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20 novembre 2016 7 20 /11 /novembre /2016 09:00

L'année 1929, il valait mieux parler, sinon le succès ne pouvait pas être au rendez-vous. Combien de films Américains ont-ils sacrifiés sur l'autel absurde du micro, cette croyance dans le fait que le muet était définitivement révolu? Du reste, peu de films muets d'envergure ont été tournés cette année-là. Dans cette situation d'expédition des derniers films muets, sacrifiés au tout-bavard, Eternal love ne fait pas exception: généralement considéré comme étant sans le moindre intérêt, et par ailleurs il est vrai qu'il se rattache justement essentiellement au style muet de Lubitsch, plongé dans la routine flamboyante et un peu vide des productions de John Barrymore, des films à l'ancienne, entièrement à la gloire de l'acteur, et tournés selon ses termes.

Et pourtant...

Début du XIXe siècle: dans les Alpes Suisses, une petite communauté montagnarde subit de plein fouet l'occupation Française. A la fin des conflits, la libération est le prétexte d'une célébration durant laquelle tout le village se retrouve à danser et boire. Et Marcus (John Barrymore) en profite pour une fois de plus dire son amour à la belle Ciglia (Camilla Horn), la nièce du prêtre de la paroisse. Il n'est as le seul sur les rangs: Lorenz (Victor Varconi), un utre villageois un peu moins impétueux que lui, est amoureux de la belle. Mais s'il est clair que Ciglia aime Marcus, ce n'est pas au point de céder à ses avances alors qu'il a clairement trop bu. Il rentre donc chez lui, saoul, et ne s'attendait pas à trouver dans sa chambre Pia (Mona Rico), une jeune femme qui le suit partout et qui elle est prête à tout... Y compris, le lendemain, à faire un scandale retentissant: Marcus épouse donc Pia, et Ciglia est promise à Lorenz; le drame couve...

On retrouve ici deux univers: celui de Barrymore y est présent, son impétuosité, le romantisme exacerbé, la flamboyance des sentiments, des actions, du sacrifice et aussi, parfois, l'excès dans le péché! Les clichés qui ont la peau dure, aussi... De son côté, Lubitsch apporte sa science de la mise en scène des liens invisibles entre les êtres, son savoir-faire pour représenter la foule et son idéologie, et bien sur un ton décalé, qui passe par une observation pointilleuse et un sens du détail consommé. Et cerise sur le gâteau, Lubistch a réalisé en 1920, dans les montagnes enneigées du Tyrol, Romeo und Julia im Schnee, une autre histoire d'amour, mais qui était elle traitée beaucoup plus sur le ton de la comédie. C'est d'ailleurs l'une des clés de l'oubli flagrant dans lequel ce film tardif est tombé: ce n'est pas une comédie, mais bien un film ouvertement sentimental, dont la noirceur rejoint l'âpreté souvent associée au lointain souvenir du film perdu The patriot, réalisé l'année précédente par Lubitsch. et juste avant, le metteur en scène avait tourné pour la MGM The student prince, qui faisait évoluer la comédie sentimentale vers le drame... Or ce n'est pas l'image de lubitsch aux Etats-unis; peut-être le metteur en scène a =-t-il aussi peu gouté cet exercice de style?

...En ce cas ça ne se voit pas beaucoup, car s'il a bien fait le travail qui lui était demandé et utilisé son savoir-faire pour tourner des séquences lyriques de LA star Barrymore en montagnard fier, dans les décors absolument magnifiques de l'Alberta, des scènes d'avalanche et des scènes de foule impeccables, ce qui a le plus motivé Lubitsch dans ce film, c'est bien sur l'intime, le fonctionnement visuel d'une communauté en proie à la suspicion et au ragot; il lui fat peu d'images pour installer dès le début du film cette impression de rejet basé sur la jalousie et la bêtise, de Marcus par la population des braves gens qui jamais ne se mêleront d'autre chose que de ce qui ne les regarde pas!

Et la façon dont Lubitsch utilise la caméra et le montage, les détails et parfois leur absence, pour amener une idée à bon port, est ici au sommet de son art: plusieurs scènes pour se faire plaisir, en fait: dans l'une, on voit le prêtre chez lui, servi par sa bonne qui est triste de le voir soucieux. On la suit jusqu'à la pièce ou est Ciglia, et la bonne est triste de la voir soucieuse également. Une cloche: on a sonné: la bonne va voir, revient et apparaît radieuse à la porte: Ciglia pleine d'espoir attend: mais c'est Lorenz. Quelques instants après sa visite, la cloche de nouveau: la bonne va ouvrir, et Ciglia attend: cette fois, quand la porte de la pièce s'ouvre, on aperçoit juste la main de la bonne qui dépose dans la pièce un fusil. Nous savons à qui appartient ce fusil, et Ciglia aussi. Son visage s'éclaire... pas d'intertitre, même pas une image de Marcus, mais le message est passé. Dans l'autre scène qui me vient à l'esprit, Marcus est rentré chez lui après sa tentative maladroite de séduire Ciglia lors d'un bal costumé, et il est flanqué de Pia. Il se débarrasse d'elle sans le moindre ménagement, avant de rentrer dans sa maison. Quelques instants plus tard, il ressort, inquiet: et si la jeune femme était restée pour tenter d'entrer? Il ne la voit pas, rentre de nouveau dans sa maison. Le dernier plan nous le montre entrant dans sa chambre et déposant ses affaires puis regardant droit devant lui, une expression de surprise au visage; nous ne verrons pas ce qu'il a vu, mais la caméra fait un léger détour sur la droite, et au mur, nous apercevons, accroché à une patère, le masque que portait Pia...

