Tout va mal au château, et il faut dire que Madame la marquise (Madeleine Renaud) s'entête: plutôt que de vendre la bâtisse, elle s'acharne à vouloir faire venir les clients de son hôtellerie dispendieuse. Il y a bien un truc, qui consiste en un petit sabotage par le garagiste local (Xavier Gélin) de toutes les voitures qui passent à sa portée. Les propriétaires des véhicules n'ont plus qu'à demander asile au manoir, dont les prix prohibitifs sont rendus plus doux par le fait qu'il n'y a pas d'autre solution... Charlie, le garagiste, est bien un peu scrupuleux, mais les beaux yeux de la baronne Amélie (Marthe Keller), la petite fille de la marquise, l'empêchent de trop rechigner. C'est dans ce contexte que débarque une nuit le baron César (Yves Montand). Il est beau, a de la prestance, du charme, et surtout des ennuis: il a toute la police du pays aux trousses et une valise pleine de billets... Très vite, toute la population de la vieille demeure se met en branle pour le satisfaire... ou lui soutirer son pognon. Surtout les femmes.
Il est un peu rapide de voir en ce film, comme un célèbre hebdomadaire coutumier des raccourcis à l'emporte-pièce, l'a fait, "l'esprit de mai 68". C'est étrange, faux, et surtout justifié par le fait qu'on y assiste à un ballet généralement immoral. Et si de Broca s'est amusé à mettre en scène des manoeuvres assez peu orthodoxes en effet, c'est surtout dans la lignée d'une libéralisation progressive des moeurs cinématographiques. L'enjeu dans cette comédie est en fait double: d'une part, c'est leur survie que jouent les nobles du château, oisifs, manipulateurs, mais foncièrement unis jusqu'à tout risquer: le meurtre, l'adultère au su et au vu de tous, la magouille, l'escroquerie.
Et c'est un matriarcat qui nous est présenté, dans lequel l'unique mâle (Du moins le seul homme à vivre en permanence au château) incarné par Jean Rochefort se contente d'appliquer les ordres de sa belle-maman, la très entreprenante marquise. Mais les femmes, unies derrière l'aïeule gentiment immorale, font corps à tous les sens du terme, n'ayant finalement pas d'autre finalité que de servir un homme et un seul, le parangon de la masculinité absolue, interprété avec gourmandise par un Yves Montand en vacances... On est donc loin d'une certaine vision du féminisme. Par contre on est en pleine comédie, fraîche, drôle (C'est bien le moins), au ton gentiment absurde, et traversée par des bribes de satire joyeuse. Et ça, ce n'est pas rien.