Comme d'habitude, en plein désert, un animal sous-nourri rendu probablement cinglé par la privation, tente par tous les moyens du moment qu'ils soient idiots et impossibles, de s'offrir la peau d'un oiseau qui va très vite afin de cesser cette période de disette!
La non-structure de ces films est une fois de plus présente au grand jour, immuable ou presque! donc, des noms latins idiots (Hard-Headipus ravenus pour le Coyote, et Speedipus Rex pour le Roadrunner), des inventions Acme, des tentatives qui passe le seuil de l'absurde, et des gags à rallonge, comme les rasoirs jetables trois lames: la première lame installe le gag attendu, la deuxième offre une pote de sortie au coyote, qui se prend la troisième dans la figure! Le rythme est entièrement dévoué au gag, et rien ne change.
Donc clairement, à la fin, le Coyote, tel Sisyphe, a fait tout ce qu'il a fait pour absolument rien... Et reviendra certainement dans un autre cartoon pour y expérimenter exactement le même résultat..
Donc, quand même, la seule évolution dans ces courts métrages, c'est le décor de plus en plus abstrait, et le design des personnages, qui s'enlaidit hélas de plus en plus...
C'est un film tardif de la série des aventures désastreuses du coyote le plus célèbre de tous les temps, et c'est le seul à avoir été co-cigné par Abe Levitow, assistant et bras droit de Jones, avec lequel il a souvent partagé la direction de leurs unités, aussi bien à la Warner que dans d'autres studios...
D'un côté, donc, la même intrigue que d'habitude, qui produira les mêmes effets: un animal souhaite en manger un autre, et cela résultera par un ratage total... C'est idiot, répétitif, et comme certains plaisirs musicaux, tout est dans le dosage et la précision des variations...
De l'autre, c'est probablement le moment où la série, qui plus de dix ans d'âge, commence, ou plutôt finit par tourner en rond...
Le coyote poursuit, pourchanger, Bugs Bunny, qui nous explique que l'oiseau habituel n'a pas pu venir. Pour le reste, ce serait un festival de ratages tous plus glorieusement lamentables les uns que les autres, s'il n'y avait un grain de sable...
Le grain de sable, c'est qu'on nous explique, justement. La grande force des aventures du coyote, c'est d'être un simple récit visuel, dépourvu de tout enjeu (on SAIT ce qu'il va se passer), une épure absolue, constamment renouvelée. Ici, un personnage bavard et qui se croit très drôle, nous explique tout? Cette redondance flingue totalement le film.
En 1959, Chuck Jones réalise pour la Warner des films à sa guise, et le studio a bien changé. En témoignent un certain nombre d'indices: d'une part les décors, particulièrement ceux des aventures désastreuses du Coyote (oui, vous n'imaginez quand même pas que le héros soit l'oiseau, quand même?) sont de plus en plus abstraits, et c'est frappant de voir à quel point Jones et Maurice Noble, responsable ds décors (et souvent crédité à la co-réalisation, un signe qui ne trompe pas) sont inventifs avec les paysages typiques de ce qu'on trouve en Arizona...
Et sinon, le film continue à rendre toujours plus austère la quête du vide du Coyote, condamné à chasser pour rien un oiseau qu'il n'attrapera jamais, et mangera encore moins, tout en étant, vaguement, un reflet de son époque: la vente par correspondance, par exemple, le hobby du bricolage, sont des passe-temps qui sentent bon les années 50, quand la vie s'est allégée... Et le jet, très présent dans ce film, est lui typique d'une tentation de la modernité un peu inutile, qui allait s'exprimer un peu partout (et notamment avec le jet-pack, dans Thunderball (Opération Tonnerre)!
Et donc, je viens, sans effort apparent, de comparer James Bond et le Coyote. Il fallait le faire.
