Le XXIIIe siècle… La société, désormais, est réduite sous terre à une civilisation de l’oisiveté dans laquelle les gens naissent et se placent à l’écart de tout lien familial, jusqu’à l’âge de trente ans. Une fois atteint cet âge, ils sont « renouvelés », c’est-à-dire éliminés purement et simplement, dans un simulacre de cérémonie d’élévation. Les « Sandmen », ou marchands de sable, sont des « éliminateurs » des resquilleurs, les « coureurs ». Ceux-ci ont senti que ces histoires ne tenaient pas debout et veulent fuir leur destin…
C’est une adaptation d’un roman, assez typique de la science-fiction de la fin des années 70 : description par le menu d’une société qui fait tout pour cacher sa dystopie, héros qui va se trouver devant une révélation de la vérité, histoire d’amour (Michael York, « sandman », rencontre Jenny Agutter et elle va lui ouvrir les yeux), et mythologie apparente, avec plus ou moins de bonheur.
…Et puis il y a cette impression (qui rappelle la série Space 1999) d’assister à des poursuites de personnes habillées de pyjamas. Ce malaise devant des gens qui certes ont été élevés dans un monde clos et certes c’est une parabole, mais qu’ils sont bêtes, grands dieux… Et pourquoi fallait-il impérativement que les vêtements des dames soient courts, diaphanes et révélateurs, quand ceux des hommes sont en vérité juste moches ?
Un étrange vaisseau s'échoue sur une plage. L'armée s'apprête à accueillir les astronautres qu'il contient. Mais ce sont des chimpanzés... Cornelius, Zira et Milo, trois singes qui vivaient dans "la planète des singes", quelques millénaires dans le futur, se sont échappés lors de l'épocalypse nucléaire qui a scellé le destin de la Terre...Voir (si vous y tenez) le film Beneath the Planet of the apes à ce sujet!
Donc on inverse le principe de Taylor - Charlton Heston arrivant des millénaires apès son siècle sur une planète hostile, en confrontant les chimpanzés du futur aux humains de 1975. Le film, au vu de ce que le précédent accomplissait, n'avait à l'origine aucune raison d'être, mais existe car la Fox ne souhaitait pas arrêter la franchise lucrative.
Donc d'un côté, le renouvellement profond que permet l'inversion des valeurs (deux singes qui parlent chez les humains) a au moins l'avantage de faire rebondir la réflexion du premier film, et de questionner la destinée de la race humaine en même temps que d'évaluer sa vraie identité; de l'autre, le film se vautre dans un prêchi-prêcha de salades philosophiques, en évitant soigneusement (pas autant certes que le deuxième volet) de toucher à l'humour... Bref, un film tout, sauf indispensable. Qui aurait pu être le dernier, mais...
Sans doute était-ce pour les concepteurs du film un joyeux gag: imaginer un type très moyen confronté à une terre future où le QI moyen de l'humain dépasse à peine celui d'une mouche, c'est effectivement propice à l'humour, disons, poids lourd. Et d'ailleurs on ne s'en prive pas ici... Mais ça va nettement plus loin malgré tout. Et ça va même, j'en ai peur, un peu trop loin: sous la comédie, le malaise pointe...
Joe Bauers (Luke Wilson) est un militaire sans ambition autre que de rester en poste à la biblothèque de la caserne. Autant dire qu'il est inutile, ce qui lui convient très bien... Mais ça fait aussi de lui unfusble idéal. Quand il s'agit de faire une expérience un peu dangereuse, Joe est le candidat désigné d'office: il va donc être congelé, pour un an, afin de permettre de voir si l'humain peut supporter un tel traitement. Il subira le traitement en compagnie d'une femme, recrutée dans la rue (elle est prostituée), Rita (Maya Rudolph). Manque de chance, le responsable du projet est arrêté, la base fermée, le projet oublié, et les deux conteneurs vont devoir attendre jusqu'à 2505! Traité comme déchets, ils sont rapportés vers une grande ville lors d'une avalanche, et s'ouvrent pour laisser les deux humains contepler le chaos qu'est devenue la terre: un abyme de bêtise, dans lequel la fainéantise, l'économie privée et l'apauvrissement des humains qui se sont un peu trop laissés aller en terme d'éducation, de culture et de nourriture, les a rendus totalement idiots... Joe est devenu l'homme le plus intelligent de la planète. Mais... comment rentrer "chez lui"?
