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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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2 décembre 2024 1 02 /12 /décembre /2024 15:18

Ce film est le premier de Capra à sortir du cadre des petits compléments de programme (Policiers, comédies, mélos, tous réduits en durée, et en budget) à la Columbia. Comme on le sait, ces compléments de programme sont généralement d'une qualité bien supérieure à ce qui était attendu, donc il est probable qu'Harry Cohn était à l'aise pour lui confier un budget conséquent... Ce film sera non seulement un gros succès, mais il consolidera encore plus la position du metteur en scène au studio, tout en inaugurant un cycle de film d'hommes, dont les deux qui suivront (Avec les deux mêmes acteurs dans les rôles principaux) seront parlants: Flight et Dirigible.

Jack Dorgan (Jack Holt) et Bob Mason (Ralph Graves) sont deux marins et scaphandriers, habitués à remplir des missions ensemble. Ils ont sillonné la terre entière, et se sauvent mutuellement la vie à chaque occasion qui se présente, sans jamais arrêter de se chamailler comme des gosses. Bref, des hommes, des vrais... Mais Mason, plus jeune que son copain, est généralement le plus rapide à séduire les dames. Il a même un truc: il leur offre des jarretières affriolantes... Mais alors que son compagnon est en mission sans lui, Dorgan rencontre dans un bar la jolie Bessie (Dorothy Revier), tombe amoureux, et l'épouse. Quand il part en mission à son tour pour une semaine, elle retourne faire la fête, et rencontre un beau marin qui la séduit tout de suite: Bob Mason...

Tout ce qui précède occupe essentiellement la première moitié du film, un prologue au drame, que Capra utilise pour installer du suspense dans la relation des deux amis. La deuxième moitié de ces 90 minutes concerne un naufrage, celui du sous-marin dans lequel travaille Mason. Le seul homme qui pourrait plonger et permettre de dégager le sous-marin de l'extérieur, c'est Dorgan. Le problème, c'est qu'il ne veut pas, en dépit de ses remords: la trahison de Mason lui reste en travers de la gorge.

Oui, mais... s'agit-il vraiment d'une trahison? Le moins qu'on puisse dire, c'est que dans ce film d'hommes, donc, les femmes n'ont pas une image très reluisante. Dorothy Revier n'a pas d'autre rôle que celui de garce, et à ce titre elle anticipe furieusement sur la Viviane Romance de La belle équipe! Donc, on est dans un monde de conventions dramatiques, mais celles-ci servent surtout à nous accrocher à l'histoire. Pour moi, l'important dans ce petit grand film, c'est de voir à quel point Capra a su trouver la mise en scène la plus efficace pour le projet. En terme de montage, d'atmosphère, de petites touches par-ci et par-là, le film est un sans fautes, parce que la mise en scène ne faillit jamais... Capra, dans son sous-marin dont les hommes meurent à petit feu, laisse l'urgence de la situation lui dicter un suspense impressionnant. Et même si le film louche sérieusement du côté des autres films de ce genre, qui étaient légion depuis The blue eagle de Ford ou What price glory de Walsh, la caractérisation musclée des deux acteurs principaux emporte sérieusement l'adhésion.

Et puisque on est à parler de ces films Fox avec Victor McLaglen ou George O'Brien, il me semble utile d'ajouter que si A girl in every port, de Hawks, est sorti en février 1928, et ce film de Capra en novembre de la même année, il serait déloyal de les comparer. Non par rapport au statut "supérieur" de la Fox sur la Columbia à cette époque, non: le Capra est franchement le meilleur des deux.

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Published by François Massarelli - dans Muet Frank Capra 1928 **
1 décembre 2024 7 01 /12 /décembre /2024 10:29

Lors de ses débuts à la Columbia, le jeune Capra connaissait déjà furieusement son métier, et privilégiait la vitesse, avec une sûreté d'exécution qui laisse pantois. Cette histoire de reporter ambitieux est excellente: Clem Rogers, journaliste, est las de devoir faire les chiens écrasés (Ou la météo), et obtient une dernière chance de son patron. Il se retrouve dernier arrivé sur les lieux d'un crime mais le hasard fait bien les choses: il assiste à la fuite d'une jeune femme, et suite à un quiproquo, écrit un papier qui accuse la jeune femme, la fille d'un politicien en campagne... mais la jeune héritière victime de l'histoire en question se rebiffe, et les deux font alliance pour faire éclater la vérité.

Energique, élégant, et attendrissant. un film pré-Tintin qui a bien pu inspirer Hergé, qui était très fan du cinéma Américain (plus que des Etats-Unis eux-mêmes, d'ailleurs...). On y retrouve cette vitesse, cette atmosphère des salles de rédaction qui va envahir en quelques années les films des années pré-code, et Douglas Fairbanks Jr, dont le personnage est souvent considéré comme un ado capricieux par ses collègues, avance dans cette enquête cousue de fil blanc avec humour et charme. Et puisqu'on en parle, il y a aussi un atout fantastique: face à lui, la délicieuse Jobyna Ralston!

