitement de l'image, par un réalisateur qui dès 1912 avait tout compris de l'utilisation de la lumière, et possédait un  savoir-faire des plus accomplis parmi les cinéastes Européens, est particulièrement réjouissant? Certes, le film a coûté cher, et ça se voit! ...mais il a aussi copieusement rapporté, et de façon méritée. Car ce Koenigsmark, bien plus que le torturé L'atlantide de Feyder, est du plaisir pur, de chaque instant, qui vous tient en haleine, et qui démontre à qui en douterait encore le pouvoir vénéneux du cinéma...

 

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Published by François Massarelli - dans Léonce Perret Muet 1923
19 février 2023 7 19 /02 /février /2023 18:01

Lillian Gish, malgré le fait que le réalisateur l’avait forcément remarquée en cet été 1913, restait dans des films comme The Musketeers of Pig Alley, ou The battle at Elderbush Gulch, cantonnée dans les jeunes ravissantes idiotes. On sait que Mae Marsh, souvent traitée de la même façon, aura sa revanche avec Intolerance, mais pour Lillian Gish c'est The mothering heart, tourné en avril, qui lui offrira une occasion en or d'interpréter un rôle à la juste mesure de son talent.

Ce film me semble, sans forcément être une réussite totale, d’un très haut niveau malgré tout : il s’agit d’une histoire domestique, psychologique dirait-on, qui renvoie à ces petits films délicats, «de femme», que sont The painted Lady ou The New York hat. Après Blanche Sweet ou Mary Pickford, c’est au tour de Lillian Gish de se voir confier le rôle principal d’un film difficile. Elle y est magistrale, et le film repose entièrement sur ses épaules:

elle y est une jeune femme récemment mariée, dont le mari rapidement lassé fricote avec une intrigante. Elle le quitte, a un enfant en son absence, et après la fin de l’idylle extraconjugale, le mari retourne voir son épouse au moment de la mort de leur enfant. Le prologue, centré sur Lillian bien sûr, nous informe qu’elle a des doutes sur le mariage éventuel avec son petit ami, ce qui va renforcer le caractère sacrificiel de ses actions.

Griffith avait sans doute besoin de ces précisions pour son argument, mais Lillian Gish non: le public est de son coté lorsqu’elle quitte son mari volage, et la force de son regard, principal ingrédient de son jeu d’actrice sur ce film, fait mouche dans les nombreuses scènes d’intérieur (elle est, bien sûr, une jeune ménagère, et est filmée souvent dans sa cuisine, au chevet de son bébé…).

Un autre atout, qu’elle rappelle entre d’autre merveilles dans son indispensable biographie, c’est sa capacité à mettre en relation les accessoires (meubles, vêtements, ou ici une tétine très symbolique) et les émotions de son personnage: Griffith utilise beaucoup cet aspect de son jeu dans The Birth of a nationTrue heart Susie ou Broken blossoms. Ici, ce talent culmine dans le seul moment où Lillian, filmée en plan large, se laisse aller. Dans une soudaine flambée intérieure de violence, elle laisse éclater sa rage en détruisant des arbustes avec un branchage ramassé par terre. Après quelques secondes, elle se recompose et reprend son quant-à-soi. Un moment qui fait froid dans le dos, tant les évènements accumulés ont permis au public d’épouser son point de vue la distance de la caméra laisse le public profiter du coté soudain et incontrôlable de (court) accès de colère.

Il était sans doute ambitieux de conter ce drame domestique, de montrer subtilement l’adultère, l’abandon, le sacrifice de la femme qui décide de retourner chez sa mère, tout en lui donnant raison. Mais Griffith, sans doute enivré par la performance de son actrice, a étoffé son film, et l’a prolongé au-delà des limites de la bobine: il dure 23 minutes. Le metteur en scène a fait construire un décor spectaculaire, afin de montrer la genèse de l’adultère : le mari et la femme sortent dans un lieu de plaisir un peu canaille, et la jeune femme est mal à l’aise devant l’atmosphère enfumée et avinée, mélange de sophistication et de vulgarité, symbolisée par des danses toutes plus ridicules les unes que les autres (danses de nymphes en toge, danse apache à la Feuillade, etc…). Ces scènes, qui établissent la rencontre de l’homme avec sa future maitresse, sont assez maladroites: le montage n’aide pas l’éparpillement de l’attention du spectateur, et elle soulignent à trop gros trait les différences entre l’innocence charmante et le coté « prostituée » de la maitresse : c’est donc d’un Griffith moraliste qu’il s’agit; on s’en serait passé, tant le drame vécu sous nos yeux par Lillian Gish est entièrement captivant et suffisant.

