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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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15 janvier 2025 3 15 /01 /janvier /2025 22:25

C'est l'été, au Danemark sur les bords de la Mer du Nord, et deux vagabonds (Fy et Bi, ou Doublepatte et Patachon) ont trouvé une combine intéressante pour se faire de l'argent: ils "photographient" les gens avec une boîte en carton vide, et se font payer les clichés en avance, avant de disparaître. Pour commencer, ils escroquent quelques jeunes femmes sur la plage, en prenant une série de "photos", mais finissent par ne pas avoir assez pour régler la note de restaurant... La patronne (Stina Berg) prend alors une décision inattendue: elle les sépare, et garde le plus petit (Harald Madsen) en otage, à charge pour l'autre (Carl Scenström) de revenir et de trouver de quoi payer la note. Mais quand il revient, il a la surprise de constater que son copain va bien, très bien même. On ne peut pas en dire autant de lui...

Pendant ce temps, dans le restaurant, deux drames se jouent: d'une part le comte local (Viggo Wiehe) a perdu il y a des années toute trace de son fils, or celui-ci a séjourné dans la même pension de famille que nos amis, et il y a laissé des traces... d'autre part la patronne emploie une jeune femme, Grethe (Grethe Rutz-Nissen, future Greta Nissen), qui est convoitée par deux jeunes sympathiques motards. Sympathiques? Disons que l'un (Gorm schmidt) est très bien, mais l'autre (Victor Montell)... il tente de forcer la main de la jeune femme, et le deux hommes se battent... 

 

Avec ce film, plutôt réussi, Lauritzen casse le moule de ses films, sans toutefois totalement déroger à ses traditions. Pour commencer, il sépare les deux héros, et c'est étonnant de voir que le film devient presque une aventure en solo pour le petit Harald Madsen, qui retenu en otage, devient carrément l'amant de la patronne du restaurant! Il va même prendre les choses en main, et régler l'histoire d'amour quand elle dérape à cause du jeune félon! Ce qui n'enlève rien au sel des mésaventures hilarantes du contorsionniste de génie qu'était Schenström: il essaie de "prendre en photo" un boucher pendant qu'il dévalise sa camionnette, et quand celui-ci s'en aperçoit, il voit rouge: le plan durant lequel le vagabond se fait rouer de coups a été chorégraphié avec génie... Et plus tard, réduit à trouver les pires moyens de subsistance, il se retrouve à interpréter le chaînon manquant dans un cirque... Il est très convaincant.... dans une scène particulièrement raciste, n'ayons pas peur des mots!

Lauritzen fait comme il le faisait d'habitude pour ces premières comédies du duo vedette: tournage en été, le plus près possible de la mer, avec une prédilection pour les séquences en plein soleil. Parmi ses passages obligés, il se livre à l'inévitable débauche de jeunes femmes en maillot de bain, et à une poursuite entre les deux rivaux, en moto cette fois. Il se dégage de toute façon de ces films particulièrement bien éclairés et très soignés, une impression de bonheur inattendue pour un habitué du cinéma Danois des origines! Et Lauritzen se laisse volontiers aller à donner à la future Greta Nissen une séquence "petite sirène" d'une coquinerie très assumée, l'ayant déshabillée allègrement, ce que ses films Hollywoodiens ne se permettront pas.

Pour finir, il existe deux copies du film à peu près complètes qui ont circulé sur internet, l'une sur le site du cinéma muet danois (https://www.stumfilm.dk/stumfilm/streaming/film/16073) et l'autre qui a été brièvement disponible sur la page Vimeo du DFI. Cette dernière est sonorisée, et possède un montage différent, ainsi que des séquences exclusives (près d'une bobine entière au début du film). Elle est aussi plus éclairée. Ce remontage, à en juger par le son, a du être fait dans les années 30 ou 40...

 

 

 

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Lau Lauritzen Schenström & Madsen Muet 1923
11 janvier 2025 6 11 /01 /janvier /2025 17:19

Un soir, les deux vagabonds Doublepatte (Carl Schenström) et Patachon (Harald Madsen) rencontrent dans une taverne un jeune homme, Per Hammer (Gorm Schmidt), qui boit pour essayer de se remettre d'un chagrin d'amour: sa fiancée est partie précipitamment, emmenée au loin par son père qui désapprouvait leur possible union... Mais après une soirée de beverie mémorable, les deux amis qui squattent un container sur le port de Comenhague, sont emportés jusqu'en montagne... Ils vont avoir la surprise de tomber, si j'ose dire, sur Ellen (Violet Molitor), la petite amie disparue, qui vient de s'enfuir de chez son père...