Pour vraiment anticiper sur les futures réussites de Capra, il aurait peut-être fallu développer une partie consacrée au doute, mais Clem Rogers, en route vers une carrière prestigieuse, n'a pas de temps à consacrer à une remise en question. Et puis... c'est une comédie.

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Published by François Massarelli - dans Muet 1928 Frank Capra Comédie *
1 décembre 2024 7 01 /12 /décembre /2024 10:07

Handsome Williams (Mitchell Lewis) est un gangster, un vrai dur... Sa seule faiblesse, apparemment, est une jeune femme (Alice Day) qu'il aime à écouter en cachette quand elle joue du violon le soir... Car il est épouvantablement laid et elle est aveugle... Un jour qu'il l'écoute, la concurrence tente de l'éliminer. Il recueille la jeune femme comotionnée, et commence alors un étrange rapprochement: elle lui est reconnaissante de sa délicatesse mais il ne peut accepter qu'elle lui touche le visage... Il utilise donc un de ses "protégés", Dan (Theodore Von Eltz), un pianiste qui n'a pas ses cicatrices.

Le film de gangsters était très à la mode après Underworld, de Sternberg (1927)... Et ce film lui doit beaucoup, transposant les personnages de George Bancroft et Clive Brook, à travers ce chef de gang impitoyable et qui cache sa sentimentalité derrière la brutalité, et ce pianiste alcoolique qui est réfugié dans la pègre pour enrayer sa chute... Mais Capra n'est pas Sternberg, il traite différemment son sujet, allant plus directement à l'expression des sentiments, sans les écarter ou les masquer d'un rideau de fumée. Et il s'amuse de la peinture de tout un milieu en donnant vie aux ennemis du "héros", une bande menée par "Tiger Louie" (William Norton Bailey) auprès duquel on reconnait Margaret Livingston... 

Il faut admettre que le film semble omettre un point important dans son déroulement: le fait est que ces gangsters s'entretient, oui, mais c'est comme si les honnêtes gens n'existaient pas! On ne verra donc jamais Handsome dans l'exercice de sa profession... Mais Capra a tout misé sur l'histoie d'amour, un vrai triangle amoureux d'ailleurs, enytre le boss, son protégé qui bien sûr va tomber amoureux de la jeune femme, et cette dernière. Et pour bien comprendre l'importance de cette intrigue sentimentale, les bandes vont se déchainer autour du kidnapping de la jeune femme... La laideur d'Handsome (au passage, l'adjectif devenu son surnom est à prendre évidemment dans le sens contraire) n'en reste pas moins une métaphore de la laideur de son âme de gangster sans doute...

Un excellent petit film en tout cas, qui montre la versatilité de Capra, qui sans jamais s'abstenir de verser dans la comédie, minimise cet aspect de son style, pour se concentrer sur les éléménts stylistiques du film noir tels que Sternberg, Milestone ou Browning les ont établis depuis quelques années... Et Mitchell Lewis, qu'on a vu dans tant de comédies, est impressionnant dans ce rôle de gangster qui ne peut vivre son amour fou jusqu'au bout...

 

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Published by François Massarelli - dans Frank Capra Muet 1928 **
1 décembre 2024 7 01 /12 /décembre /2024 09:30

Don Wilson (Johnnie Walker) est une vedette de Broadway, à la carrière parfaitement placée sur ses rails, mais le succès lui pèse parfois... Il décide de s'octroyer un peu de repos et de s'aérer, et se rend dans la campagne... Où il tombe en panne avec son agent et des amis. Durant la réparation, les quatre hommes se rendent à un spectacle de théâtre itinérant donné par des saltimbanques, et reconnaissent que c'est "tellement mauvais que ça en devient bon". Don, sous un faux nom, participe même au spectacle et joue lamentablement un petit rôle dans la pièce (un abominable mélo de la guerre de Sécession). Mais il est intéressé par la personnalité de l'actrice principale, Ginger Bolivar (Bessie Love), la fille du directeur de la troupe: il décide demanoeuvrer pour faire venir la troupe à Broadway dans le but de les utiliser, en faisant rire les spectateurs à l'insu des acteurs...

Ca rappelle souvent Spite Marriage de Buster Keaton, sorti l'année suivante, et il est probable que les deux films ont été inspirés de la même pièce: les similitudes entre les deux versions d'une pièce de répertoire sur la guerre civile sont troublantes. Sauf quand dans le cas du flm de Keaton, c'est un spectacle supposé d'une grande dignité qui est saboté par les inepties d'un figurant, quand ce film de Capra pose finalement le cas contraire... En acteur doué qui tente d'adapter son style à son incognito d'une part, et à la mauvaise qualité de son entourage, le très spiritueux Johnnie Walker fait du beau travail. Le reste de la troupe est pour le metteur en scène l'occasion de développer une galerie de portraits parfois un peu outrés, mais qui se situent dans les habitudes de la comédie: Bessie Love, bien sûr, se détache particulièrement, en dominant par son investissement physique la distribution...