C'est drôle, inventif, et finement observé... un préambule installe d'ailleurs une voix off, qui détaille du début à la fin les aventures rocambolesques de Joe et Rita, et les met en perspective (ce que Joe, qui est assez limité, ne peut manifestement pas faire tout seul). La bêtise des protagonistes et leur crudité deviennent des cibles faciles mais jouissives de la comédie: la façon dont ils parlent, devenus incapables de former une phrase correcte, fait de Joe et Rita des cibles de leur "humour". Ils utilisent en effet des mots trop compliqués...
Sinon l'humour de l'humanité future est au ras du plancher, comme une séquence située au cinéma le prouve: un film consiste en un plan de 90 minutes sur un postérieur dénudé, qui lâche parfois une flatulence... Ou encore, les humains adorent une émisison qui consiste à montrer un personnage se prendre des coups violents dans les testicules. La publicité est partout, y compris et surtout dans la tête des gens, où elle tient lieu de raisonnement: interrogés sur le fait que l'eau a été remplacée dans l'agriculture par des boissons énergisantes, les humains de 2505 répètent à l'envi les slogans des réclames de la marque. La science et la connaissance ont quasiment disparu et ne parlons pas du niveau zéro de la politique. Le monde, bref, est dominé par l'argent, la bêtise, la sexualité tarifée (désormais Starbucks est une chaine de maisons de passe), la scatologie, l'appat du gain...
On peut d'ailleur établir le parallèle avec Planet of the apes, de Franklin Schaffner: c'est tout sauf hors-sujet, d'ailleurs... La planète se meurt d'avoir été souillée par la civilisation d'une espèce invasive sans aucune considération pour les conséquences de sa bêtise...
Ah oui. En effet, et c'est bien là que ça fait mal. C'était encore hilarant en 2006. C'est visionnaire aujourd'hui. Difficile de ne pas imaginer donald trump (l'absence de majuscules est volontaire) en "président Camacho", ancien lutteur et star du porno, dont les discours sont particulièrement vides de sens... Difficile de ne pas voir une caricature de notre société actuelle à travers ces gens incapables de parler, pour lesquels la lecture a été remplacée par des éléments visuels de niveau zéro, et pour qui la concentration moyenne ne dépasse pas une poignée de minutes... Le seul ingrédient qui manque à l'appel, c'est cette saloperie de téléphone portable! Ici, il est remplacé par la télévision, mais on voit très bien comment on pourrait incorporer tik-tok (là encore, pas de majuscules) dans un tel dispositif!
Bref, on aimerait beaucoup rigoler devant ce film. Ca devient difficile: il pique vraiment...
Une preuve? En cherchant de la documentation sur ce film, je suis tombé sur un site "Idiocracy: explication de film". Oui, j'imagine que la subtilité cinématographique va devenir de plus en plus difficile pour nos chères têtes blondes.
Planet of the apes, de Franklin Schaffner, est un chef d'oeuvre. Un film qui a marqué son temps. Je suppose qu'il était inévitable qu'un film aussi marquant visuellement, et iconique dans son développement (et sa fin) se retrouve gratifié de suites, développements postérieurs, et autres univers dérivés. Voire de remakes, mais pas charité on ne va pas les évoquer plus avant...
Le propos de ce deuxième film est de compléter l'autre, semble-t-il, qui après tout se finissait de façon ouverte, et comme chacun sait, les Américains n'aiment pas les fins ouvertes, qu'ils identifient systématiquement à des occasions de remplir les trous et relier les pointillés... ou pire, expliquer lourdement, des fois qu'on n'ait pas compris! Ou, comme ici, prolonger le film initial avec plus ou moins de bonheur, tout en fournissant des développements dont on n'a pas besoin, voire en proposant une fin, qui cete fois n'a rien, mais alors rien du tout, d'ouverte!
