La famille Bourrichon est dans une difficile situation, ils ont des dettes et l'ensemble de leurs créditeurs est à leurs trousses... Une seule solution, prendre la fuite: ils partent en voyage, mais une nuit dans une auberge hantée aura vite raison de leur détermination à fuir...
Fuir, c'est le mot. Le dernier film de Méliès est tout sauf convaincant: encore une fois, il tente d'y présenter un découpage mais ne maîtrise absolument pas la notion de montage; les idées trainent en longueur, et à distance les acteurs sont priés de gesticuler... Ce qui aurait pu ressembler à une joyeuse équipée anarchique, donc bien dans la ligne de ce à quoi le réalisateur nous a habitués, devient tout en ne durant que 15 minutes, un long pensum insupportable... Et Méliès ne tournera plus.
La rivalité entre deux nobles (un brave et jeune gaillard d'un côté, un baron malhonnête de l'autre) pour les affections d'une princesse mène au désastre: le baron décide de faire alliance avec les forces du mal, et fait enlever la jeune femme par Satan et ses troupes venues de l'enfer...
Derrière ce conte a priori original, Méliès entendait probablement se reposer sur les ingrédients fondamentaux de son cinéma: le merveilleux, les effets spéciaux, les décors glorieusement fau en carton, et... Satan, bien sûr jeune premier éternel de son cinéma, son héros préféré, qu'il représente ici en le jouant lui-même, s'installant pour discuter le bout de gras avec le Baron, et invitant toute sa maléfique famille à se joindre à eux...Difficile, on le voit, de rester sérieux...
Mais c'est peine perdue, Méliès est fatigué, et le film est long (en dépit d'une tentative de découpage), les effets spéciaux pas toujours convaincants alors qu'il les a tous inventés! Méliès a du mal à s'adapter à son temps et ça se voit; C'est son avant-dernier film.
Pour son dernier film de deux bobines, du moins le dernier à avoir survécu, Méliès revisite (il en avait déjà réalisé une version au début de la décennie précédente...) avec plus de moyens, mais moins de conviction, l'histoire de cendrillon...
Comme dans La conquête du Pôle, le film est bancal, indiquant une volonté d'intégrer le montage, mais avec des difficultés pour sortir du schéma des tableaux qui se succèdent. Les effets spéciaux ne sont pas franchement folichons, et le metteur en scène échoue à se renouveler, reprenant toujours le même type de narration appelant un commentaire redondant. Méliès, qui n'a presque plus de films à tourner, est arrivé au bout de sa course...
Reprenant les formules qui avaient fait son succès aussi bien pour le Voyage dans la lune (1902) que pour Le voyage à travers l'impossible (1904): une destination improbable, un voyage loufoque, et des péripéties plus délirantes que tout ce qu'on pourrait imaginer... Sauf que cette fois il se laisse aller à réaliser, pour Pathé, un film nettement plus long: deux bobines. C'est ambitieux, et c'est la preuve que Méliès, au moins, est à l'écoute: le format des films, en Europe, s'allonge... L'Italie, le Danemark et la France réalisent des films de long métrage, déjà... Méliès, qui se refuse à quitter le studio, est tributaire de ses habitudes techniques: il a besoin de créer l'illusion dans le plan, et le montage ne lui sert qu'à deux fonctions; premièrement, il crée l'illusion en faisant disparaître, transformer, apparaître et exploser les hommes, les femmes et les objets dans le plan; deuxièmement, une coupe permet de passer à la suite..;
Ce qui explique que dès le départ, le film ne ressemble à rien de contemporain. C'est probablement ce qui l'a coulé, mais Méliès ne peut pas et ne veut pas faire du cinéma comme tout le monde, et désire continuer à faire du cinéma selon ses propres règles. Mais en allongeant, il prenait le risque de faire trop long, et c'est ce qui va être un sérieux problème pour ce film...
Certes, ça commence bien et même très bien avec un contexte qui se complexifie à loisir, avec pour une fois une sous-intrigue (pendant qu'une coalition internationale menée par l'ingénieur Maboul se rend en direction du Pôle Nord dans une machine volante, les Suffragettes désignent l'une des leurs et elle est interprétée par Fernande Albany, préposée à l'humour poids lourd, mais elle disparaîtra dans une scène d'une grande indélicatesse, et ce avant la fin de la première bobine)... Mais si Méliès arrive à garder son style tout en s'ouvrant au monde du cinéma, puisqu'il travaille pour Pathé, il est fatigué, et ses "vues merveilleuses" des cieux, avec ses pin-ups 1910 déguisées en étoiles, font long feu. On remarque ça et là quelques avancées, comme un plan (un seul) tourné "en extérieurs", en fait à l'extérieur du studio de Montreuil.
Il reste le combat contre le "géant des neiges" situé vers la fin: mais si esthétiquement il date le film pour le spectateur d'aujourd'hui, je crains qu'il n'ait aussi sérieusement daté le film à sa sortie, pour le spectateur nourri aux films de Capellani, Feuillade, et qui se pressait aux aventures de Nick Carter de Victorin Jasset... Et comme la plupart des séquences, lui aussi tire sérieusement en longueur.
Egalement produit par Pathé, ce film est le deuxième et dernier qui soit disponible pour l'année 1911 après le Vitrail Diabolique... Et si on s'attend légitimement à un film du plus haut intérêt (Méliès s'emparant de Munchausen!!), c'est plus que décevant...