Certes, ces jolies efforts de mise en scène sont au service d'un mélodrame des plus embarrassants, et ces belles images ne sont guère plus que le dernier souffle d'un cinéma muet en pleine agonie. Mais dans un film qui tente, à sa façon, de donner la version de Lubitsch de la mise en scène à la Murnau (C'est flagrant dans la façon de montrer les intérieurs de ces maisons rigoristes de montagnards teigneux), qui une fois posé le style de jeu flamboyant et encombrant de la Star incontestée, permet à des acteurs aussi intéressants que Varconi et Horn (Très probablement dirigés en Allemand, ils sont d'une grande justesse) de briller dans des rôles qui échappent eux aux clichés qui auraient pu les handicaper, il y a beaucoup plus que ces conventions. Que ce ne soit pas le meilleur film de Lubitch, c'est entendu, mais c'est un excellent film de John Barrymore.

Pour finir, une petite pointe d'ironie positive: Mary Pickford, qui avait fait venir Lubitsch aux Etats-Unis en 1923, lui gardait rancune de leur mésentente sur le tournage de Rosita. Elle prétendait des années plus tard que c'était un incapable, qu'il n'était motivé que par la représentation des portes... C'est amusant de constater qu'ici, on a en effet une "mise en scène des portes", dans ces scènes qui savent utiliser les rapports entre les gens et le fonctionnement ancillaire des maisons, pour montrer la vie. Mais c'est sans doute aussi très paradoxal, que ce film muet tardif et si mal vu ait survécu justement grâce à l'appui, du vivant de la star; de... la Fondation Mary Pickford, entièrement dédiée à la préservation et au sauvetage des films muets.

Merci, Mary, grande dame jusqu'au bout.

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Published by François Massarelli - dans Muet Ernst Lubitsch John Barrymore 1929 *
13 novembre 2016 7 13 /11 /novembre /2016 09:41

Les problèmes n'ont pas manqué lorsque ce film, une production Cinégraphic réalisée en partenariat avec Gaumont-British, s'est fait: l'un des acteurs de premier plan est décédé, et la star Anglaise Betty Balfour est tombée sérieusement malade, par exemple. Le choix de L'Herbier de tourner tous les extérieurs à Honfleur, le lieu où est sensé se passer l'action, s'est avéré difficile à assumer, et à la sortie du film, le verdict généralisé a été sans appel: c'est comme L'homme du large, mais e moins bien, ont dit les critiques! ...Or c'est on ne peut plus faux! Car si de nombreux commentateurs, y compris aujourd'hui, se plaignent du jeu de Betty Balfour, je pense que c'est un atout, et autant je trouve le film de 1920 souvent ridicule et prétentieux, autant j'aime celui-ci...

A Honfleur, on suit les vies quotidiennes de deux familles, qu'on ne peut pas imaginer plus différentes l'une de l'autre. Les Bucaille sont des fainéants: le père boit tout l'argent de sa paie de marin, la mère laisse les enfants traîner dans les rues, et la fille aînée Ludivine (Betty Balfour) est la meneuse, non seulement de ses deux voyous de jeunes frères, mais aussi de tous les gamins du quartier, qui passent leur temps à faire des crasses... Leurs victimes favorites sont les Leherg, une famille étrangère qui est venue s'installer à Honfleur: le père est marin, et le grand fils Delphin (Jaque Catelain) aussi; la mère maintient sa maison en ordre, et le soir ils s'attablent tous les trois avec pour commencer une prière. Ludivine aime mener des opérations contre eux, qui consistent essentiellement à jeter des pierres sur leur maison, à la faveur de la nuit. Un jour, les deux hommes Leherg sont victimes d'une tempête, et Ludivine est persuadée en être la cause; après une "expédition" chez les Leherg, le père et le garçon lui ont fait part de leur mécontentement! Elle leur a souhaité à tous les deux de mourir... Mais Delphin en réchappe. Lorsque sa mère meurt, de chagrin, Ludivine repentante demade à ses parents de le prendre chez eux. Elle insiste tant, que la famille cède...