Reprenons: Taylor, l'humain confronté à cette étonnante "planète des singes", a triomphé de ses ennemis, les gorilles belliqueux, et les orang-outans politiciens, et a trouvé le moyen de s'enfuir avec l'humanoïde Nova, grâce à la complicité des chimpanzés scientifiques Cornelius et Zira. Il a pris la route (pour où?...) et a compris, enfin, où il était: la terre a évolué de travers jusqu'à devenir la planète dominée par les grands singes, alors que l'humain, affaibli par sa civilisation, a régressé...
Ce qui précède est donc la fin du premier film, d'ailleurs reprise dans cette suite. Charlton Heston y reprend le rôle de Taylor, mais il ne tarde pas à disparaître du film, au profit d'un autre astronaute; première bizarrerie: Brent (James Franciscus), le héros de ce film, a "suivi" Taylor avec son vaisseau, et est arrivé sur "la même planète", au "même moment". Et il va être confronté aux mêmes étonnements et aux mêmes conclusions que Taylor, et tant qu'à faire avec les mêmes alliés, Cornelius (Roddy McDowall, présent uniquement dans le prologue, est remplacé par David Watson) et Zira (Kim Hunter)...
Jusqu'à un certain point, le film répète la dynamique du classique qu'il tente de prolonger... Il recycle toutes les surprises, les décalages, tout en précisant les antagonismes de la société des singes, et leur mysticisme. Autant de redites dont on n'avait absolument pas besoin! Mais il offre aussi une porte de sortie qui l'apparente au pire du pire de la science-fiction des années 70, à travers l'apparition d'une secte extra-terrestre ultra-évoluée, venue sur terre pour vénérer une bombe atomique. Certes, le film évoque ainsi non seulement l'agitation politique de l'époque (une scène voit les chimpanzés manifester contre la guerre) mais aussi la peur atomique, mais...
C'est quand même joyeusement ridicule. Un avantage toutefois à toutes ces salades: avec l'intrusion de la bombe, la fin est très propre, efficace et définitive. Du moins c'est sans doute ce qu'on croyait à la sortie du film!
Dans un futur proche, une rencontre se tient, dans une église, entre l'équipe d'une éditrice/conceptrice de jeux vidéos, Allegra Geller (Jennifer Jason Leigh) et des fans de son système. Pendant que la jeune femme et les gamers son en train de tester un nouveau pod ultra-révolutionnaire, des militants d'un groupe violent commencent à tirer dans le tas... Ted Pikul (Jude Law) intervient pour sauver Allegra, ils commencent une cavale qui sera compliquée, car il y a, de la part d'un groupe ultra-violent et ultra-déterminé, un objectif clair: tuer Allegra, et revenir à la réalité pour empêcher les gens de s'évader en permanence dans des réalités virtuelles de plus en plus sophistiquées...
C'est de la science-fiction très proche de ce que Philip K. Dick faisait en son temps, cela dit le scénario est une pure création de David Cronenberg. On le croit sans peine: ces pods, qui sont faits d'une matire plastique qui parait si organique, ces manipulations sur le corps humain pour en faire le réceptacle d'une technologie mi-électronique, mi-organique, on est totalement dans son univers, lui qui a tant travaillé sur le lien entre l'humanité et ses extensions, que ce soit un pouvoir extra-sensoriel (The Dead Zone), la voiture (Crash) ou la télévision (Videodrome)...