Mais cet aspect de farce n'occupe que les vingt premières minutes dont le tempo et le ton sont ceux d'un court métrage de deux bobines: Capra développe différemment sa deuxième partie, en se concentrant surtout sur le point de vue des acteurs: aussi médiocres soient-ils (et ils le sont, vous pouvez me croire...), il apparaît qu'ils croient à ce qu'ils font, et le film souligne à quel point finalement leur public rural est après tout satisfait de l'offre théâtrale des acteurs de troisième choix. Et Don Wilson, en faisant son malin, va découvrir à ses dépens que bonne ou mauvaise actrice, Ginger vaut la peine. Une sorte de préfiguration de Mr Deeds et Mr Smith, avec ses naïfs ruraux pris dans la tourmente citadine, nous apparaît ici.

Et la mise en scène de ces Capra muets réalisés pour la Columbia est toujours aussi dynamique et enthousiasmante, on y sent la rapidité à l'oeuvre (même si cette impression est certainement accentuée par un montage qui a été revu, pour une version qui n'est pas aussi longue que l'originale), et l'efficacité du metteur en scène fait merveille. Dans le cadre de la comédie, bien sûr, et sa touche est déjà bien présente, mais il s'octroie une très jolie scène de révélation sous la pluie, avec Bessie Love au sommet de son art, un mélange subtil de comédie de situation, et même de tragédie, la jeune actrice comprenant qu'elle a été roulée dans la farine par l'homme qu'elle aime...

 

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Published by François Massarelli - dans 1928 Muet Frank Capra Comédie *
30 novembre 2024 6 30 /11 /novembre /2024 08:54

Hilda Jenson travaille dans la petite épicerie d'un quartier populaire, où elle reçoit souvent la visite du caïd du quartier, Spike Mullins. Celui-ci, un boxeur terriblement imbu de lui-même, ne la remarque pas... Celui qui la remarque en revanche, c'est Jerry, un assistant chez le tailleur d'en face de l'épicerie. A l'occasion d'un bal, il l'invite et lui fournit même des vêtements de sa boutique. Lors de la danse, elle est enfin remarquée par Spike, qui décide d'en faire sa petite amie... de force. Jerry désapprouve, mais Spike le tient à distance par la menace... Et Hilda, revenue de ses sentiments, est touchée par l'opposition de Jerry, mais agacée par son incapacité à se défendre. Jerry va donc apprendre à boxer. Mais Hilda va l'aiderd'une façon spectaculaire...

Le cinquième long métrage de Capra, et le deuxième pour la petite compagnie Columbia (Après That certain thing), c'est aussi sa première vraie comdie pour le studio. Et déjà, on y voit quelque chose qui surpasse radicalement les capacités affichées d'une petite entreprise qui ne s'était pas illustrée vraiment, jusqu'à présent... Mais qui avait sans doute rouvé son champion. Et celui-ci avait trouvé son univers, c'est indéniable...

J'ai bien dit que c'est une comédie: c'est l'un des traits les plus "Capraesques" du film, que de développer de la comédie sur une intrigue de mélo, à moins d'ailleurs que ce ne soit le contraire! Et cette histoire lui permet de laisser libre cours à un de ses péchés mignons, la peinture, pour l'instant discrète, d'un milieu éminemment populaire, entre le snack où on mange des sandwiches douteux, la petite boutique du tailleur (Katz, qui est une caricature d'immigré Juif comme on n'en ferait plus, ni exempte de clichés agaçants, ni surtout vile: le metteur en scène aime ce personnage et lui donne presque le dernier mot), un décor de rue particulièrement sommaire, et l'ambiance joyeusement bordélique d'un match de boxe! 

Il n'oublie pas non plus de donner à ses deux héros cette ambiguité, entre la faiblesse (les deux sont bien mal partis dans la vie au tout départ), la gaucherie du héros comique (il transpose les habitudes prises auprès de Harry Langdon lors de leurs films communs), et une force acquise au fur et à mesure de la découverte de leur amour. On pioche ici aussi dans le conte de fée (le tailleur sert de bonne fée, qui laisse Jerry fournir des vêtements de princesse à Hilda, qui la transfigurent)... 

Le rythme est énergique, et le jeu soutenu. Certes, Johnnie Walker en fait des tonnes dans le rôle de Mullins, mais son fier-à-bras totalement désinhibé est un intéressant méchant de cinéma, à commencer par le fait qu'il n'est sans doute pas totalement méchant, il a juste besoin d'une bonne correction! 

Reste à raffiner la formule et l'univers, et à choisir: ici, entre Shirley Mason (déjà aguerrie, elle est une actrice de cinéma depuis 1910, autant dire le déluge à cette époque) et le jeune William Collier, Capra a du mal à choisir. L'actrice la plus connue est la star en titre, et son personnage nous est convenablement développé... Mais Capra aura toujours tendance à donner plus de voix à ses protagonistes masculins.