Bien sur c'est un mélodrame, complet, avec son improbable histoire d'amour. Mais L'Herbier ne serait pas L'Herbier sans la couleur locale, et ici bien sur c'est l'univers du port de Honfleur, avec ses trognes authentiques, ses cérémonies religieuses et processions avec don d'ex-votos à la vierge: des maquettes de bateaux, sur socle, dans des bouteilles, voire fixées sur des sabots, qui sont sensées les protéger une fois en mer. Le metteur en scène reste fidèle aussi à ses choix d'auteur bourgeois d'histoires populaires (Même si le film est adapté d'un roman de Lucie Delarue-Mardrus, complètement oublié aujourd'hui): sa distinction entre les feignants, les Bucaille, vulgaires, sales et sans dieu, et les braves gens, les Leherg, travailleurs, propres, et pieux, est l'essence même du mélodrame! Mais dans cette intrigue qui se nourrit de l'arrivée extérieure d'une menace, celle d'un malhonnête qui décide de s'approprier Ludivine pour en faire la vedette d'un bar à matelots, et tant pis s'il faut organiser un simulacre de mariage d'abord, fait loucher le flm du côté de Griffith!

Et c'est sans doute là que l'apport de Betty Balfour est crucial, car elle rythme non seulement toute la première partie du film de son énergie communicative, mais en plus elle oppose à Jaque Catelain un jeu tout en contrastes, dans lequel elle sait jouer de ses yeux, et de ses gestes. Il est remarquable d'ailleurs de constater que l'acteur, généralement si fade, semble ici bénéficier de cette partenaire, si différente des rôles interprétés par Marcelle Pradot habituellement! Et Honfleur inspire L'Herbier avec son authenticité visuelle, sans parler du clou du spectacle, une tempête métaphorique dans laquelle Ludivine et Delphin vont enfin admettre leur amour. Le metteur en scène va d'ailleurs concentrer ses audaces de mise en scène à l'approche de cet événement, adoptant pour la première partie un rythme soutenu, mais essentiellement efficace... Bref, on est ici devant l'un des meilleurs films de son auteur, tout simplement.

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Published by François Massarelli - dans Muet Marcel L'Herbier 1927 **
5 novembre 2016 6 05 /11 /novembre /2016 08:10

Ceci est un court métrage, qui remplit solidement ses deux bobines de film, en racontant par le menu le mécanisme qui conduit une femme ayant le désir d'être indépendante vers la prostitution, au début du 20e siècle aux Etats-unis... On y voit les "travaux d'approche" des "trafiquants", puis leur technique de mise en dépendance de la victime, avec faux mariage et toutes les ficelles du genre, entre New York et New Orleans, et on voit comment les proxénètes se jettent sur les immigrantes de fraîche date, une proie facile. Ce qui a poussé les autorités d'Ellis Island à interdire l'accès du pays aux femmes arrivées seules...

Dans ce film sorti il y a bien longtemps, dans une galaxie loin d'Hollywood, on assiste donc à la mise en marche de tous les mécanismes du glissement vers la prostitution, même si le mot n'est jamais présent; à la place, l'euphémisme 'slave' remplit son rôle. Mais ce n'est pas une charge contre les femmes elles-mêmes; plutôt contre ceux qui les exploitent, dont les méthodes sont ici exposées de façon naïve, mais sans pour autant tomber dans le happy end de façade. Et ce film qui tentait justement de ne pas tomber dans le conte de fées cinématographique, finit par créer à sa façon un certain nombre de figures qui seront ensuite reprises dans de nombreux films à caractère social ou polémique, puis dans les mélos des années 20... Un document passionnant, donc...

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Published by François Massarelli - dans Muet
1 novembre 2016 2 01 /11 /novembre /2016 18:47

The unseen enemy est un de ces thrillers comme Griffith en produisait presque sans réfléchir, avec ses héros assiégés, son héros qui rameutait de l’aide, son téléphone, unique lien entre le dedans et le dehors, et ses moyens de locomotion en pagaille qui servaient à sauver tout le monde. Il ne fait pas exception à la règle: tout le monde est sauvé à la fin. Alors, pourquoi en parler? Sans doute que l’arrivée des Soeurs Gish est un événement suffisant en soi, pourtant il entraîne plus de déception que de satisfaction; non qu’elles jouent mal: ce sont les sœurs Gish, enfin!

Non, c’est plutôt Griffith qui nous déçoit a posteriori. Il croyait dur comme fer que des deux, le génie, c’était Dorothy, pas Lillian, et il s’est employé à donner à Dorothy le beau rôle et des tonnes de choses à faire, et à Lillian, rien ou presque. Cette situation durera quelques mois avant que Griffith ne se rende compte de sa bourde…

Mais n’anticipons pas. Ce film nous conte donc la lamentable histoire de deux jeunes sœurs, orphelines depuis peu, et dont le frère vient apporter une somme d’argent, mise en coffre sous les yeux torves d’une femme de ménage louche… Celle-ci va téléphoner à des bandits de sa connaissance, qui vont profiter du fait que les deux jeunes filles sont seules pour venir dérober l’argent, pendant que les deux filles, apeurées, contactent leur frère par téléphone, pendant qu’elles ont enfermées.