Le film a des intertitres, dans les copies actuellement disponibles (tirées d'une copie 16 mm manifestement). la caméra est particulièrement proche de l'action, ce qui n'est pas banal non plus pour l'auteur! Le Baron a abusé lors d'un repas et va se coucher, avec son petit personnel qui est aux petits soins avec lui... Ils le couchent près d'un miroir, qui va devenir le théâtre d'une féérie qui virera bien vite au cauchemar...
Le miroir n'en est pas un, sauf pour un plan situé vers la fin (un plan dans lequel le baron casse, justement, le miroir!); l'une des caractéristiques les plus intéressantes du film est la création inattendue et malencontreuse d'un gag qui s'ignore: pour établir que l'espace situé derrière le canapé où le Barn se repose est bien un miroir (alors qu'il n'en est rien, c'est une illusion), Méliès a placé un deuxième divan identique, sur lequel il a demandé à un acteur habillé de la même façon que son baron de répéter occasionnellement les mêmes gestes... Ils ne le font qu'un peu, juste pour que le spectateur s'imagine effectivement qu'il s'agit d'un miroir... Mais d'autres y verront une possibilité pour un gag génial: il sera décliné de nombreuses fois, de Charley Chase au Marx Brothers en passant par ce qui est la meilleure incarnation du numéro, dans Seven years bad luck, de Max Linder...
Au-delà, et e dépit d'efforts louables pour renouer avec l'inspiration passée (voir les photos qui accompagnent cet article...) c'est donc un film bien routinier, et même assez franchement médiocre...
Satan torture un vieillard en utilisant un vitrail magique, représentant une jeune femme qui va devenir réelle, se multiplier, promettre, et... faire tourner le vieil homme en bourrique...
Le film est l'un des deux qui nous restent, semble-t-il, de Méliès pour l'année 1911. C'était désormais Pathé qui contrôlait la production de la Star-film, et commandait donc au cinéaste des courts métrages... Sachant qu'il était quand même bien loin de pouvoir rivaliser avec la production de l'époque, on peut se demander pourquoi on avait fait appel à lui, mais il est sûr que le nom de Méliès même valait encore quelque chose...
Mais le film, bien qu'il repose sur un grand nombre d'effets spéciaux, est bien poussif, et on sent que Méliès a du mal à se motiver...
Avec deux assistantes, et un compère, Méliès grimé en illusionniste s'amuse cette fois à nous faire croire qu'il fait apparaître un papillon et une araignée (ce sont les deux jeunes femmes)...
Le film est incomplet, et c'est dommage, car on a assez peu, aujourd'hui, des films de Méliès de cette année 1909. La production s'est vite tarie, et le public n'avait plus envie de ces bandes très courtes qu'il identifiait comme étant d'un autre âge...
Alors que l'étau de la concurrence se referme sur lui et qu'il doit bientôt déposer le bilan de sa société, Méliès effectue quelques films pour survivre, et garde intact son style des débuts: celui-ci est clairement un retour à l'inspiration qui ne l'a jamais vraiment quitté, celle des scènes où il se livrait à l'illusionnisme.
Avec un compère et une charmante assistante, il livre donc quelques numéros, quelques pirouettes et quelques gags, en profitant comme il savait le faire pour littéralement sortir par la boîte et revenir par la porte...
En 1909, Georges Méliès cessera de tourner, en pleine banqueroute. Etranglé par la concurrence avec laquelle il accepte de travailler (ses derniers films de la marque Star Film seront distribués par Pathé) avant de directement travailler pour eux... à la toute fin, quand il reviendra en 1911...
Mais certains de ces films montrent Méliès en forme, et celui-ci, une petite merveille particulièrement soignée (et ça faisait longtemps!), en fait clairement partie: un locataire mystérieux (Méliès) loue une chambre totalement vide, et la meuble à partir de ses bagages, dont il sort non seulement du mobilier, mais aussi des gens! Les propriétaires, on les comprend, s'émeuvent...
Le réalisateur-magicien, ici, renoue avec la veine exubérante de ses plus belles comédies à trucs, et le film, tout en recyclant des idées qui viennent de Satan en prison, sorti en 1907. Mais s'il n'est pas Satan, le locataire (donc, diabolique) est un esprit particulièrement malicieux, dont le premier geste en prenant possession des lieux sera de congédier l'ouvrier qui finit la chambre, en e jetant littéralement par la fenêtre... Et Méliès s'amuse comme un gosse avec toute une batterie d'effets spéciaux qu'il maîtrise totalement... Pour notre plus grand plaisir.
Pour son premier film identifié de 1909, Méliès va avoir une idée formidable, et en tirer un film qui combine habilement une situation de comédie (pas de ballet donc comme dans ses fééries, et c'est tant mieux), et une intrigue à effets spéciaux... Et il va faire monter le suspense, jusqu'à un gag particulièrement exagéré où son sens de l'absurde explose...
Un homme obèse, s'adresse à une clinique spécialisée, pour un traitement de choc. Le médecin (Méliès), aidé de ses assistants, va lui infliger, en effet, une thérapie particulièrement drastique dont il sortira... changé.
Le film est un rescapé, trouvé il y a peu, et pas dans un état très engageant! Mais l'énergie dépensée, la clarté aussi du récit (ni intertitres, comme d'habitude, ni boniments ne sont fournis), et l'absurde joyeusement anarchique de la situation font merveille, et on appréciera l'explosion loufoque, avec une utilisation très maîtrisée des arrêts de caméra, pour montrer Méliès récupérant au quatre coins de la pièce les membres de son infortuné patient!