 

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Published by François Massarelli - dans 1928 ** Muet Frank Capra
30 novembre 2024 6 30 /11 /novembre /2024 08:54

Tout un symbole: ce premier film de Frank Capra pour la Columbia, le studio qui va le mener au firmament malgré sa petite taille (le studio, pas Capra) est sorti le 1er janvier 1928. C'est en fait le quatrième long métrage de celui qui fut longtemps un gagman chez Sennett, puis un scénariste, et que Harry Langdon avait promu au rang de metteur en scène pour Long Pants, son premier long métrage indépendant.

Si That certain thing est d'abord une affaire très économique, avec des vedettes considérées comme étant de seconde zone (Ralph Graves, Viola Dana, Burr McIntosh, tous des oubliés des années 20), l'énergie des comédies de Capra est déjà la: l'histoire est celle de Molly (Viola Dana), une jeune femme qui survit dans un quartier populaire, jusqu'au jour ou elle rencontre le fils (Ralph Graves) d'un milliardaire (Burr McIntosh), et l'épouse le jour même. Le milliardaire déshérite son fil illico, et le jeune homme vient s'installer chez sa belle épousée. Afin de s'en sortir, ils montent une entreprise de confection de déjeuner tout prêts, qui va faire de la concurrence aux restaurants du père...

Le sujet se passe donc dans l'Amérique qui travaille, et le lien entre capital (le père, le fils qui devient chef d'entreprise) et travail (Les ouvriers qu'il faut nourrir) renvoie à l'optimisme Républicain de Capra, qu'il affichera toute sa vie, le mâtinant toutefois d'une générosité que les Républicains d'aujourd'hui ne connaissent plus. Il montre vraiment un vant-goût de son univers chaleureux quand il nous donne un aperçu du quartier populaire où habitent Molly et sa famille... Les ethnies et les cultures s'y mélangent, en bonne logique du melting-pot: la façon dont tout le monde se côtoie, s'épaule dans l'immeuble ou habite Molly nous donne à penser que finalement, tous ces voisins forment une petite famille, soudée dans l'adversité. 

...Jusqu'à un certain point: la scène où Viola Dana rentre chez elle après avoir quitté son mari, et se fait accueillir par ses voisins qui la traitent de tous les noms après avoir vu l'annonce de son mariage express dans le journal, est un grand moment de cruauté. ...Qui se termine par la comédie, par la grâce d'une série bien placée de coups de rouleau à patisserie!

Le film est une comédie sentimentale centrée sur deux personnages, dont le début n'est finalement pas très éloigné de ce qu'aurait fait Harold Lloyd, même si ce dernier aurait certainement privilégié une approche plus centrée sur le jeune homme. Mais Viola Dana bénéficie de cette attention, et elle semble "manoeuvrer" pour se rapprocher du jeune homme qu'elle rencontre, avec efficacité, sans qu'aucun intertitre n'ait besoin de nous expliquer la situation. Le futur metteur en scène de It's a wonderful life nous rappelle s'il en était besoin qu'il a commencé dans la meilleure école qui soit, celle de la comédie muette. Ce qui ne l'empêche jamais pour autant d'afficher un savoir-faire en matière de rprésentation des sentiments, sans jamais s'interdire le premier degré de l'émotion.

Ce film n'a sans doute pas fait la moindre vague à cette époque, tant il était acquis que la Columbia était un studio sans envergure. Ca n'allait pas durer...

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Frank Capra 1927 **
27 octobre 2023 5 27 /10 /octobre /2023 23:24

Un film sur les pionniers et l'esprit qui les animait... Un grand propriétaire en Californie, Roy Whitman (John McIntire) décide de financer une expédition pour aller à Chicago et ramener des femmes pour ses hommes. Il souhaite faire prospérer sa vallée à tous les niveaux, et demande à Buck Wyatt (Robert Taylor) de l'aider dans l'acheminement de ce convoi un peu particulier. Ils ramènent 150 candidates, avec une exigence: qu'elles soient des "femmes bien". Ce que Whitman entend par là, c'est bien sûr dans leur valeur humaine. Wyatt, lui, estime que ça implique uniquement des femmes dont la vie a été jusqu'à présent sans équivoque, d'où un ressentiment de sa part à l'égard de deux anciennes prostituées, dont une (Denise Darcel), Française (Ou plutôt selon le film, de New Orleans), qui l'attire beaucoup. Le chemin est semé d'embûches, de mort, de renoncements, d'intransigeance aussi (Buck exécute froidement un violeur), mais nombreux sont les humains qui vont changer en chemin, à commencer par Buck.

