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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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2 octobre 2022 7 02 /10 /octobre /2022 17:59

La vie tumultueuse de Lenny Bruce, considéré comme l'inventeur et le principal propagateur de cet art si typiquement Américain qu'on appelle le StandUp. Dustin Hoffman incarne le comédien (notons qu'au passage le terme de comedian en Anglais n'est pas simplement un équivalent de "acteur"... ), entre le moment où il perce enfin, au début des années 60, et la fin de sa vie en 1966, lorsque entre deux procès pour obscénité, il est découvert mort d'une overdose dans sa maison...

Tout ici est affaire de parti-pris... Le tournage a été effectué en noir et blanc, et le chef-opérateur Bruce Surtees a tout fait pour accentuer les noirs, et créer de beaux contrastes. On est presque devant une esthétique de film noir... Le film est structuré d'une bien étrange façon, car d'un côté, une version "moderne" de Bruce (Dustin Hoffman barbu) commente tout ce qu'il a vécu, et apporte un commentaire éclairé et parfois un contrepoint ironique à ce qui nous est montré, en ordre chronologique. Un autre contrepoint est offert par un ensemble d'interviews de ceux qui ont compté dans la vie du showman, ou plutôt de ceux pour qui il a vraiment compté: sa mère, son épouse Honey, et son manager... Ils aident à y voir et accompagnent la destinée du héros.

Ils offrent aussi un miroir déformant, perturbant, sur la corruption entière d'un société dont le comédien traquait toutes les turpitudes dans ses spectacles, y démontrant constamment l'absurdité en se faisant constamment arrêter pour des motifs futiles: le plus souvent, pour avoir dit des gros mots en public! Le fait est qu'on voit bien que Bruce était en avance sur son temps, vilipendant la politique Américaine, l'hypocrisie face au langage et à la sexualité, les doubles discours de la politique, de la justice et de la police, et attaquant parfois son public pour démontrer l'absurdité des propos racistes aux Etats-Unis... 

C'est un film étonnant, dont la caméra est toujours en train de scruter un public qu'on croirait réel, tant il est fasciné par la prestation de Bruce. Nous, c'est celle de Dustin Hoffman, qui gagne ici un peu plus les galons de monstre sacré auquel il aurait tort de ne pas prétendre... On sera par contre un peu décontenancé par le peu d'effort pour nous faire gober qu'on est bien dans les années 60. Mais Bob Fosse, obsédé du détail juste, savait ce qu'il faisait, et je pense qu'il a voulu signifier, en nous montrant des années 60 dont les citoyens sont habillés et coiffés comme en 1974, la justesse pérenne du message de Lenny Bruce.

Pour ceux qui souhaiteraient avoir une version plus "réaliste" du comédien, je vous invite à fouiller dans la très belle série The marvelous Mrs Maisel, dont l'héroïne "fréquente" Bruce (y compris de façon biblique, dans la saison 4) mais surtout a calqué son propre parcours de standup-comédienne sur celui de son mentor-malgré-lui. 

En attendant, ...Dustin Hoffman!! Faut-il en dire plus?

 

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Published by François Massarelli - dans Bob Fosse
8 novembre 2020 7 08 /11 /novembre /2020 10:09

Un musical tardif, qui a coulé la Universal ou presque, avec une star géniale en totale liberté qui se plie à une intrigue cousue main (même si elle vient d'un musical de Broadway) l'autorisant à toutes les extravagances, tout en étant empreint d'une authentique amertume... Ca sonne comme un OFNI, d'ailleurs ça l'est... C'est un film non seulement à voir, mais aussi à réévaluer. Comme je le disais, la chose n'a pas spécialement été un succès...

Charity Hope Valentine, avec son nom triplement significatif, a deux principales occupations: d'une part elle travaille en tant qu'hôtesse dans un bar à danser, où elle offre une peu de compagnonnage moyennant finances, à des clients désoeuvrés; d'autre part elle rêve du prince charmant: au moment où commence le film elle est en couple avec Charlie, un Italien ombrageux qui est aussi marié... Mais ça ne dure pas longtemps, car il lui pique son argent et la flanque à l'eau à Central Park. Elle se met donc en quête d'un prince charmant...

c'est une quête sentimentale qui va être opérée par une indécrottable sentimentale dans un monde en totale mutation: le bar où travaille Charity est montré en contraste aux bars et dancings de la jet-set, où Charity va suivre une rencontre de passage, l'acteur Vittorio Vitale (Ricardo Montalban): un prétexte gourmand pour Fosse de se moquer de la danse à la mode, dans un éblouissant ballet. Ayant rencontré un "type bien", Oscar (John McMartin), qui est surtout d'une fadeur, d'une pruderie et d'une niaiserie absolues, elle le suit dans une soirée religieuse, menée par Sammy Davis Junior avec des congrégants qui sont tous des hippies, et sinon elle doit faire face à son propre ratage, et ce jusqu'au bout du film...

Fosse a donc adapté un musical et en a complètement éclaté la dimension scénique, en libérant tout: dissociant parfois l'intrigue des numéros chantés, interrompant les chansons pour du dialogue ou le contraire, opérant d'incroyables digressions, toujours avec Shirley MacLaine en ligne de mire. Celle qui avait fait du base-ball à l'université et hésité devant une carrière dans le ballet, met son énergie au service du film, et l'excentricité profonde du projet lui sied parfaitement. La superbe musique de Cy Coleman (à mi-chemin entre le jazz et un commentaire ironique sur l'état de la pop en ces années post-psychédéliques) et la profonde ironie des paroles de Dorothy Fields font de Sweet Charity un film à nul autre pareil.

Je suis un peu plus mitigé sur certaines des idées novatrices voire iconoclastes de Fosse (dont c'était le premier film, et qui maîtrise de nombreux aspects au-delà de la chorégraphie): cette manie qu'il a de substituer des arrêts sur images, traités et appauvris, à des séquences en mouvement, est intéressante en soi mais finit par irriter. Et le dernier chapitre, celui dans lequel Charity glisse vers la réalisation de l'échec, est sans doute un peu long: le film est en cela un filmouth, film géant et pur produit des années 60, qu'on se rappelle les durées de My fair lady ou The sound of music... De même, le choix de Fosse pour une fin amère se justifie, mais elle reste quand même assez déroutante. Si l'amertume en est justifiée, la version "rose" alternative est en soi plus intéressante... Au regard du film, ces remarques ne sont pas grand chose: je le répète, il n'y a pas deux films comme celui-ci, qui mérite le coup d'oeil.

Ah, j'oubliais: on m'en voudrait probablement de ne pas mentionner que le musical de Broadway dont ce film est une adaptation était une variation sur Les Nuits de Cabiria de Fellini. Comme je ne supporte pas ce monsieur, ni son cinéma, je vais juste dire que personnellement je m'en fous. Voilà.

 

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Published by François Massarelli - dans Musical Shirley MacLaine Bob Fosse Danse Filmouth