Le dispositif de la maison assiégée est ici complexe, avec d’abord une menace qui vient de la maison elle-même, avec la complicité de la domestique, le déplacement, par rapport au modèle de The lonely Villa, du centre d’intérêt des bandits : les deux sœurs sont dans une pièce et le magot dans la pièce ou sont les bandits; la cerise sur le gâteau, c’est un petit espace par lequel les deux pièces communiquent: il permet aux bandits de passer un bras avec une arme, qui tire en aveugle quelques coups de feu. 

Ici, à la vision de ce trou dans le mur dont dépasse une forme phallique (et chargée) se situerait une inévitable lecture Freudienne, mais celle-ci a probablement besoin d’un coup de pouce supplémentaire; retournons en arrière, et ajoutons un personnage: au début du film, les deux jeunes filles sont dehors, et Bobby Harron intervient: il joue le petit ami (Un gentil benêt) de Dorothy. Celle-ci lui refuse un baiser au moment de le voir partir pour ses études, et il s’en va tout penaud. Lors du siège, donc, avec Lillian toute traumatisée qui se réfugie dans ses bras, Dorothy décide de tenter le tout pour le tout, et s’approche du fameux trou dans le mur, lentement, en rassemblant tout son courage. La caméra reste cadrée sur Lillian, ce qui fait que Dorothy dépasse bientôt du cadre. Le plan suivant nous montre l’action élargie, et Dorothy qui s’approche du trou, dans le but de saisir l’arme sans doute, mais le bras surgit brusquement, et elle renonce, apeurée. A ce moment, Griffith coupe et nous montre, deux secondes durant, le gentil fiancé. A la fin du film, les deux amoureux, une fois les filles sauvées, s’échangeront enfin un chaste mais décisif baiser.

Ouf! Le siège d’une maison, nous dit Griffith, n’est pas que l’atteinte à la famille; du reste, avec des parents décédés, une domestique traîtresse, et un frère qui est trop grand pour rester à la maison, cette famille est réduite aux deux jeune filles. Les connotations sexuelles de ce film vont donc particulièrement droit au but, et apportent rétrospectivement à toutes ces scènes de maisons assiégées, d’enfermement et de femmes qui prennent les armes, l’initiative, et le taureau par les cornes une lecture sans ambiguïté. Il est dommage que Griffith n’ait pas eu mieux à faire de Lillian Gish, qui se contente de rester à l’écart pendant la scène de flirt entre Harron et Dorothy, et qui contrairement à sa sœur a peu d’accessoires pour soutenir son jeu; quant on sait l’usage qu’elle saura faire de tout accessoire possible et imaginable dans ses films ultérieurs, c’est vraiment dommage. Mais ce n’est que partie remise…

 
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Published by François Massarelli - dans Muet David Wark Griffith Lillian Gish Dorothy Gish
1 novembre 2016 2 01 /11 /novembre /2016 18:43

Ce film contient l’essentiel de son “message” dans le titre : Griffith décide de commencer son court métrage par deux mariages, semble-t-il aisés tous les deux. Seulement l’un des couples va tomber dans les ennuis, puis la pauvreté. Le pli est pris, et Griffith continue de nous les présenter en parallèle, mais c’est justifié par l’intrigue: ils vont se rencontrer. L’intrigue est centrée autour de la décision douteuse que l’homme riche (Edwin August) a prise: il a accepté un pot-de-vin, à l’insu de son épouse (Blanche Sweet). Elle le découvre le jour ou l’homme pauvre (Charles West) s’introduit chez elle pour voler l’enveloppe d’argent du pot-de-vin. Elle décide de laisser partir le cambrioleur qui retourne vers son épouse (Dorothy Bernard). Elle met le mari face à ses responsabilités; celui-ci décide de rendre l’argent et d’aider le couple pauvre à s’insérer.

Le scénario n’est pas, on le remarque, des plus révolutionnaires. Le traitement est intéressant pourtant: apparemment détachée et frivole, l’épouse jouée par Blanche Sweet va non seulement être le pivot de l’intrigue, mais l’essentiel passe par son point de vue. Le montage est utilisé ici moins pour le suspense (La tentative du cambrioleur se tient en un plan) que pour effectuer le parallèle entre les destinées des deux couples et pour souligner les tourments intérieurs : ainsi lorsque le cambrioleur repart chez lui, il nous est montré dans sa cabane, accueilli par son épouse. Blanche Sweet et Edwin August, quant à eux, ont droit à leur espace privatif, séparés dans la maison par une cloison ET par le montage.