Ce film est réduit à moins d'une demi-heure, et on peut émettre l'hypothèse que cette demi-heure corresponde en fait à ce qui a été diffusé par la télévision Allemande, qui proposait dans les années 70 des programmes sonorisés de versions abrégées des comédies du duo. Cette abréviation a-t-elle été la cause de la perte de plus de la moitié des 1920 mètres du film, ou cette perte a-t-elle poussé les producteurs de l'émission à produire pour une fois une version intégrale en l'état d'un film de Lauritzen? Il ne m'appartient évidemment pas de répondre à cette interrogation probablement peu importante. Mais on déplore qu'un film comme celui-ci puisse avoir perdu une bonne part de son métrage, ce qui reste assez courant pour les films Danois de Doublepatte et Patachon du reste...

Ce qui manque? D'une part, je suis sûr qu'il y a eu suppression d'une bonne partie du flash-back déclenché lorsque Violet Molitor commence à raconter ses mésaventures avec son père. Et sinon, toute la résolution du drame: en l'état le film montre surtout l'essentiel des trente premières minutes! Et des séquences disjointes et assez illogiques qui lui servent de final.

C'est dommage, pour deux raisons: la première est que pour une fois, on n'a pas d'intrigue répétitive située en été, près de la mer, avec des hordes de jeunes femmes en maillot, ni le faciès peu ragoûtant d'Oscar Stribolt! Le film, qui est probablement une co-production avec la Suède (Violet Molitor est Suédoise) a été tourné en montagne, dans la neige, et il est splendide... La photo d'Hugo Fischer en particulier profite avec élégance des décors naturels. On se doute, au vu de ses méthodes de travail, que Lauritzen allait bientôt alterner les films d'été et les films d'hiver!

L'autre avantage, lié bien sûr, est que cette fois, contrairement à ce qui reste des films précédents, on voit bien que les deux acteurs stars ont été replacés au centre de l'intrigue, et... la neige les sert bien! L'un comme l'autre ne perdent pas une occasion de placer des gags physiques, parfaitement exécutés. Et lors de leur arrivée en montagne, les deux hommes ont même droit à une superbe scène de suspense dans une série de tunnels, avec un train à leur poursuite...

 

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Published by François Massarelli - dans Lau Lauritzen Schenström & Madsen Muet 1923
11 novembre 2024 1 11 /11 /novembre /2024 17:24

Une petite localité tranquille, une nuit: à minuit, le sacristain reçoit un coup de téléphone, une voix de femme, puis on entend un coup de feu. Un homme d'affaires, Erland, a été tué. Une femme, l'actrice Mimi Brandt (Karina Bell), l'arme du crime à la main, s'accuse... Avec elle, le jeune comte Braa (Gorm Schmidt), son amant, s'accuse aussi... Le procureur Steen (Elith Reumert) a fort à faire pou dénouer l'intrigue, qui a commencé quelques temps plus tôt quand Erland a commencé à approcher Mimi pour lui parler d'un héritage dont elle serait bénéficiaire...

C'est un whodunit! Vous savez, ce film qui vous fait réfléchir longuement avant de vous révéler que c'est le jardonier qui a fait le coup! Généralement, c'est un exercice assez vain, mais les films peuvent aussi être réhaussés d'un peu de comédie ou d'atmosphère...

Pour le procureur comme pour nous, puisque les témoignages des deux seuls protagonistes qui apparemment savent quelque chose nous sont certes donnés, mais à chaque fois ils sont adroitement ciblés de manière, on le comprend très vite, à éviter d'en dire trop. La question inévitable, c'est bien sûr de deviner lequel des deux tourtereaux ment pour couvrir l'autre... Ce que comprend Steen assez rapidement.

Anders Sandberg savait tout faire et avait une bonne maîtrise de tous les genres... Dans un cadre raisonnable s'entend, et cette histoire sentimentalo-policière lui convient plutôt pas mal, avec ses arrières-goûts de mélodrame sentimental. Les ingrédients en sont tous cochés: le père conservateur du jeune homme, l'indignité de se montrer en public avec une actrice, le vieil homme d'affaires franchement libidineux... 

Ce n'est en aucun cas un film à message, juste un film de genre, bien fait et plutôt bien interprété, avec savoir-faire sinon brio, et avec quelques touches d'humour fournies par les domestiques, dont Mathilde Nielsen, qui tournera deux ans plus tard avec Dreyer dans Le maître du logis...