Admirable! Le sujet, à la base du à une idée de Frank Capra dont il ne fera jamais un film, convient parfaitement à la dureté de Wellman et à sa façon directe d'affronter la violence ou le malheur d'une situation. Ici, rien ne nous est épargné, des conflits, de la bêtise humaine parfois, des mesquineries mais aussi de la profonde humanité de tous les protagonistes quels qu'ils soient, et d'où qu'ils viennent. En nous donnant à voir une histoire par ailleurs authentique, il rappelle à quel point l'esprit pionnier qui animait ces hommes et ces femmes impliquait certes de tout reconstruire quelque part, mais aussi et d'abord de tout quitter, de tout risquer. Et c'était sans doute un gros risque pour Wellman et Dore Schary, producteur de génie à la MGM en ce début des années 50, que de se lancer dans un western ausisi atypique... dont le tournage en pleine nature, en plein désert n'a certainement pas été de tout repos. Un chef d'oeuvre de plus à mettre à l'actif impressionnant de William Wellman. On aura ici toute la panoplie des grands westerns, et non seulement les situations extrêmes, mais aussi les décors grandioses, les cadres les plus étonnants...

Une scène, typique du metteur en scène et de son art de nous pousser à voir ailleurs quand une scène risque de nous brûler les yeux, symbolise parfaitement l'importance de la femme dans cette époque de conquête: l'une des candidates accouche, dans un chariot, mais celui-ci perd une roue, et les chevaux s'emballent. Buck arrête leur course, pendant que sans se concerter, toutes les femmes s'unissent et soulèvent le chariot, afin que l'accouchement puisse se terminer dans de bonnes conditions. Quand le bébé naît, c'est un peu le leur à toutes... Une scène d'entraide, qui résume un peu cette collaboration unique entre deux univers si riches l'un et l'autre, celui de Capra et celui de Wellman. Sinon, le metteur en scène traite d'une scène impossible à faire, celle du viol, avec sa méthode unique entre toutes: réussir à montrer sans rien montrer, mais sans occulter non plus, en utilisant le décor pour cacher les protagonistes. Mais le dialogue, lui, est possible à entendre, et on entend l'excuse dégueulasse et sans pitié du violeur face à sa victime: allons, laisse-toi faire, tu sais bien que tu le veux toi aussi... Une scène à la franchise inattendue, en ces temps prudes.

A propos de pudeur et de morale, le film évite soigneusement, du début à la fin, tout humour qui se positionnerait contre les femmes. Pas de clichés, pas de facilités, les femmes ici assemblées, quels que soient les préjugés de Wyatt à leur égard, ont pesé les risques et assument les dangers de cette expédition, l'admiration et le respect qu'elles forcent vis-à-vis des hommes qui les accompagnent sont partagées non seulement par les spectateurs et le metteur en scène de ce film... Qui se fend d'un final tout en douceur qui est absolument parfait: toutes les survivantes des attaques, des accidents et des vicissitudes du voyage sont arrivées, et elles imposent leur loi: certes, les hommes les ont attendues et n'en peuvent plus d'attendre... Mais la rencontre se fera sur leurs conditions, à leur façon... Une troupe d'hommes craintifs, endimanchés, timides, se retrouvent tout à coup face à d'impressionnantes pionnières qui d'un seul coup d'épaule leur imposent le respect. L'une d'entre elles (Hope Emerson) rompt le silence en montrant une photo d'un des hommes, qu'elle a gardé sur elle durant tout le voyage: "n'allez surtout pas croire que c'est vous qui allez choisir...". Ravis, conquis, les hommes se laissent faire, le reste de la scène n'est qu'une pure poésie westernienne, tendre, délicate et admirable. Comme le film, quoi...

 

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Published by François Massarelli - dans William Wellman Western Frank Capra
8 août 2019 4 08 /08 /août /2019 17:03

L'un des films les plus connus de son auteur, mais c'est un paradoxe, car en réalité Capra honorait ainsi une commande, avant de s'engager dans l'armée à sa façon, puisqu'il participera en cinéaste à l'effort de guerre. La Warner avait distribué Meet John Doe, son premier film indépendant après sa longue période à la Columbia. Meet John Doe étant un échec commercial, il est probable que le studio demandait ainsi à son réalisateur star d'un jour, un rattrapage... 

La pièce de Joseph Kesselring était dores et déjà un succès énorme, et empêchait la sortie du film avant 1944. Mais le principal enjeu de ce qui ne pouvait qu'être un succès cinématographique à son tour, était de faire du cinéma avec du théâtre. Des ajouts ont été effectués à l'intrigue et au dialogue, principalement au début, pour donner un contexte proche de la screwball comedy: le pointilleux critique dramatique Mortimer Brewster (Cary Grant) va se marier avec Elaine (Priscilla Lane) et avant de partir en lune de miel, il passe chez ses tantes adorées, deux vieilles dames excentriques qui vivent avec l'un des deux frères de Mortimer, Teddy: celui-ci, atteint d'une douce folie, se prend pour Theodore Roosevelt. Chemin faisant, Mortimer va découvrir que les deux coeurs d'or se sont lancées dans une mission: supprimer des pauvres hères isolés pour alléger leur misère. Elles s'apprêtent d'ailleurs à enterrer le douzième à l'arrivée de leur neveu...