Pour finir avec ce film somme toute mineur, ajoutons que Griffith permet à Blanche Sweet (Il est vrai qu’elle joue une riche oisive, donc elle a le temps) d’user de toute sa séduction: robe décolletée, "déshabillé" 1912 pas trop vaporeux quand même. Elle illumine l’écran, on ne voit qu’elle: c’est le but. Précisons que sinon, son jeu est irréprochable, et le serait d'ailleurs y compris si elle était habillée d'un sac de patates.

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Published by François Massarelli - dans David Wark Griffith Muet
31 octobre 2016 1 31 /10 /octobre /2016 17:24

1912 est une année formidable pour David Wark Griffith, qui accumule les oeuvres importantes. Parmi celles-ci, il va faire un pur film de femmes, cru et gonflé, précurseur de Greed, Treasure of the Sierra Madre ou The wind, et dans lequel il va confronter trois de ses actrices au désert: The female of the species.

Dans ce petit drame situé en plein désert, c’est le chaos qui nous est d’abord présenté : une mine désormais improductive ayant fermé, quatre personnes, les derniers, doivent partir : un couple (Charles west et Claire McDowell), la sœur (Mary Pickford) de l’épouse et une troisième femme (Dorothy Bernard). Très vite, le mari va succomber lors de leur traversée littérale du désert, et le sentiment d’abandon, ajouté à des crises de jalousie, ressenti par sa veuve vont attiser la mésentente entre les trois femmes; désormais détentrices de l’autorité puisque l’une d’entre elles a « hérité d’un pistolet par le décès de son mari, elles vont projeter de se débarrasser de la troisième femme. Un événement lointain va leur permettre de regagner une part d’humanité : lorsqu’un couple d’Indiens errants va rencontrer deux prospecteurs blancs, ceux-ci vont abattre l’homme alors qu’il tentait de leur voler de l’eau pour sa femme. Celle-ci va succomber peu après, et Claire McDowell va entendre l’enfant pleurer au loin au moment ou elle s’apprêtait à tuer Dorothy Bernard. L’enfant va redonner une raison de vivre aux trois femmes, mère plutôt qu’épouses dans ce monde ou l’homme n’est pas suffisamment solide pour rester en vie, et leur permettre de survivre au désert. Le dernier intertitre, situé juste avant un plan, dans lequel les trois femmes sortent du cadre, est assez clair: « Womankind »: une humanité réduite à la femme; ce pourrait être le titre du film, tant les efforts de Griffith pour se débarrasser des hommes sont évidents. Ils sont éliminés littéralement (L’Indien, le mari) ou par le scénario: les deux cow-boys qui tuent l’Indien disparaissent aussitôt du film.

Les actrices sont remarquables, peu maquillées, et servies par une caméra toujours plus proche. Pickford fait assez peu de choses, mais soutient McDowell avec un jeu de regards assez intense. Elle fait presque cruelle parfois, en tout cas très endurcie; McDowell est la moins convaincante, quant à Dorothy Bernard, qui joue la moins solide et la plus solitaire des trois, elle a le redoutable honneur de devour jouer la quasi folie, et il est frappant de voir son visage blanc balayé de ses longs cheveux : on voit parfois Lillian Gish en Letty Mason (The wind, Sjöström, 1928). Ce n’est pas un petit compliment… Pour finir sur ce film, on pourrait faire une remarque sur la représentation éminemment freudienne de l’autorité par une arme, mais cela serait probablement redondant. Malgré tout ça va totalement dans le sens du film. Mais laissons Freud de coté, il reviendra dès le paragraphe suivant, et il aura des choses à dire!

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Published by François Massarelli - dans David Wark Griffith Muet Mary Pickford
29 octobre 2016 6 29 /10 /octobre /2016 09:17