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Published by François Massarelli - dans David Wark Griffith Muet Lillian Gish
19 février 2023 7 19 /02 /février /2023 17:50

Tourné en novembre 1912 à Fort Lee, après Oil and water (le premier «deux bobines» depuis Enoch Arden), The Massacre ne sortira qu’en février 1913. Il deviendra, à sa façon, un classique du western, et doit sans doute cette position enviable à sa construction: mélange de mélodrame, de drame historique, de film d’aventures, Griffith ne choisit jamais et pose les jalons des ingrédients futurs du western.

Il me déçoit toutefois, par la manipulation un peu trop voyante utilisée par le metteur en scène pour nous impliquer dans une scène de bataille déjà anthologique; le film nous conte en effet deux histoires: le départ vers l’ouest de l’héroïne jouée par Blanche Sweet et son mari interprété par Charles West, d’une part, et les pérégrinations fatales d’un régiment de Cavalerie mené par un officier à la Custer, dont un ancien prétendant de Blanche Sweet est l’un des scouts (Un guide civil, pas un ridicule gamin en uniforme), joué par Wilfred Lucas.

Le prologue, comme d’habitude, est centré sur Blanche afin de capter le public, et l’impliquer jusqu’au bout; de fait, lorsque le simili-Custer a mené l’attaque sur un village indien, et doit subir les représailles à ce qui pourrait bien être Little Big Horn, les gens de la caravane dont font partie Blanche et son mari sont avec la cavalerie, et ces pionniers vont eux aussi subir l’attaque fatale. Le suspense est lié à la question suivante: le mari de l’héroïne préviendra-t-il les secours à temps pendant que Blanche et son enfant, protégés par les cavaliers (et le scout, dont le sens du sacrifice est souligné) courent un danger particulièrement mortel?

Non que je refuse ma part de suspense lorsqu’elle m’est donnée, mais les incohérences du récit, le côté collage (« Bonjour, amis pionniers. Nous venons de massacrer des femmes et des enfants, leurs maris doivent le savoir à présent, et ils ne sont sûrement pas contents. Vous joignez-vous à nous ? –D’accord. »), et la frustration du spectateur que je suis de voir Griffith lâcher en plein vol le sujet qu’il avait abordé (nommément, le massacre de Washita, qui pré-data Little Big Horn de quelques années: il s’agissait effectivement de l’acte de barbarie qui sera à la base de la fédération de plusieurs tribus -un cas unique dans l’histoire des Amérindiens- qui entraînera une victoire spectaculaire contre Custer): la description du massacre par la cavalerie des femmes, des vieillards et des enfants est montrée ici sans ambiguité, avec tout le savoir-faire dont Griffith pouvait faire preuve, tant dans le montage que dans le dosage de ce qu’il faut voir et de ce qu’on peut suggérer. Mais l’indignation soulevée par l’anecdote ne débouche que sur le coté mécanique des représailles…

C’est tout Griffith: il soulève des problèmes, il pose des questions, mais n’y apportera pas de réponse. D’ailleurs, je me permets moi aussi de soulever une question, sans y apporter non plus de réponse: de quel massacre nous parle le titre de ce film ambigu? Le film est très distrayant, et le suspense marche à fond, c’est bien le principal.

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Published by François Massarelli - dans David Wark Griffith Muet Western
18 février 2023 6 18 /02 /février /2023 12:03

Passé aux Etats-Unis après son travail en Italie, Marcel Perez transpose dans le comique à l'Américaine ses petites frasques conjugales, et autres déboires sentimentaux. Ici, il se situe sur un terrain déjà marqué par les films de Roscoe Arbuckle:

Sur une ferme, les parents souhaitent marier leur fille à un de leurs employés, mais elle n'approuve pas leur choix, et voudrait plutôt se marier avec l'autre (Marcel Perez). La réaction des parents est sans équivoque: non, il est hors de question qu'elle épouse ce fainéant... La lutte est donc sans merci...

Le film ne s'embarrasse ni d'une exposition, ni de subtilité, et on sent ici une volonté de souligner en permanence le geste, saisi dans toute sa lumière et sa clarté. A mi-chemin entre la pantomime et une version très grotesque de la comédie de moeurs telle qu'elle se fabriquait à l'époque chez Mack Sennett. Perez ferait mieux, beaucoup mieux.