 

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Published by François Massarelli - dans Muet 1923 A.W. Sandberg
30 avril 2024 2 30 /04 /avril /2024 09:47

Un propriétaire bourgeois a décidé de marier sa fille à un monsieur très comme il faut, de la bonne société danoise, mais sa fille éyant de son côté jeté son dévolu sur un peintre sans le sou, il y a un conflit en perspective... Lorsque le "monsieur" en question fait son apparition, les deux amoureux trouvent des idées pour gagner la confiance du père... Pendant que le monsieur de la ville se révèle être un séducteur de très bas niveau...

Quand Lau Lauritzen a commencé à travailler avec ses acteurs fétiches Carl Schenstrom et Harald Madsen, il a délaissé tout un pan de la comédie à la Danoise, dans lequel il s'illustrait auparavant: ce film d'un autre, metteur en scène de deux films sur la décennie uniquement, en reprend les contours, tout en faisant appel à Oscar Stribolt, un fidèle de Lauritzen, qu'on aperçoit aussi dans Häxan de Christensen... Une grande vedette de la comédie danoise à la rotondité impressionnante, Stribolt n'est pas ce qu'on pourrait appeler un acteur subtil. Le film n'est pas non plus très sophistiqué...

On y décèle des tendances qu'on retrouve dans les comédies de Lauritzen: diviser le monde entre les jeunes gens purs aux intentions probablement gentiment coquines, mais on leur pardonne (la première fois qu'on voit les amoureux, ils sont dans un pré, avec des habits blancs et sont en train de jouer avec des agneaux...), et d'autre part des gens aux intentions peu orthodoxes, comme ce bourgeois tellement laid et emprunté, qui devient carrément libidineux dès qu'il aperçoit la bonne... Mais quand Lauritzen utilise ces ficelles dans ses films des années 20, il n'en fait pas forcément l'argument prinipal, puisqu'il a ses deux acteurs fétiches pour capter l'attention...

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Published by François Massarelli - dans Muet 1923
20 septembre 2023 3 20 /09 /septembre /2023 18:08

A la cour d'Espagne, Dom César de Bazan (Antonio Moreno) est un noble dont la fortune a subi de sérieux revers... Lors d'un dîner accordé à la cour par le roi Philippe (Wallace Beery), César tombe amoureux d'une gitane... mais il se fait aussi voler tout l'argent qui lui reste et ne peut empêcher une saisie. Mais la belle gitane, Maritana (Pola Negri), lui ramène (un peu tard) son bien. Elle a aussi tapé dans l'oeil d'un certain nombre de personnages, donc le roi, un sacré coquin... César et Maritana sont partis pour de picaresques aventures au milieu d'intrigues de cours toutes plus rocambolesques les unes que les autres...

Quand Ernst Lubitsch et sa complice Pola Negri sont arrivés aux Etats-Unis, en 1923, suite au succès de leurs films Allemands communs, ils se sont tous deux lancés dans une adaptation de la pièce de théâtre Dom César de Bazan, d'Ennery et Dumanoir. Mais c'étaient deux films différents: l'un, celui-ci, était une spectaculaire production Paramount qui s'intéressait à tous les aspects fastueux du grand spectacle simili-historique, l'autre, Rosita, était une production United Artists de Mary Pickford, mise en scène par Lubitsch, et qui occasionnera (à tort) des regrets à l'actrice. Celle-ci regrettera d'avoir tourné un film trop intime, situé dans le cadre d'une histoire d'amour entre un prince et une danseuse...

Ici, c'est en effet le faste qui domine, mais on a le sentiment que Brenon cherche par tous les moyens à donner au public ce qu'il veut... Et globalement y parvient. Sans jamais trop se prendre au sérieux (et la pièce originale d'ailleurs, démarquage de Ruy Blas comme le serait La Folie des Grandeurs de Gérard Oury, n'était pas à proprement parler une tragédie), le film accumule les coups de théâtre à loisir... Negri est excellente, énergique et mutine mais parfois aussi tentée par le drame. Moreno sait parfaitement ne pas se prendre trop au sérieux et est engageant en héros à l'épée chatouilleuse. La photo est signée du grand James Wong Howe (qui signait encore seulement "Howe"), ce qui est un gage de beauté... La réalisation n'est pas notable par des scènes mémorables, mais Brenon fait bien son travail. Il y a uand même des séquences de foule... que Lubitsch aurait probablement adoré tourner...