La série des courts métrages consacrés à la guerre de Sécession, nommée simplement «Civil war» aux Etats-Unis dans la mesure où ils n’en connurent qu’une, est inaugurée en septembre 1909 avec In old Kentucky, un film au scénario hautement symbolique : Selon la filmographie établie par Patrick Brion, « La déclaration de la guerre civile déchire une famille dont les deux fils finiront pourtant par se réconcilier, après avoir combattu dans des camps opposés. » Le choix du Kentucky était dramatiquement important, puisqu’il s’agissait durant la guerre civile d’un état neutre, un état du sud ayant choisi de ne pas faire sécession par prudence, mais dont de nombreux habitants prendront la décision de rallier l’un ou l’autre des deux camps. Le choix permettait à Griffith de conter une histoire qui renvoie à l’âme Américaine avant tout, mais avait une résonance familiale aussi, puisque le metteur en scène était natif du Kentucky, d’une famille dont le coeur, c’est bien connu, penchait franchement du coté de la confédération, son père, Jacob ayant combattu aux cotés du Général Lee. Pourtant, si les films sont nombreux à revenir à cette guerre, il me semble que c’est moins par le coté personnel que par le coté dramatique que Griffith s’est attaché à revenir souvent à la guerre. Après tout, pour Griffith, c’était un terrain rêvé : les histoires de l’ouest Américain et des Indiens l’intéressaient, mais n’avaient pas ce coté fédérateur et historique qu’il recherchait, dans la mesure où il ne les datait jamais, à plus forte raison s’il devait en critiquer les protagonistes blancs : on peut considérer qu’ils étaient à la fois contemporains et historiques. Les sujets bibliques ou renaissance l’intéressaient pour pouvoir faire concurrence aux Européens, mais ils sont bien médiocres, et académiques aujourd’hui ; non, le sujet de la guerre civile était cet élément dramatiquement rassembleur dont Griffith avait besoin pour emporter l’adhésion du public, et comme il tournait des œuvres distribuées sur tout le territoire, il pouvait privilégier les deux cotés alternativement, afin de ne pas s’aliéner le public de la Biograph. Au moment de voir ces petits films aujourd’hui, il faut se rappeler que dans de nombreuses familles, on avait des anecdotes de la guerre civile, cocasses, patriotiques, authentiques ou romancées, vécues ou rapportées par un tiers. Ce sont toutes ces anecdotes qui vont former le matériau de base de ces courts métrages, qui une fois rassemblées représentent une assez bonne vue d’ensemble de l’héritage de la Guerre de sécession, finie 45 ans plus tôt, en ce début du 20e siècle. Toutes ces raisons expliquent pourquoi au moment de passer au très long métrage en 1914, il a choisi une histoire liée à la guerre civile. Le seul problème est qu’il choisira à cette occasion un matériau un peu trop explosif, mais n’anticipons pas.
L’année 1910 est d’autant plus riche en films consacrés à la guerre civile que le public suit. La plupart des films permettent à Griffith, en jouant sur les cordes universellement sensibles de l’honneur, de la lâcheté, de la perte d’un membre de la famille, d’éviter de prendre ouvertement parti pour un camp ou pour l’autre. Tous ces films reposent sur le savoir-faire désormais solide de Griffith, de ses acteurs et de Billy Bitzer, et utilisent à merveille les ressources des décors naturels du New Jersey, en particuliers les collines qui permettent systématiquement à Griffith de donner du relief à ses compositions. La guerre y est présentée comme une fatalité, un déchirement, et on le voit, les thèmes et les tendances qui seront à la base des ressorts dramatiques de Birth of a nation sont déjà là, sauf le racisme, sinon dans la représentation occasionnellement paternaliste (His trust, His trust fulfilled) des esclaves. Et cerise sur le gâteau, Griffith se sent tant pousser des ailes avec la guerre qu’il va tenter son premier film « long », sur ce thème: c’est à la fin de 1910 que Griffith se lance dans cette histoire mélodramatique dont il entend bien faire son premier film de deux bobines. Le format est déjà expérimenté, dans un contexte peu favorable : la plupart des compagnies Américaines freinent autant que possible afin de ne pas dépasser le film d’une bobine, dans le but de ne pas effrayer un public de masse dont on se dit qu’il n’a aucun pouvoir de concentration. Les films Européens d’une longueur supérieure sont encore considérés comme trop sophistiqués ; le plus souvent, ils sont distribués en bobines séparées, lorsqu’ils sont montrés au grand public, mais c’est assez rare. Pas de chance pour les gens de la Biograph, c’est ce modèle que Griffith s’est fixé : il veut, lui aussi, raconter des histoires plus longues. Mais il choisit, pour cette première expérience, un sujet Américain, plus prudemment, et c’est tout naturellement qu’il se tourne une fois de plus, vers la guerre civile. Le (Ou les) film(s) obtenu(s)ainsi représentent la première des trois étapes vers le long métrage pour le futur auteur de The Birth of a nation. Griffith tourne les deux parties en séquence, en novembre 1910, et propose de sortir le tout en une séance. La Biograph n’accepte pas, mais si un intertitre annonce dès le départ du premier film que les deux œuvres sont bien séparées, et peuvent être vues indépendamment l’une de l’autre, on ne peut qu’en douter.

L’histoire racontée est cousue de fil blanc, et concerne une famille Sudiste dont le père part à la guerre. Il confie sa femme et son fils à son esclave George, un « House slave » qui doit être plus ou moins l’équivalent d ’un majordome. A la mort de l’officier, George se sacrifie toujours plus pour protéger la famille, notamment lorsque la plantation est pillée. Il les accueille dans sa cabane lorsque la maison est incendiée par les yankees, et se chargera de l’éducation de la petite une fois l’épouse morte de chagrin, d’humiliation, et d’épuisement...