Pour finir, on passe tout le film (qui dure 12 minutes) avant de comprendre l'allusion du titre à une baignoire...

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Published by François Massarelli - dans Muet Marcel Perez
18 février 2023 6 18 /02 /février /2023 11:47

L'épouse (Nilde Baracchi) de Robinet (Marcel Perez) sort... Il la suit jusque dans une maison, dont il va visiter tous les étages, tombant à chaque fois sur des appartements dédiés à des activités bien spécifiques: un dentiste (qui va lui arracher une dent), un entraîneur de boxe (qui manque de l'assommer avant de lui réclamer de l'argent pour la leçon) et un institut de culture physique qui va prodiguer de façon musclée des soins au héros, qui n'en a pas tant demandé... Et à chaque fois, après chaque déconvenue, le vaillant jaloux continue à chercher son épouse pour résoudre le mystère de sa sortie secrète...

C'est merveilleux: un film burlesque dans lequel le parti-pris a été de ne jamais choisir entre une ligne narrative claire et rigoureuse (trouver où se rend l'épouse), et des digressions loufoque et énergiques... Le metteur en scène a aussi adopté une rigueur visuelle notable dans ses scènes pour montrer la progression de Robinet dans l'escalier de la maison, où chaque étage sauf le dernier ressemble au précédent, et d'ailleurs il ne serait pas étonnant que ce soit toujours le même étage!

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Marcel Perez
18 février 2023 6 18 /02 /février /2023 11:37

Comme le titre l'indique, Robinet (Marcel Perez) ne peut respirer, il est tellement adoré de son épouse (Gigetta Morano) qu'elle le colle en permanence; et comme lui aimerait tant sortir seul (c'est-à-dire disponible pour des aventures), il trouve la vie impossible. Quand il sort elle le suit et le colle tant et si bien qu'il lui est impossible de mener des travaux d'approche avec une jeune femme. Il va lui falloir trouver un stratagème...

Le film est entièrement raconté du point de vue du couple légitime, avec un fort accent sur le point de vue de Robinet lui-même. Le problème du personnage n'est pas incarné dans l'adultère qui semble aller de soi, ni dans l'éventuelle jalousie de son épouse (elle l'aime tellement, qu'elle lui passe tout!), mais dans le simple aspect physique, le fait qu'elle le colle au point où il ne peut respirer...

Bref, c'est situé quelque part entre le loufoque et une certaine cruauté, qui se manifeste surtout dans la séquence finale: pour se débarrasser d'elle, Robinet a enfermé son épouse dans un placard! Et une fois qu'elle a fini de se lamenter sur son sort, elle commence à caresser les costumes de son mari, puis tant qu'à faire, à les brosser, histoire de ne pas perdre son temps...

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Published by François Massarelli - dans Muet Marcel Perez
18 février 2023 6 18 /02 /février /2023 11:02

Paris, 1900, on fait la connaissance de Gigi (Leslie Caron), fille d'une cantatrice (qu'on ne verra jamais) et dont l'éducation a été largement confiée à sa grand-mère (Hermione Gingold) et sa grand-tante (Isabel Jeans). Ces deux-là sont des légendes du tout-Paris, des cocottes, ou demi-mondaines: pas des prostituées, non, mais des poules de luxe, des femmes dont le destin évident est d'être entretenues. Et justement, Gigi est éduquée dans ce sens...

Nous faisons aussi la connaissance de Gaston Lachaille (Louis Jourdan), le neveu d'Honoré Lachaille (Maurice Chevalier): Gaston est riche, établi, séduisant, mais tout l'ennuie... Sauf les conversations avec Gigi. Sous l'oeil d'Honoré, rompu aux coutumes de la bonne société (c'est-à-dire grand séducteur lui-même, et constamment vu aux bras d'une ravissante créature ou deux), les deux jeunes gens s'aiment, mais sans nécessairement s'en apercevoir. Leur amour triomphera-t-il des convenances paradoxales d'une société qui accepterait d'eux qu'ils aient une certaine promiscuité, mais pas qu'il se marient?

Je vais le dire de suite: je n'ai jamais adhéré à ce film, qui a tout du chef d'oeuvre officiel: Oscar 1958 du meilleur film, récompenses en pagaille, sélection automatique au festival de Cannes, et un pedigree impressionnant, en tant que dernière superproduction musicale de Arthur Freed pour Minnelli (leur unique collaboration ultérieure, Bells are ringing en 1960 serait nettement plus modeste), et par dessus le marché des extérieurs systématiquement tournés à Paris... 

