C'est l'été, au Danemark sur les bords de la Mer du Nord, et deux vagabonds (Fy et Bi, ou Doublepatte et Patachon) ont trouvé une combine intéressante pour se faire de l'argent: ils "photographient" les gens avec une boîte en carton vide, et se font payer les clichés en avance, avant de disparaître. Pour commencer, ils escroquent quelques jeunes femmes sur la plage, en prenant une série de "photos", mais finissent par ne pas avoir assez pour régler la note de restaurant... La patronne (Stina Berg) prend alors une décision inattendue: elle les sépare, et garde le plus petit (Harald Madsen) en otage, à charge pour l'autre (Carl Scenström) de revenir et de trouver de quoi payer la note. Mais quand il revient, il a la surprise de constater que son copain va bien, très bien même. On ne peut pas en dire autant de lui...
Pendant ce temps, dans le restaurant, deux drames se jouent: d'une part le comte local (Viggo Wiehe) a perdu il y a des années toute trace de son fils, or celui-ci a séjourné dans la même pension de famille que nos amis, et il y a laissé des traces... d'autre part la patronne emploie une jeune femme, Grethe (Grethe Rutz-Nissen, future Greta Nissen), qui est convoitée par deux jeunes sympathiques motards. Sympathiques? Disons que l'un (Gorm schmidt) est très bien, mais l'autre (Victor Montell)... il tente de forcer la main de la jeune femme, et le deux hommes se battent...
Avec ce film, plutôt réussi, Lauritzen casse le moule de ses films, sans toutefois totalement déroger à ses traditions. Pour commencer, il sépare les deux héros, et c'est étonnant de voir que le film devient presque une aventure en solo pour le petit Harald Madsen, qui retenu en otage, devient carrément l'amant de la patronne du restaurant! Il va même prendre les choses en main, et régler l'histoire d'amour quand elle dérape à cause du jeune félon! Ce qui n'enlève rien au sel des mésaventures hilarantes du contorsionniste de génie qu'était Schenström: il essaie de "prendre en photo" un boucher pendant qu'il dévalise sa camionnette, et quand celui-ci s'en aperçoit, il voit rouge: le plan durant lequel le vagabond se fait rouer de coups a été chorégraphié avec génie... Et plus tard, réduit à trouver les pires moyens de subsistance, il se retrouve à interpréter le chaînon manquant dans un cirque... Il est très convaincant.... dans une scène particulièrement raciste, n'ayons pas peur des mots!
Lauritzen fait comme il le faisait d'habitude pour ces premières comédies du duo vedette: tournage en été, le plus près possible de la mer, avec une prédilection pour les séquences en plein soleil. Parmi ses passages obligés, il se livre à l'inévitable débauche de jeunes femmes en maillot de bain, et à une poursuite entre les deux rivaux, en moto cette fois. Il se dégage de toute façon de ces films particulièrement bien éclairés et très soignés, une impression de bonheur inattendue pour un habitué du cinéma Danois des origines! Et Lauritzen se laisse volontiers aller à donner à la future Greta Nissen une séquence "petite sirène" d'une coquinerie très assumée, l'ayant déshabillée allègrement, ce que ses films Hollywoodiens ne se permettront pas.
Pour finir, il existe deux copies du film à peu près complètes qui ont circulé sur internet, l'une sur le site du cinéma muet danois (https://www.stumfilm.dk/stumfilm/streaming/film/16073) et l'autre qui a été brièvement disponible sur la page Vimeo du DFI. Cette dernière est sonorisée, et possède un montage différent, ainsi que des séquences exclusives (près d'une bobine entière au début du film). Elle est aussi plus éclairée. Ce remontage, à en juger par le son, a du être fait dans les années 30 ou 40...