Le propos de Griffith est de raconter du bon gros mélo qui tache, tout en faisant passer un message sur la fidélité du bon noir et ces braves esclaves qui ont tout sacrifié pour le bien-être de leurs maîtres ; en gros il s’agit de sa vision de la tolérance, mais la vision des noirs en « Black face » qui applaudissent et gesticulent en roulant des yeux le départ de leurs tortionnaires vers la guerre, ou s’enfuient à la vision des diables bleus dont on sait qu’officiellement, ils étaient justement là pour libérer les esclaves, tout cela rend le message problématique. En tout cas, même en situant le point de vue du coté sudiste, on est en pleine Case de l’oncle Tom. Par contre, tout le film (His trust) prend bien le Majordome George pour héros. Sinon, que de gros sabots! Incidemment, il convient de rappeler que la raison qui poussait Griffith à toujours représenter les noirs en les faisant jouer par des acteurs déguisés (Et très mal maquillés) tenait en fait aux lois raciales de plusieurs états qui interdisaient aux hommes noirs de côtoyer des femmes blanches en public. Il fallait donc utiliser des acteurs blancs, et rendre le déguisement aussi visible que possible.

Les différences entre les deux parties (La première se clôt sur l’arrivée de la famille ruinée dans la cabane) tiennent dans le choix des décors : beaucoup d’extérieurs dans His trust, uniquement des intérieurs, et peu nombreux dans His trust fulfilled. Sinon, bien sur, la première partie se situe en temps de guerre, et permet à Griffith d’assurer ce qui est son forte, les scènes de bataille vigoureuses et fédératrices. Mais la deuxième partie s’éternise, et donne le sentiment s’être un étirement forcé ; bref: à vouloir tenter de ménager le public, et à montrer patte blanche en convoquant toutes les grosses ficelles, Griffith a tout raté : non seulement le film est sorti en deux parties en janvier 1911, mais en plus il est très médiocre, surtout vu en continuité : tout pousse à croire que Griffith a choisi de simplifier à l’extrême ses propos, lui qui avait abordé ce même thème avec une réelle sophistication dans les autres films. Néanmoins, il a posé les premiers jalons d’une évolution qui lui permettra finalement de raconter des histoires plus longues, de le faire accepter par ses commanditaires, et par le public, qui ne s’en est jamais plaint. 

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Published by François Massarelli - dans David Wark Griffith Muet
25 octobre 2016 2 25 /10 /octobre /2016 19:03

Comme The unchanging sea, Ramona ou The girl and her trust, ce court métrage fait partie des premières oeuvres tournées par Griffith en Californie, et d'emblée on est frappé par l'usage dramatique qui s'impose, des scènes dans le désert, à ces petites villes (San Fernando, une ville authentique, mais qui semble un décor de western pur!) qui sont utilisées pour fournir un maximum d'authenticité. le film est un pur mélo, qui repose sur des ficelles un peu grosses, mais d'une certaine façon les qualités du film effacent volontiers les ratés.

Un vieux prospecteur fatigué (W. Chrystie Miller) et sa fille (Marion Leonard)sont dans le désert Californien. Ils ont trouvé de l'or, et s'apprêtent à rentrer chez eux, mais alors que la fille s'est éloignée, un vagabond (Dell Henderson) vole l'or et tue le vieil homme accidentellement. Il erre dans le désert, et s'écroule, mais il est sauvé... par la jeune femme, qui après avoir juré de confondre l'assassin de son père, a fait route vers la ville. Ils rentrent tous deux, et sot attirés l'un par l'autre... Mais que va-t-il se passer quand Marion va découvrir qui est l'homme qu'elle a sauvé?

Laissant ses acteurs gesticuler dans tous les sens, Griffith sait que son décor rachète tous les excès. On est curieux d'imaginer ce que Mary Pickford aurait pu faire d'un tel film, mais en l'état il est déjà puissant, et paradoxalement, on y sent, 9 ans avant, des bouffées du trésor d'Arne de Mauritz Stiller...

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Published by François Massarelli - dans Muet Western David Wark Griffith
25 octobre 2016 2 25 /10 /octobre /2016 18:46

Ce film, qui appartient à une série plus éducative, avec morale à la clé, est intéressant en particulier à deux titres : d’une part par sa construction en trois actes, très étudiée, et soulignée par la mise en scène ; d’autre part pour le jeu et la dilatation du temps : Griffith à l’époque tendait à comprimer le temps, enfilant en un plan de 15 secondes des actions qui auraient pris 15 minutes : la fouille de la roulotte de Dollie, par exemple, ou la mort du vieux chef dans le film précédent. En revanche, dans ce nouveau film, le metteur en scène pousse ses acteurs à délayer les réactions, à jouer de façon mesurée. Un parti-pris intéressant qui se répercutera aussi bien sur le réalisme et la dignité de l’ensemble, mais qui est aussi salutaire afin de préserver l’implication du spectateur face à un film qui prend un chemin assez radical, on le verra.


Après un intertitre moraliste, un panoramique nous dévoile un joli paysage de la nouvelle Angleterre, avant de s’immobiliser sur une jolie et massive maison, dont sortent les trois membres d’une famille : la mère, la fillette et le père. Ils sont heureux, et se promènent : en deux plans, Griffith nous confirme leur bonheur : un champ dans lequel ils marchent, prenant leur temps ; au loin, un bel arbre, au bord d’un plant d’eau. Le plan suivant les voit continuer leur promenade dans un champ de fleurs, jusqu'à ce que la famille emplisse le cadre. C’est la fin du prologue.