 

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Published by François Massarelli - dans Herbert Brenon Muet 1923 **
11 août 2023 5 11 /08 /août /2023 14:32

Paris (?)... Un homme (Eugen Klöpfer), abattu par la routine, est effondré dans un canapé, pendant que sa femme (Lucie Höfflich) s'active aux tâches ménagères dans leur intérieur exigu. Au plafond, tout à coup, des ombres fantastiques, projections de la vie de la rue, se font insistantes et l'homme ne résiste pas à l'appel du dehors... 

Un aveugle (Max Schreck) vit avec son petit-fils dans la misère. Quand l'aveugle sort, son petit-fils lui donne tout ce dont il a besoin (son chapeau, sa veste, sa canne) puis l'accompagne dehors. Il le guide...

Le premier rencontrera une prostituée, et des ennuis à n'en plus finir. L'autre, avec son petit-fils, verra sa vie basculer quand un incident le fera lâcher la main du petit... 

C'est un de ces films expérimentaux de l'avant-garde la plus remuante des années 20, celle du cinéma Allemand. L'idée de Grune était d'utiliser le cinéma pour représenter une nuit, à travers les déambulations nocturne d'un certain nombre de personnages. En une bobine, le film nous a présenté des types plus que des personnages, et rpose sur un certain nombre de clichés établis du cinéma, la grande ville/la rue comme tentatrice, fournissant plus de désir et d'ennui que de plaisir; les types dont il est question (bourgeois, prostituée, vieillard, etc) se comportent comme il est attendu d'eux dans le cadre d'une seule nuit, et l'histoire est contée avec un minimum d'intertitres (et non sans un seul intertitre comme il est souvent mentionné à propos du film, ainsi que de Der letzte Mann.

Le cadre est assez réaliste, dans l'ensemble, on est loin de l'expressionnisme de Caligari... Parmi les protagonistes, on reconnaîtra des habitués des films des grands noms de l'écran Allemand: Aud Egede-Nissen, qui passait de Reinert à Lang et de Lubitsch à Murnau; Max Schreck, le Nosferatu et un des conspirateurs des Finances du grand duc de Murnau; et enfin, Eugen Klöpfer est apparu dans l'un des rôles principaux de Terre qui flambe de Murnau.

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Published by François Massarelli - dans Muet 1923 ** ...Jusqu'à l'aube
29 juin 2023 4 29 /06 /juin /2023 18:00

Un chiot qui est tombé d'un traineau, dans le Grand Nord Canadien, est secouru par une meute de loups... Des années plus tard il devient ami avec un trappeur, Gabriel Dupré (Walter McGrail). La petite amie de celui-ci (Claire Adams) est courtsée par un sale type, (Pat Hartigan) qui tente de se débarrasser de Gabriel...

C'est le troisième film de la franchise qui a sauvé la jeune compagnie des frères Warner alors qu'ils se lançaient dans une jungle de studios devenue plus agressive que jamais à l'orée des années 20... Il fait partie de la poignée de films qui ont survécu, et s'il ne s'agit pas à proprement parler d'un film qui changera notre vie, la réalisation du déjà vétéran Chester Franklin, et l'interprétation d'acteurs rompus au mélodrame de série, sont tout à fait adéquats.

Et le film participe d'une mode assez importante à l'époque (The trap, Back to God's country...) de films situés dans les forêts immense, et les zones sauvages du Nord Canadien. Il fait usage avec goût de décors naturels (probablement le Nord de la Californie) mélangés à des décors de studio... Il y a beaucoup d'énergie, et bien sûr le clou du spectacle est la prestation du chien Rin-tin-tin, qui sera accusé de tous les maux (il est un chien-loup, ici), considéré par les uns comme un valeureux ami de l'homme et par les autres comme un empêcheur d'escroquer et de séduire en rond...

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Published by François Massarelli - dans Muet Chester Franklin 1923 Arf! **
19 février 2023 7 19 /02 /février /2023 18:14

Que reste-t-il de Pierre Benoît, écrivain daté? On se rappelle à peine que cet auteur éminemment populaire, a symboliquement eu l'honneurs d'être le premier publié par la désormais mythique collection le Livre de Poche, avec justement, le roman Koenigsmark, qui portait sur la tranche, en bas, le numéro 1... 