Non, en effet, rien ne distingue vraiment ce court métrage de 1958, des autres, ceux qui ont précédé et ceux qui suivront, dans la longue et fascinante filmographie de cette étonnante série. Etonnante, car uniquement basée sur l'échec d'un protagoniste et sur la sensation pure: celle du suspense qui nous fait anticiper non l'accomplissment, mais son contraire. Sensation pure aussi du rythme, un élément essentiel de la franchise!
Alors comme d'habitude, il y aura de désespérantes tentatives, toutes lamentables, d'attraper l'oiseau trop rapide pour lui, par le coyote: avec une grenade, un trapèze, un rongeur dopé, un produit miracle, et même un bateau à moteur.
Comme toujours, cette série du coyote est soit:
...une magnifique escroquerie dans laquelle le public, son intelligence détournée par un cas bizarre de syndrôme de Stockholm un peu tordu, admire ce qu'il n'y pas lieu d'admirer, et soutient un anti-héros dans ses échecs programmés.
soit:
...une phénoménale variation sur le vide cinématographique, et la capacité à émouvoir (car oui, le rire tient de l'émotion) à partir de rien, mais alors vraiment rien. C'est fascinant.
Tous les matins, Ralph le loup et Sam le chien quittent leur domicile respectif en se saluant; ils travaillent tous les deux au même endroit: l'un garde les moutons, l'autre doit les chasser. C'est bien sûr absurde, mais une fois le prologue établi on peut assister à une série de tentatives toutes plus lamentables les unes que les autres du loup, qui ressemble furieusement à un de ses cousins... Un certain coyote.
Sachant que l'histoire (pour sa plus grande part constituée de gags purement visuels) est signée du complice Michael Maltese, que les décors, fortement abstraits et stylisés, sont de Maurice Noble, on ne s'étonnera pas que l'ombre de la série des films du Coyote plane au-dessus de ce film. Mais c'est de bonne guerre, car le film inscrit son message éminemment philosophique dans le cadre de l'absurdité du monde du travail, un chantier de réflexion que l'humoriste Chuck Jones se plaisait à contempler, et en prime la situation est l'occasion pour les animateurs d'expérimenter avec non seulement le timing, mais aussi l'espace filmique. Comme dans les films du Coyote, le champ, le hors-champ, le vide sont mis à contribution avec une aisance déconcertante, et en plus...
A 1:29 dans ce cartoon tardif, le coyote est pris dans un engrenage de désastres particulièrement impressionnant: juché en haut d'un rocher que le décorateur Maurice Noble a rendu très risqué, il s'apprête à utiliser un arc... Mais se prend l'élastique en pleine poire, et par conséquent, tombe. Le gag aurait du s'arrêter là, mais en tombant, l'arc s'accroche sur un piton rocheux. L'effet d'élasticité propulse alors le coyote sur un autre piton rocheux auquel il tente de s'accrocher... Le premier roc casse, et l'élastique ramène alors le bout de rocher sur le coyote, l'écrasant. Là encore on aurait pu s'en contenter... mais pas Chuck Jones. Par enchaînement, le piton rocheux qui vient de subir un choc se casse à son tour, et le coyote, pris en sandwich entre deux fragments de roche, tombe donc. Le gag rebondit encore deux ou trois fois avant d'aboutir.
C'est le meilleur moment d'un film qui n'apporte rien, ni ne retranche rien, à la légende du coyote qui n'arrive pas à attraper son déjeuner. Si ce n'est le fait que désormais Michael Maltese est loin, et sinon, le style évolutif de Chuck Jones (en partenariat, désormais, avec son animateur numéro 1, Abe Levitow) est moins attractif que par le passé...
Dans ce douzième cartoon des aventures du coyote, Michael Maltese et Chuck Jones ont décidé de varier le début d'une manière inattendue: en lieu et place d'une exposition, l'ouverture se fait, avant même l'arrivée du titre, sur un gag en cours... Qui va comme d'habitude se terminer sur une défaite cuisante pour l'animal, cela va sans dire.