On imagine le type d'analyse qu'on fera, à plus forte raison à l'époque précise dans laquelle nous nous trouvons, en estimant que Cronenberg "était en avance sur son temps"... Mais je ne me risquerai pas sur ce terrain, d'abord parce qu'il est clair que ce serait un diagnostic a posteriori, et ensuite parce que s'il est clair que le film nous montre une humanité qui s'échappe en permanence dans une réalité virtuelle qui gomme toute forme de réalité (justifiant pleinemet la colère des terroristes "réalistes" sinon leurs méthodes). Le metteur en scène place ses personnages, qui changent volontiers de personnalité en fonction de l'univers qu'ils traversent, dans une situation permanente de déstabilisation mutuelle, c'est un monde dans lequel rien ne tient. De même que la technologie évolue et singe la nature en proposant des jeux qui fonctionnent sur des plateformes qui sont autant d'organes, la nature répond en favorisant la mutation des animaux: un batracien à deux têtes joue un rôle de fil rouge (même s'il finira en filet)... La réalité semble être la chose dont plus personne ne veut, et on ne tardera pas, devant ce film provocateur, à se poser la question comme le font les personnages eux-mêmes, qui s'y perdent toujours: mais alors, là, on est dans leur réalité, ou c'est encore le jeu?
Sinon, les personnages se trahissent tellement rapidement, avec tellement d'énergie, et tellement dans tous les sens, qu'on jurerait qu'on va voir démbarquer Eric Ciotti, c'est dire.
Un vaisseau spatial ultra-futuriste est en plein navigation, et à l'intérieur, tout dort... Quand tout à coup l'un des passagers, en hibernation prolongée pour cause de voyage TRES long, est réveillé par le système. Mais il est le seul... Quand Jim (Chris Pratt) émerge, il est pris en charge par les intelligences artificielles du bord, celles-ci (qui décidément font mentir leur nom) passent outre le fait qu'il ait été "réveillé" au bout de trente ans, alors que son voyage est supposé durer encore... 90 ans.
Je ne peux pas m'empêcher de rêver d'un film à la Tati, avec un M.Hulot qui se réveillerait dans de telles circonstances... La première partie du fiml est intégralement consacrée à cette odyssée absurde d'un homme seul qui a pris conscience qu'il est arivé au bout de sa vie, mais avec un rien d'avance, et qui tente de faire un peu de sens (ou de s'occuper, ce qui n'est pas la même chose) avec un univers hostile parce que fait pour la multitude et non pour un homme seul (et en plus son forfait ne lui donne pas droit à tous les avantages!). Il a pour seule compagnie un barman-androïde, Arthur (Michael Sheen).
Mais Jim s'ennuie, et a vu parmi les sarcophages celui d'Aurora (Jennifer Lawrence), une jeune autrice partie observer les colonies spatiales, et il tombe amoureux. Malgré le risque et l'immoralité de l'acte, il décide de la réveiller... Sans lui dire bien sûr qu'il est responsable de cet acte, qui la condamne elle aussi à plus ou moins longue échéance, car on a beau essayer, mais... impossible de retourner dans les pods d'hibernation...
S'ensuit bien sûr une histoire d'amour, puis une révélation (saleté d'intelligence artificielle), puis une bouderie, puis hélas, pire encore: des explications, puis une intervention d'un deus ex machina qui lui aussi s'est réveillé, c'est Lawrence Fishburne: à ce stade, tout le troisième acte est raté, convenu, inintéressant. Mais le point de départ était finalement une idée formidable, celle de placer un novice, inadapté aux technologies de pointe en oeuvre dans le vaisseau, avec de lourdes mais rigolotes allusions à Kubrick (le barman sorti de nulle part, la rotation des modules du vaisseau dans lesquels court Jennifer Lawrence...) et un ensemble d'effets soignés. Après, dans ce film, plus il y a de monde, et plus ça ressemble à du tout-venant...
2065: sur une terre désolée, un couple qui habite une très vieille maison, dans lequel la communication devient difficile, reçoit une visite inattendue: un homme (Aaron Pierre) leur annonce que l'homme, Junior (Paul Mescal), a été sélectionné / réquisitionné pour une mission spatiale d'exploration en vue d'un exil humain. Ils n'ont pas le choix, et Hen (Saoirse Ronan), l'épouse, ne put l'accompagner, car elle n'a pas la constitution pour les tâches demandées. Mais on leur annonce qu'une réplique, une IA construite à l'identique de Junior, sera laissée sur place. La nouvelle a des effets inattendus, et la tension s'accroît...