Le deuxième acte est celui de l’exposé du drame : la petite fille est malade, et alors que le parents sont inquiets pour la suite des événements, quelqu'un vient chercher le père : il est en effet docteur, et son devoir est d’assister ses patients ; une autre petite fille malade a besoin de lui. Après des hésitations, il va se rendre à son chevet… et laisser mourir sa fille.
Le troisième acte voit le docteur retourner chez lui, et constater le décès de sa fille. Le dernier plan est une répétition inversée du premier, avec le même panoramique qui part cette fois-ci de la maison avant de nous détailler le paysage alentour.

 

Les acteurs de ce film sont des piliers de la Biograph, dont le docteur, joué par Frank Powell, qui deviendra vite l’assistant de Griffith, puis le deuxième réalisateur des courts métrages, sous la supervision du maître. On reconnait aussi Florence Lawrence (la mère), Kate Bruce (La mère de la deuxième petite, future mère Sudiste dans Birth of a nation), et bien sur Mary Pickford, qui joue la sœur de la deuxième petite malade. Le jeu est juste, les seules marques de précipitation étant justifiées : alors que la femme du docteur, inquiète, reste au chevet de sa fille, la bonne va faire le trajet aller et retour entre la maison et la cabane ou le docteur est au chevet de la patiente, à plusieurs reprises, et toujours plus vite. Le contraste entre sa précipitation et la lenteur méthodique du docteur est le principal procédé utilisé par Griffith pour impliquer le spectateur.


Au final, on a le sentiment de voir à travers ce film une somme déjà impressionnante des qualités développées en un an par le metteur en scène de la Biograph : jeu juste et convaincant, efforts de construction savants et payants, et toujours un commentaire social, cette fois un peu paternaliste quand même : bien que riche, ce docteur sacrifierait y compris sa fille pour faire son devoir et sauver une petite fille pauvre, Le décor accentuant d’ailleurs les différences sociales entre les deux maisons. En tout cas, voici encore un film majeur.

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Published by François Massarelli - dans Muet David Wark Griffith Mary Pickford
25 octobre 2016 2 25 /10 /octobre /2016 18:42

Sorti en mars 1909, ce film est moins connu que A corner in wheat, dont il partage pourtant le caractère "social"; il est probablement bien plus archaïque, tant idéologiquement que picturalement ou par son montage. Le début fait même craindre le pire, mais le scénario qu’il a lui-même écrit permet à Griffith de se rattraper: un jeune professeur de violon idéaliste, éconduit par sa jeune élève, accepte d’intégrer un groupe d’anarchistes qui lui confient la mission de faire sauter la maison du père de sa dulcinée. Faisant le guet durant l’opération, le son du violon joué par la jeune femme le fait se raviser, et il va tout tenter pour sauver la famille. Un mélodrame dans lequel les révolutionnaires sont donc d’abominables anarchistes qui, sous prétexte d’abolir les différences sociales, veulent évidemment tout faire sauter ; en plus, Griffith dote l’un de ses anarchistes d’un absurde costume masqué du plus beau ridicule, et les révolutionnaires font des serments solennels à roulements d’yeux: des gros sabots, donc...

Le dispositif de mise en scène part d’un début peu intéressant, dans lequel Griffith annonce par un intertitre toute l’action du plan à venir, soit 4 minutes. Ce type d’annonce qui détruit tous les effets en racontant toute l’action se retrouvera jusque dans Orphans of the storm , mais ici, il ajoute au pensum. Heureusement, le metteur en scène va pouvoir, à la fin du film, recourir au montage pour relever le niveau, dans une scène qui commence d’ailleurs par une évocation poétique d’une rue de New York, dont on trouve un peu l’équivalent chez Feuillade lorsqu’il nous montre les rues désertées de voitures de Paris: Lorsque les anarchistes s’introduisent chez le financier par la cave, Griffith démultiplie les cadres : la cave, ou une bombe va être posée ; la rue, ou le héros fait le guet, et l’intérieur de la maison, ou la jeune femme va jouer du violon. Griffith unifie les trois plans en montrant le jeune homme qui réagit à la « Voix du violon » du titre, en implique le public : nous sommes prêts à soutenir le jeune homme puisque désormais sa cause est juste, et nous sommes d’autant plus impliqués dans le suspense qu’il est assez rapidement en mauvaise posture, groggy, assommé par l’autre malfaiteur, à proximité de la bombe fumante.
Malgré cette fin plus prenante et cette utilisation émotionnelle du montage , le film reste lourd, ne serait-ce que par sa convention et son manichéisme paternaliste. Mais Griffith, éternel schizophrène, va faire exactement le contraire avec un film plus connu…

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Published by François Massarelli - dans David Wark Griffith Muet