Et la cerise sur le gâteau, c'est que le troisième des frères Brewster, Jonathan (celui qui a mal tourné), revient se cacher chez ses tantes, avec deux "amis": le mystérieux "Docteur" Einstein, et un cadavre en plusieurs morceaux. Menaçant et très énervé contre son comparse qui lui a bricolé la tête de Boris Karloff en guise de camouflage, recherché par les polices de tous les Etats-unis après son évasion, Jonathan va semer la pagaille... Et Mortimer qui se rend compte qu'entre ses deux frères et ses deux tantes, il est plutôt servi, n'est pas près de partir en lune de miel...

C'est un festival de rire, de gags et de grands moments de jeu. Ce n'est pas subtil, non, et on voit bien que Cary Grant avait comme mission d'en faire des tonnes, développant avec génie un art de la réaction extrême qui tient autant du cartoon que des traditions de la comédie. Et si Capra est un peu en vacances, à l'écart de son univers, il est évident, d'une part, qu'il a pris sa mission d'adapter une pièce avec sérieux, et ne s'est pas contenté de filmer, loin de là (sa technique est exceptionnelle, et son montage renversant de réussite, créant un tempo et une tension formidable), mais ça ne l'a pas empêché de diriger ses acteurs comme il savait si bien le faire dans ses comédies. Et il est servi! Raymond Massey, Peter Lorre, Jack Carson, James Gleason, Edward Everett Horton, sont tous brillants. Pas de quoi bouder son plaisir: ...Chaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaarge!!

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Frank Capra Criterion Cary Grant Edward Everett Horton
25 juillet 2017 2 25 /07 /juillet /2017 15:20

Ce très court métrage amateur (Mais qui fut distribué par Pathé, tellement il avait impressionné) est donc le premier contact de Capra avec le cinéma. Inutile de chercher ici le style des films qu'il tournera par la suite, il aura besoin de faire convenablement ses classes chez Sennett avant de devenir le prince de la comédie sentimentale, mais au moins trouve-t-on ici un vrai talent pour accumuler les trognes dans ce qui reste un exercice un peu vain: l'illustration se voulant servile d'un poème de Kipling.

La pension de famille de Fultah Fisher est un vrai bouge, on y boit, on y joue, et on s'y bat sans vergogne, en particulier pour les filles. Mais ce qui relie malgré tout ces quelques 12 ùinutes à l'oeuvre future, outre un certain sens du montage (Je ne sais pas si le film n'a pas été révisé et embelli par la suite, notez), c'est le talent pour accumuler les images de personnes de tous horizons, l'un des éléments qui font l'Amérique de toujours, et une obsession pour le metteur en scène...

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Frank Capra
23 février 2017 4 23 /02 /février /2017 16:17

Interrogé sur ce film, Capra confessait facilement son affection profonde, en même temps qu'une sorte de fatalisme devant le destin des copies, qui n'ont jamais cessé d'être malmenées à partir de la sortie de 1937, et de l'insuccès notoire du projet. Il admettait aussi avoir considéré entreprendre un remake, mais avouait ne pas l'avoir fait car il ne l'envisageait pas sans Ronald Colman... Donc, avec un film mutilé, reconstruit tant bien que mal, et qui tranche apparemment de façon spectaculaire sur ce qu'est un film de Capra selon la sagesse populaire, on n'est pas loin d'imaginer avoir affaire à un chef d'oeuvre maudit... ou un vilain petit canard. En tout état de cause, on est face à un objet peu banal... Un objet qui se situe de par son histoire dans la droite ligne de la carrière de Capra à la Columbia, dont c'est le film le plus ambitieux. Le script du au complice Robert Riskin était adapté d'un roman de James Hilton paru en 1933. C'était un succès, contrairement au film.

En 1935, le diplomate Britannique Robert Conway (Ronald Colman) et son petit frère George (John Howard), sont stationnés en Chine et avant d'en partir sous la pression de révolutionnaires, se rendent à Baskul dans le but d'aider un maximum de ressortissants Européens et Américains (Nommément dans le film, des "blancs") à quitter le territoire devenu brûlant en raison des troubles politiques. Ils parviennent à sauver 90 personnes (En faisant un tri systématique entre "indigènes" et blancs, ce qui désole Conway), et prennent un avion en compagnie des trois derniers évacués, pour pouvoir rejoindre l'Europe. En chemin, les passagers s'aperçoivent qu'ils ont été acheminés vers l'Himalaya au lieu de s'en éloigner, et leur appareil se crashe en pleine montagne... où un groupe d'hommes très équipés, menés par Chang (H. B. Warner), un Chinois mystérieux qui parle un Anglais impeccable, vient les chercher pour les amener dans un endroit fantastique: Shangri-la, une vallée encaissée, épargnée des intempéries et qui possède un micro-climat positivement miraculeux. Très vite, Conway apprend que son arrivée dans cette vallée merveilleuse n'est absolument pas un miracle ni une coïncidence, et va apprendre surtout à se familiariser avec les lieux, une vallée auto-suffisante, un vrai paradis dont il lui paraîtra difficile de partir. Mais son frère, lui, n'apprécie pas la perspective d'être coincé pour le reste de ses jours dans cet endroit pour en préserver le secret...