C'est une adaptation d'un roman récent de Iain Reid, une dystopie romantique, et très vite on verra que l'aspect de science-fiction passe nettement au second plan, même si les considérations climatiques se rappellent parfois à notre souvenir... L'essentiel du film est un huis-clos, dans lequel Hen et Junior, souvent accompagnés de l'énigmatique Terrance, pèsent le pour et le contre d'un échange inattendu (le film est exploité en France sur la plateforme Amazon sous le titre Le Remplaçant, incidemment)... Avant que, bien sûr, le doute s'installe.
Car l'inévitable préambule nous prévient: les IA sont partout, on les utilise dans l'industrie, etc, etc... Du coup il apparaît inévitable qu'on se pose la question: et si un échange avait déjà eu lieu? Car c'est bien de ça qu'il s'agira, de l'impossibilité d'envisager un tel remplacement, pour les humains, et pour les IA, eh bien de l'impossibilité d'envisager de ne pas être humain... Ce qui est en soi un sujet potentiellement fascinant.
Mais j'insiste bien sûr sur le terme potentiellement, car en dépit de tous les efforts des acteurs pour installer une intimité dans ce long film à trois personnages, c'est un ratage. Oh, pas total, non, c'est juste assez ennuyeux, et doté de dialogues ou non-dialogues du plus haut ridicule. C'est dommage...
Ce film a vu le jour une fois la série finie (momentanément, mais ce n'était pas vraiment prévu à l'époque de sa sortie) et a un peu été une pierre tombale lourde à porter... Pourtant, à le revoir, on se rend compte que si c'était un (long) épisode, il ne serait finalement pas si mauvais que ça! Bien sûr, il lui manque un ingrédient qu'on a appris, après la gaucherie des débuts, à attendre de cette série: l'humour. Un humour souvent absurde, à plus forte raison quand les épisodes n'étaient pas liés à la fameuse conspiration délirante qui ne menait nulle part et qui a fini par s'autodétruire en vol durant la sixième saison. Tout au plus verra-t-on ici un clin d'oeil sardonique à un président en bout de course, dans un rare gag situé vers le début.
L'intrigue partage avec quelques uns des meilleurs épisodes deux aspects: d'abord, il est question ici de crimes sexuels inexpliqués, qui sont légion dans X-Files, mais qui sont généralement le point de départ vers les hautes sphères de l'imagnation baroque des créateurs. On ne sera pas déçu... ensuite il est situé dans l'Amérique profonde, donc rurale, en plein hiver, et Chris Carter profite de cet aspect pour rentrer dans le vif du sujet: ces deux agents, ils ont l'air comme ça, derrière leur élégance si photogénique, mais en réalité ils font un boulots de dingue, physique, qui est le plus souvent rendu encore plus compliqué par les circonstances...
Car il sera beaucoup question de ça: qui on est, pourquoi on fait ce qu'on fait, pourquoi on dédie sa vie entière à des chimères, pourquoi on nee se contente pas de faire ce qu'on fait le mieux: enquêter pour l'un, Mulder (il est souvent prié de se tenir à l"écart de la partie physique de l'investigation), et la médecine pour Scully, qui ici exerce la médecine générale dans une institution catholique. Et il sera aussi beaucoup question de foi: celle de Mulder pour son métier, basée sur des chimères irréconciliables avec la réalité, notamment la disparition de sa soeur. Et surtout celle de Scully, qui la pousse à la fois vers l'acceptation des intuitions de Mulder, et vers une certaine humilité aussi, celle d'un médecin qui n'essaiera pas forcément de se substituer à Dieu. Une certaine profondeur qui doit sonner ridicule, mais qui est totalement ancrée dans le personnage...
Avec une intrigue un peu bancale (des meurtres non élucidés pour lesquels les agents du FBI, dont ne font plus partie nos héros, font appel à Scully pour joindre Mulder afin qu'il se joigne à un prêtre pédophile qui a été désigné comme expert), le film (j'allais écrire "l'épisode") ne va pas au bout de ses promesses. Mais il a l'avantage d'offriri un éclairage qui remet un peu d'équilibre dans la balance,une bonne partie de la série étant centrée sur Mulder, ici, clairement, c'est Dana Scully qui est le principal élément du couple.