La suite est conforme à ce qui était attendu: des gags courts et longs, des plans élaborés à l'aide de matériel acheté chez Acme, et souvent spécialisé (un "élastique pour attraper les Roadrunners", par exemple!); des chutes qui se terminent par des nuages de poussière vus de très haut, en plongée, et des enchaînements savants d'ennuis compliqués...
Mais à cette période, Jones qui s'apprêtait en compagnie de son animateur Abe Levitow a changer considérablement sa manière (en rendant ses animaux plus touffus notamment, et ses humains plus anguleux), a permis à Maurice Noble, le décorateur des films, de rendre son désert de plus en plus abstrait, et l'artiste s'est fait plaisir avec les rochers en équilibre fragile, notamment...
Autre changement notable: alors que les dessins animés avaient toujours gardé une sorte de logique globale, fut-elle fragile, les auteurs s'évertuent à trouver pour varier les gags des choses de plus en plus farfelues: ici, les "graines de tornade". Pourquoi pas?
Sous un titre glorieusement paré d'un jeu de mots absolument lamentable, se cache ce film, le septième parmi les cartoons de Chuck Jones consacrés aux quêtes de nourriture d'un coyote dans le désert au prise avec la fatalité symbolisée par un oiseau de taille modeste, mais qui ferait certes un en-cas fort appréciable. Je ne vous apprendrai donc rien si je vous dis que cette fois-ci, eh bien... il ne l'attrapera pas.
Il me semble qu'il est temps de s'intéresser à la fameuse compagnie Acme: derrière ce nom hérité du Grec (et Akme en grec veut dire plus ou moins "premier choix", ce qui est bien sûr totalement ironique), se cache en fait une parodie éclairée d'un mode de consommation en vogue dans les années 50, née dans ces courts métrages spécifiquement. Le coyote, on le constate, a la plus totale confiance dans la compagnie, qui lui envoie régulièrement les équipements les plus improbables afin de mettre à exécution des plans qui foireront toujours; ici, l'animal se commande un livre inattendu, au titre hilarant: "Comment couvrir un géocoucou de goudron et de plumes".
Ca s'imposait, je pense...
Et ce film est, pour la première fois, la reconnaissance définitive de la part du coyote de sa vraie condition: lassé, à la fin, de se prendre des coups, il démissionne de sa fonction de personnage de cartoon.
Ceci est le cinquième film de la série des aventures désastreuses du coyote qui aurait tant voulu manger un roadrunner, alias le géocoucou (oiseau natif dans grandes zones désertiques du centre du continent Américain). Ca commence par un détail monstrueusement graphique, puisque lors de l'exposition usuelle (assortie de noms latins délicieusement idiots), le coyote (Eatibus anythingus) en question mange... une mouche, puis mâche sans grande conviction une boîte de conserve avant de se faire bousculer et aplatir par l'oiseau (Hot-Roddus supersonicus). Ces notations scientifiques en latin de cuisine, par ailleurs parfaitement inutiles à l'intrigue, font partie des plaisirs renouvelés de cette série de cartoons, et au passage... quelle intrigue?
Un autre plaisir renouvelé tient dans un des codes narratifs et graphiques, nés par accident de la répétition à l'identique ou presque des gags les plus idiots: les chutes du coyote, inhérente à la malchance chronique qui le poursuit, sont souvent assorties de plans en plongée (sans jeu de mots, cette fois-ci) du désert, dans lequel la chute très longue se termine par un nuage de poussière vu du ciel. Le plan est souvent présenté, souligné, et prend son temps... A tel point qu'on aurait l'impression que le film serait vide sans lui, comme il le serait d'ailleurs sans le Meep-meep de l'oiseau, ou sans les arrêts du images avec latin de cuisine du début.
...Et puis, tant que j'en suis à parler du latin de cuisine, on constate que dans ce film, Jones et Maltese ont convoqué, exceptionnellement une tierce personne, et je ne parle pas de l'infortuné diptère du début. Ca donne un gag qui permet aux auteurs de renchérir sur leur petit plaisir préféré: le clin d'oeil au spectateur, qui fait exploser le fameux quatrième mur...