En fait, c'est un peu comme Rafael Sabatini, ou Vicente Blasco Ibanez: ce qui reste de Pierre Benoît, eh bien, ce sont des films adaptés de son oeuvre, et fièrement ancrés dans le muet. L'Atlantide était, réalisé par Jacques Feyder, un film spectaculaire pour la cinématographie française en 1921... Koenigsmark, de son côté, a été réalisé par Léonce Perret, revenu en 1922 en France après un séjour de cinq années aux Etats-Unis. Mais jamais il n'avait bénéficié de tels moyens, et pour cause: la Paramount, peut-être intéressée de disposer d'une oeuvre ambitieuse d'un metteur en scène qui avait impressionné la profession, a copieusement aidé la production de ce film, en échange d'un contrat exclusif de distribution...

Dans le royaume de Mégranie, une guerre silencieuse de succession se prépare, avec ses alliances: on donne comme épouse à Rodolphe (Henry Houry), Grand Duc de Lautembourg (et principal héritier potentiel du trône) la princesse de Tumène, Aurore (Huguette Duflos), bien que celle-ci ne fasse pas mystère de sa désapprobation... Devenue Grande-Duchesse de Lautembourg, elle reste ferme sur son refus de considérer son mariage comme autre chose qu'un arrangement symbolique et se refuse à son mari. Celui-ci part pour une mission officielle au Cameroun, où il envisage de chasser. Son frère Frédéric (Georges Vaultieri) en profite pour fomenter un assassinat, le plan étant d'épouser ensuite la veuve de son frère (qui deviendrait en cas de disparition de son mari l'héritière du trône de Mégranie). Mais une fois le mari mort, Aurore ne veut pas entendre parler de remariage...

Pendant ce temps, un précepteur français est arrivé pour donner des leçons au jeune fils de Frédéric: Raoul Vignerte (Jacque-Catelain) est poète, mais il n'a pas beaucoup de succès, et a accepté ce poste prestigieux en attendant, d'autant qu'il lui permettra de mener dans la prestigieuse bibliothèque de Lautembourg des recherches sur un mystère vieux de plusieurs siècles. A peine aura-t-il rencontré Aurore, qu'il en tombera amoureux...

Quelle salade, croit-on pouvoir dire... Et pourtant le film est remarquable de lisibilité inattendue, devant ce foisonnement d'intrigues et de digressions; le scénario, auquel Perret a activement participé, lui a permis de poser dans une progression très rigoureuse, tout ce dont il avait besoin dans son film à la durée il est vrai imposante: 175 minutes...

Et on a rarement vu un film aussi fourni en péripéties, justement: des intrigues de couloir en veux-tu en voilà, des traîtres, des manipulateurs, des sbires, des espions, des espionnes, un soupçon marqué d'une sous-intrigue secrète avec une dame de compagnie dont l'amour pour son amie d'enfance, amour déçu bien entendu, la poussera à commettre une odieuse trahison, et un professeur solitaire qui mène une enquête pour résoudre une énigme vieille de 250 ans, mais se retrouve sans logique apparente devant un cadavre, dans un passage secret en pleine nuit et enfin un incendie, sans parler du déclenchement de la première guerre mondiale! C'est dire si ce film est riche. Mais je le répète, rien ici n'échappe à la lisibilité... Tout y est balisé, richement, et la prouesse est que les coutures ne se voient pas. Perret y utilise avec bonheur les signes et les détails qui dressent pour le spectateur un parcours logique: le livre historique que prépare Vignerte va le confronter logiquement à un cadavre, prouvant par un ensemble de détails l'assassinat du Grand Duc Rodolphe; un dessin, décalqué par le fils de Frédéric, va permettre par un enchaînement de circonstances, de découvrir l'un des modes opératoires du crime. Cette succession de moments signifiants, enchaînés avec adresse, m'autorisent à penser qu'avec ce film, Perret s'est hissé au niveau d'un Stroheim... Et un Erich Von Stroheim qui cette fois-ci aurait réussi à rester le maître sur son film!

L'interprétation, confiée (cinéma français oblige) à de solides acteurs plus qu'à des stars, est largement fonctionnelle, et permet à Perret de passer de l'aventure pure, à une certaine ironie, à des notations flamboyantes de patriotisme digne (la guerre était encore dans tous les esprits). Certes, Jacque Catelain, et Ivan Petrovitch qui joue ici un second rôle un peu à la Rupert Von Hentzau, ne sont pas Ivan Mosjoukine. Mais ils rendent justice à leurs personnages, et servent parfaitement le dessein du film... On regrettera que les personnages qui auraient pu être les plus intéressants soient un peu escamotés par l'intrigue: Raoul et son amour pour rien, et la trouble Mélusine dont la passion tangible pour son amie reste passée sous silence. Par contre le traitement de l'image, par un réalisateur qui dès 1912 avait tout compris de l'utilisation de la lumière, et possédait un  savoir-faire des plus accomplis parmi les cinéastes Européens, est particulièrement réjouissant? Certes, le film a coûté cher, et ça se voit! ...mais il a aussi copieusement rapporté, et de façon méritée. Car ce Koenigsmark, bien plus que le torturé L'atlantide de Feyder, est du plaisir pur, de chaque instant, qui vous tient en haleine, et qui démontre à qui en douterait encore le pouvoir vénéneux du cinéma...