Petit rappel à destination de ceux qui, ayant probablement un portable dernier cri, se disent qu'ils n'ont du coup pas forcément besoin de retenir tout fait culturel datant d'avant les deux dernières semaines (c'est à dire 87% de l'humanité): entre septembre 1993 et l'année 2002 (puis sporadiquement jusqu'à 2016), la compagnie Ten-Thirteen de Chris Carter a produit et diffusé via la 20th Century Fox TheX-files, une série en neuf saisons (puis deux autres plus courtes, mais tardives) qui, qu'on l'ait aimée ou non, ont à leur façon révolutionné la télévision et les médias audiovisuels.
Oui, "qu'on l'ait aimée ou non" car il en fut de X-files comme de Twin Peaks: les fans ne pensaient plus qu'à leur série, et les plus fous n'en sont aujourd'hui pas tout à fait revenus... Les carrières des acteurs, David Duchovny, Gillian Anderson, mais aussi Mitch Pileggi, Nicholas Lea, William B. Davis, sont désormais totalement collées à la série. Il était donc plus ou moins inévitable qu'une déclinaison cinématographique voit le jour, d'autant que la série était remarquable pour la qualité de sa production. L'utilisation systématique du 35 mm, une attention portée aux nouvelles technologies de production, un don pour saupoudrer le suspense avec intelligence, et un ton (mi-dramatique, mi-humoristique) bien dosé, relaitivement original et novateur, ont beaucoup fait à la fois pour la longévité et pour le pouvoir de fascination de la série...
...Jusqu'à la 5e saison, car après le public a commencé à se lasser. Les intrigues à tiroir de la série et en particulier une obsession pour le complot, à tellement grande échelle, ont eu raison de la patience de beaucoup. C'est que les épisodes de la série se divisaient en deux catégories: d'un côté, les intrigues consacrées à la mythologie de la série (en gros, la découverte d'un complot du gouvernement Américain d'un côté, et de ses élites, de l'autre, autour de technologie héritée d'une rencontre à grande échelle avec les extra-terrestres), donc le fil rouge de X-files; de l'autre, des épisodes consacrés à des intrigues spécifiques (les "monster of the week"), plus léger et souvent propices au dérapage comique. Certain sont tellement bons qu'ils restent en mémoire longtemps. Rares sont les épisodes "mythologiques" qui ont bien passé l'épreuve du temps. Celui qui est probablement le meilleur (Jose Chung's From outer Space, saison 3) étant aussi sans doute le plus parodique de tous: il n'y a pas de secret...
La réalisation du film a été confiée à Rob Bowman, qui certes signait son premier long métrage d'action pour le cinéma (il avait déjà réalisé une obscure comédie), mais n'apas fait grande chose depuis. En revanche, il a entre 1993 et 2000 réalisé pas moins de 33 épisodes, ce qui en faisait probablement le choix le plus raisonnable...
Forcément, le choix d'intrigue pour ce film, situé pile entre la 5e et la 6e saison, ne pouvait être que l'un ou l'autre. Etant situé entre deux groupements d'épisodes, il était fatal que Chris Carter, auteur du script et créateur pointilleux de cet univers, choisisse d'en faire un scénario basé sur les mythe complotistes... Et l'intérêt s'en ressent. A part développer une intrigue autour de la tendance au secret des élites, en faisant sagement venir ou revenir tous les personnages, et cocher toutes les cases (en n'oubliant pas de donner un peu de grain à moudre aux fans et spectateurs qui attendaient des indices d'un rapprochement sentimental entre les deux personnages principaux), le film de deux heures peine à à être autre chose qu'un épisode de luxe, moyen, et taillé pour le gros son surround et les salles qui sentent le popcorn... L'idée d'en faire un film visible y compris par ceux qui ne connaissaient pas la série, entraîne d'une part une tendance au bavardage (Bonjour, Mulder, comment vas-tu depuis que notre section du FBI, les "X-files", a été fermée suite à un incendie? Ca va, Scully! et toi, comment vas-tu depuis que tu as appris ta stérilité, mais aussi qu'on avait utilisé un de tes ovules pour créer une petite fille qui est morte depuis?), et d'autre part, vous voulez mon avis? Je viens de voir (avec une certain gourmandise, je l'avoue) les 109 épisodes qui précèdent ce long métrage, et j'avoue n'y avoir pas compris grand-chose. Vivement le 110e épisode pour qu'on y revoie plus clair.