J'ai laissé de côté trois points qui alourdiraient considérablement ce résumé, mais qu'il me semble nécessaire de préciser maintenant: d'une part, Shangri-La est dans le film une communauté vaguement oecuménique, fondée par un prêtre Belge deux cents ans auparavant, qui avait trouvé la vallée par hasard. Et ce prêtre (Sam Jaffe) est toujours vivant... Egalement présentes aux côtés du père Perrault, et de Chang, deux femmes vont refléter, chacune à sa façon, les convictions bien différentes des deux frères Conway. George va tromper son impatience en tombant amoureux de Marie (Margo), une femme Russe à l'âge mystérieux: elle paraît avoir vingt-cinq ans, et assure être jeune, mais Chang assure Conway du contraire. Ce dernier, pour sa part, apprend que Sondra (Jane Wyatt); une jeune Européenne qui est venue vivre à Shangri-la, a remué ciel et terre pour que lui, l'homme dont elle a lu les livres philosophiques avec passion, puisse venir vivre ses rêves à l'abri du monde. Ils vont, bien entendu, tomber amoureux l'un de l'autre. Enfin, les autres occidentaux venus avec les Conway sont tous bien différents: Glory (Isabel Jewell) est une ancienne prostituée condamnée par la médecine, qui tente de survivre en dépit d'une tuberculose carabinée; Barnard (Thomas Mitchell) est un industriel et financier recherché pour sa participation involontaire à un scandale; et le Britannique Alexander P. Lovett (Edward Everett Horton) est un paléontologue, totalement oublieux de tout ce qui n'est pas lui-même, et qui souhaite rentrer au plus vite à Londres afin d'y exposer sa découverte: une magnifique vertèbre de mégatherium, dont il est persuadé qu'elle va lui apporter la notoriété... Les trois personnages vont pourtant très rapidement succomber au charme de l'endroit. D'abord attiré par l'or qui semble être partout à fleur de rocher, puis soucieux d'aider Glory à surmonter son état, Barnard finit par se laisser aller aux charmes de Shangri-la, dont il décide de faire profiter de ses connaissances en matière d'infrastructure urbaine. Glory se sent revivre, et finit par guérir totalement, grâce en particulier à l'affection de Barnard. Et Lovett, tout simplement, s'ouvre et s'humanise... 

Le premier tiers du film est entièrement consacré aux aventures des Conway en Chine, qui sont excitantes, fort bien menées, et bénéficient de la mise en scène exceptionnelle de Capra. Ce dernier a fait aménager un hangar réfrigéré par la Columbia afin de pouvoir garder un certain réalisme en ayant de la buée authentique qui permette de rendre les conditions de vie en pleine montagne aussi véridiques que possible! le mystère est entier jusqu'à l'arrivée de Chang, et la référence qui s'impose à nous autres petits Européens, c'est bien sûr le Tintin des années 30, et cette atmosphère de roman feuilleton à cent à l'heure, qui domine cette portion du film. Nul doute que ça a joué en sa défaveur, car une fois arrivés à Shangri-la, les personnages auront moins de mauvaises surprises... On notera que chacun d'entre eux, excepté George bien sur, est confronté à des merveilles cependant; Et bien sûr celui qui aura le droit à un tour de grand huit complet n'est autre que Robert Conway! Mais le principal défaut du film réside justement dans des passages longs, très longs, qui ont pour la plupart été coupés au fur et à mesure des ressorties du film, dans les années 40 et 50: les deux rencontres avec le "Père Perrault", le grand lama fondateur de Shangri-la, sont l'occasion de monologues redondants, qui exposent la raison d'être du lieu, et par là même la fonction philosophique de cette histoire, pour Capra comme pour l'auteur du roman dont le film a été tiré: créer et maintenir un endroit à l'écart du monde, préservé du tumulte, et donc de la foule, qui permette à la sagesse de l'humanité de survivre aux folies guerrières.