 

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Published by François Massarelli - dans Léonce Perret Muet 1923
24 avril 2021 6 24 /04 /avril /2021 11:40

Une petite fille, Jewel (Jane Mercer) vient vivre chez son grand-père (Claude Gillingwater) pour une courte période, après avoir été ignorée (le père et l'aïeul sont fâchés) pendant des années. Dans la maisonnée, tout le monde se déteste: le grand-père vit en effet avec sa bru, une femme remariée dont la fille ne trouve absolument pas sa place, jusqu'à la gouvernante qui hait tellement les deux femmes qu'elle souhaite les voir décamper... Quand la petite Jewel arrive, pourtant, elle va révolutionner son monde en les aimant en dépit de tout...

C'est un remake de Jewel, une autre adaptation par Weber du même roman, sortie en 1915. Weber avait aussi écrit le script d'un court métrage de deux bobines, The discontent, qui racontait l'arrivée inopinée dans une famille d'un vieil homme qui finissait par séduire son monde en dépit de son côté bourru. Le film, bien sûr, prend le contrepied avec ce personnage de petite fille angélique, qui vient au monde avec une certaine naïveté, même si elle n'a pas sa langue dans sa poche.

Weber en 1923 est plus que rompue à l'exercice de style qui consiste à familiariser les spectateurs avec les personnages qui cohabitent dans un environnement bien défini, et elle est très à son aise, même si on sera un peu plus impatient face à des intertitres qui alourdissent inutilement le début en mettant un point d'honneur à nous détailler absolument tout des éléments de l'intrigue, ce qui fait qu'on lit, plus qu'on ne regarde, la première bobine... Elle a recours, aussi, à un symbolisme qui renvoie un peu à son célèbre Hypocrites de 1915, à travers un court insert, qui représente la musique jouée par un personnage, sous la forme d'une danseuse drapée d'un voile diaphane... Une fantaisie qui a du trouver un écho dans une scène ultérieure, mais l'insert en a été coupé.

C'est l'un des derniers films de la réalisatrice, qui voyait le travail se faire de plus en plus rare. S'il n'apporte sans doute pas énormément, c'est un style très personnel, une façon de montrer les personnages, et des préoccupations émotionnelles (liées à la Christian Science, comme souvent) qui sont particulièrement singulières dans le cinéma Américain.

 

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Published by François Massarelli - dans Lois Weber 1923 Muet Comédie **
21 avril 2021 3 21 /04 /avril /2021 09:01

Deux garçons qui viennent de perdre leur père sont recueillis par un oncle et une tante à la Dickens! Ils ne s'entendent pas et fuient en compagnie du fils d'un ramoneur, la pire racaille de l'hémisphère nord Fabian: celui-ci leur propose de faire un tour dans un petit voilier qu'il a bricolé. Mais le bateau ne tient pas le choc, et au terme d'un combat contre les éléments, s'échoue... Les trois garçons, déterminés à ne pas retourner chez eux, vont voler un voilier de luxe et partir pour une vraie croisière pendant que tout le monde les croit morts...

Film de vacances avec aventures pour rire, film moral aussi (le plus grand des trois garçons, interprété par Einar Hanson, est quand même un peu boy-scout sur les bords, et s'oppose à l'abominable et immoral Fabian), film de pirates en culottes courtes, conte initiatique et comédie... Les trois gamins qui ont tourné dans ce film, manifestement, ont apprécié l'expérience!

Quel que soit l'angle d'approche il y a quelque chose à glaner dans ce film de jeunesse de Gustaf Molander, l'ancien scénariste qui a pris du galon! C'est réjouissant, léger, souvent drôle et ça soutient l'intérêt pendant ses 100 minutes. Forcément, ça donne envie d'en voir plus, les comédies muettes n'étant pas légion en Suède...

Il y a une foule de bonnes raisons de ne pas avoir Netflix, ce film est tout le contraire...

 

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Published by François Massarelli - dans Muet 1923 Gustaf Molander