Le choix de Minnelli pour le tourner s'imposait, en raison des affinités (déjà explorées partiellement dans An American in Paris) du réalisateur pour la période de l'impressionnisme, et la profonde marque de ce style sur l'imagerie du Paris de 1900... Et c'est d'abord en tant que peintre que le metteur en scène a conçu son approche sur ce film, aux costumes, comportements, et jusqu'aux coiffures, impeccables. Cette histoire qui a tout pour être scandaleuse mais ne l'est pas tant que ça, passe d'abord par les salons, où l'on se montre, et les rues, où l'on voyage en voiture à chevaux. On a rarement aussi bien montré une période au cinéma, et avec tant de goût.

Mais voilà, on a beau dire, on a beau faire, impossible de s'intéresser à Gigi et Gaston, impossible de ne pas bailler d'ennui, sauf quand un détail nous fait relever la tête, comme ces soudains arrêts de eu chez Maxim's, qui accompagnent le boniment de l'oncle Honoré, montrant qui s'affiche avec qui... Ou ces quelques conversations relevées entre Isabel Jeans, survoltée, et le reste de l'humanité... Les chansons lassent, le ton très "chic Parisien, revu et corrigé par Hollywood", agace, et l'accent Français de certains protagonistes me hérisse le poil. Donc c'est beau, pas plus.

Mais c'est déjà ça, non?

 

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Published by François Massarelli - dans Musical Vincente Minnelli
17 février 2023 5 17 /02 /février /2023 17:02

Comme les autres films de Perez déjà mentionnés ici, ce film a été tourné à Paris, mais pour le compte de la société Ambrosio, une maison Italienne de production qui tentait de s'imposer sur le marché Européen face aux géants Gaumont et Pathé. D'autres compagnies, comme Lux, ou Itala films, faisaient le même pari, en débauchant parfois d'anciennes vedettes des deux compagnies phare de l'hexagone: c'est comme ça que André Deed est parti faire carrière en Italie, par exemple...

Ce film est assez simple: on assiste d'abord à une scène dans un intérieur bourgeois, lorsque Madame (Nilde Baracchi) voit monsieur (Ernesto Vaser) prendre congé... Robinet (Marcel Perez) attend dehors que la voie soit libre... Mais une fois l'amant dans la place le mari revient: Robinet trouve des vêtements, et se déguise en jeune femme. Il est escorté jusque dans la rue par le mari, manifestement séduit...

Il me vient, quant à ce film et cette situation (qui est ensuite exploitée jusqu'au bout, Robinet étant, sous le déguisement d'une femme, reconduit chez lui par un escadron de gendarmes sous le charme), la réflexion suivante: dans la comédie burlesque, les acteurs ont tous sacrifié à la mode du travesti, de Keaton à Lloyd, en passant bien sûr par Arbuckle, Stan Laurel, et Oliver Hardy. Si à chaque fois l'effet produit sur les hommes semble aller à l'inverse du ridicule achevé du déguisement, il y a une exception, à savoir Chaplin: quand dans A woman il se déguise (sacrifiant sa moustache au passage), il est plus que troublant, et il devient une femme. 

Pas Robinet.

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Published by François Massarelli
17 février 2023 5 17 /02 /février /2023 16:51

Robinet (Marcel Perez) parade devant sa bonne, clairement amoureuse de lui: il va se rendre en ville dans son plus beau costume, et il est tellement blanc qu'il luit... 

Et là, tout de suite, on sait: il va se salir. Ou alors... On espère un de ces petits miracles, comme le fait que Stan Laurel, au beau milieu d'une tempête de tartes à la crème (The battle of the century, 1927), restera incompréhensiblement indemne, son costume et sa mise épargnées, alors qu'il est quand même vaguement responsable du chaos autour de lui...

Mais on est déçu, car Robinet, très vite, est confronté à des choses salissantes. Et le film a beau être court, très court (moins de six minutes), on s'impatiente, car on se dit qu'on na va rien voir d'autre qu'un type qui va continuer à maculer de choses dégoûtantes, un costume qui est déjà tout sale! 

Sauf qu'on a tort. Pourquoi? Voyez le film, voyons!

Sinon, j'avais déjà signalé, à propos d'un autre film, ces petits riens que Perez demandait à ses partenaires, qui créent tout un univers à partir de pas grand chose: la bonne dans la première scène est absolument adorable avec ses sentiments tellement forts qu'ils sont écrits su son visage...

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Published by François Massarelli - dans Marcel Perez Muet