On notera qu'il ne s'agit pas d'empêcher la guerre, juste de l'ignorer. Capra qui est souvent accusé par ses contempteurs d'être un incorrigible boy scout qui raconte des histoires de milliardaires qui se mettent à partager leur fortune, nous raconte ici plutôt que la sagesse consiste à se préserver du monde en le laissant aller à sa perte. Il nous expose un rêve privé, une échappatoire sélective en quelque sorte. Un rêve dangereux à l'heure des expériences fascistes... Pourtant ce n'est pas cet aspect d'utopie gênante qu'on retient du film, plutôt son identité de rêve éveillé, mis en valeur par les mystères de roman-feuilleton qui entourent les énigmes de l'âge des gens qui Shangri-la: ainsi, on apprend en même temps que Conway, auquel Chang a raconté l'étrange histoire de Perrault qui a perdu sa jambe dans son périple, que le "grand lama" qui est unijambiste n'est autre que le prêtre Belge vieux de plus de deux siècles. A partir de là nous sommes comme lui prêts à croire que la jolie Marie est en réalité une octogénaire. Mais, assure Chang, qu'elle fasse un pas à l'écart de Shangri-la, et elle sera aussitôt une petite vieille rabougrie qui sera incapable de résister aux intempéries de ce bon vieil Himalaya... Une convention qui vaut ce qu'elle vaut mais qui agit comme un révélateur intéressant, en même temps qu'un enjeu narratif sur le dernier tiers du film.

En attendant, le film a coûté cher, très cher: le résultat de cette dépense se voit à l'écran, la Columbia n'ayant sans doute jamais autant dépensé auparavant pour un seul film! Les décors de Shangri-la, les centaines de figurants, les scènes de panique en Chine, parfaitement intégrées à des vues documentaires, mais aussi la cérémonie funéraire de la fin, dont il existe de nombreuses chutes absolument magnifiques, tout concourt à démontrer que si Capra n'a ponctuellement rien perdu de son efficacité, il est en effet devenu pour ce film particulièrement dépensier. Ce n'est pas moi qui vais lui jeter la pierre, mais le fait est que si la Columbia, habituée à le voir enchaîner les succès depuis 1933 (Lady for a day, It happened one night, Mr Deeds goes to town) l'a laissé faire, et a même typiquement rajouté une couche dans les bande-annonces d'époque en mettant l'accent sur le luxe du film (L'anecdote de Foolish Wives et de son prétendu "million de dollars" en 1922 a semble-t-il été oubliée par tous les studios), ça lui a été reproché vertement une fois le manque de succès du film établi. 

Le destin "physique" du film, à cette époque durant laquelle il fallait de l'espace, du personnel et de la précaution pour conserver un film, et non des pixels et de la mémoire comme aujourd'hui, a été particulièrement contrarié: d'une part, la version souhaitée initialement par Capra, qui durait paraît-il près de trois heures, a été très critiquée par les spectateurs d'une preview, et n'a pas survécu à cette unique présentation en 1937. A la place, c'est un film à la durée notable (Pour la Columbia, décidément pas très fortunée à cette époque) de 130 minutes qui est sorti, réarrangé de la façon qu'on connaît aujourd'hui. Mais la guerre (Dont le film anticipe clairement la venue afin de justifier son message idéaliste) arrivant, une nouvelle version réadaptée a été concoctée, dans laquelle le message pacifiste de Perrault a été amoindri en taillant dans les séquences qui offraient des monologues à Sam Jaffe, parmi les plus difficiles à soutenir aujourd'hui il est vrai. Ont aussi été coupées des scènes, y compris de comédie, de la vie quotidienne à Shangri-la des principaux protagonistes: une scène dans laquelle Glory révélait à Chang son métier par exemple, mais aussi des séquences qui montraient Lovett et Barnard s'accoutumer à leur nouvel environnement. Le film avant sa reconstruction de 1972 avait perdu une vingtaine de minutes, ainsi que son vrai titre, désormais remplacé par son titre Britannique The lost horizons of Shangri-La, qui mettait finalement par la présence du lieu mythique, l'accent sur le côté conte de fées du film. C'est une trahison, car à tort ou à raison, je pense que Capra y croyait dur comme fer...

Quoi qu'il en soit la restauration de 1972, qui réassemble des séquences tirées de douzaines de copies autour d'une bande-son intégrale de la version d'exploitation, nous a restitué une version décente du film, même si incomplète. On notera qu'au moment de la numérisation du film, en 1999, une minute supplémentaire, tirée d'une copie 16mm, a été intégrée au métrage déjà assemblé en 1972.

Si on va au fond, le film est franchement plus que polémique, avec cette intrigue dans laquelle un idéaliste et une poignée de quidams perdus en plein Himalaya découvrent par hasard le paradis sur terre et abandonnent graduellement toute volonté de retourner chez eux alors que la guerre menace! Mais son sens de l'absolu, sa sincérité touchante et le soin maniaque apporté à la réalisation en font le chef d'oeuvre de Frank Capra... ou du moins celui de ses films que je préfère. Peut-être aussi à cause de sa fragilité assumée, de son improbabilité et de son fantastique mâtiné de conte, à cause de ses transgressions aussi, et puis, il y a l'impeccable Ronald  Colman, la ravissante Jane Wyatt, Edward Everett Horton... que voulez-vous?

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Published by François Massarelli - dans Frank Capra Edward Everett Horton