...à moins qu'il ne faille le considérer comme le 111e?
Retourner sur ses pas, se remettre dans la peau d'une sorte de soi-même en plus jeune, et s'amuser de mélanger son art tel qu'il est maintenant (gros moyens, CGI, direction d'acteurs) avec ce qu'on aurait fait à une autre époque... en matière de méta-cinéma, Ready player one est un auto-pastiche, un "à la manière de" parfaitement assumé. Cela s'imposait-il?
...Pourquoi pas, à une époque où le type de situation qui nous est montrée dans ce conte (le monde est tellement glauque qu'on préfère "vivre" dans un univers parallèle) devient pour beaucoup une réalité, Spielberg peut à nouveau confronter la science-fiction au monde actuel, comme il l'a déjà fait à plusieurs reprises. Mais qui s'attendrait à une fable pleine de sens en sera pour ses frais: RPO, adapté d'un best-seller écrit par un fan de tout ce qui vient des années 80 et donc incidemment des films dirigés ou produits par Steven Spielberg, c'est avant tout de la rigolade, du pur plaisir...
Et je le dis haut et fort: pour réussir à me faire comprendre un film situé dans l'univers des jeux vidéo, et ne jamais me perdre, il fallait un sacré métier, donc je confirme une nouvelle fois: Spielberg connait son affaire. Ce n'est pas un scoop... Mais à travers ce film en forme de gros bonbon de plaisir, qui déroule une histoire assez classique (et très disneyienne) de jeunes un peu décalés qui vont s'imposer dans le vrai monde grâce à ce qu'il se passe dans leur univers virtuel, Spielberg nous livre aussi des autoportraits, inattendus: d'un côté, il se réinvente en créateur paradoxal (dont le destin réel est un easter egg à lui tout seul) qui se tient à l'écart du monde, dont il a raté l'examen d'entrée: fonder une famille. Le bon vieux complexe de Spielberg dans les années 70-80, et qui revient périodiquement dans ses films. Et il se montre aussi en petit adolescent surdoué mais socialement incapable, qui va réussir sa vie en creux dans le monde du jeu vidéo...
Et tout ça en mettant un point d'honneur à ne jamais s'auto-citer: car il y a de tout dans le film: du Zemeckis, du Star Wars, du Kong, des Looney Tunes... mais à part un T-Rex, rien qui puisse remonter à Tonton Steve. Si ce n'est, bien sûr, à travers deux trois trucs structurels, comme ces écrans explicatifs qui remontent tout droit à Minority Report...
Voilà, je m'étais dit en voyant ce film parfaitement plaisant, mais vide de sens, et totalement accompli et oblitéré dans le plaisir facile qu'on y prend, qu'il n'y aurait strictement rien à en dire. J'avais un peu tort, puisque je viens d'y consacrer quelques lignes. Maintenant, je le redis, je doute qu'il contienne le secret de l'univers, même bien caché: c'est seulement l'histoire d'une société qui s'est oubliée dans le fait de se vautrer dans du virtuel qui n'a rien d'une réalité, et qui réapprend au fur et à mesure à remettre les pieds sur terre.
Mieux, c'est une étape de plus dans un parcours singulier, qui a poussé le metteur en scène à constamment innover, marquer dans son parcours et dans l'histoire du cinéma des étapes essentielles, techniques, narratives, structurelles et thématiques, sans jamais y perdre son âme, ni la possibilité en passant de réaliser des Munich, ou des Lincoln. Et tant que c'est lui qui réalise ces étapes, pourquoi s'en priver?