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The great moment est une exception dans la carrière de Sturges, et un film qui trahit de façon parfois cruelle la confusion qui a prévalu lors de sa confection. Que le film ait été un pensum imposé à l'auteur où qu'il ait vraiment souhaité le tourner importe peu: le film est un biopic déguisé fort maladroitement en comédie. Il contient un grand nombre de thèmes et de points communs à tous ses films, et en particulier à The Great McGinty et Hail the conquering hero, mais la comédie y est supposée venir en bonus dans la mesure ou le film reste l'histoire d'un homme, le Dr Morton, premier dentiste utilisateur de l'éther, et pionnier de la lutte contre la douleur... celui-ci est mort pauvre et oublié, donc faire une comédie à la Sullivan's travels, dans ce cas, reste compliqué! Le film, de fait, n'épouse absolument pas le cheminement d'une comédie classique, commençant par une scène de triomphe, puis sautant à la période qui suit la mort du héros, avec ses amis et familles se lamentant de l'oubli dans lequel il est tombé. Un premier flash-back montre les difficultés rencontrées par le Dr Morton pour se faire reconnaitre comme l'inventeur objectif d'une pratique désormais reconnue par tous, et un deuxième flash-back, pour de bon, nous montre enfin le cheminement vers une technique pour soulager la douleur. C'est l'épisode le plus riche en comédie... Finir la-dessus, c'est au moins en phase avec le message de Sullivan.
Si on peut comprendre, en voyant le film, que la mort évoquée du personnage principal ait été donnée dès le départ, la structure reste quand même embarrassante, voire boiteuse. Elle fait reposer tout le film, c'est sans doute voulu, sur un moment, situé en fin de film, lorsque le docteur finit par admettre l'importance de son "invention", et l'inutilité de la revendiquer. Mais elle tend à contredire objectivement le début du film, forcément situé après cette fin, qui montre le docteur revendiquer la paternité de cette pratique, d'où un certain malaise! Pour autant, le film reste un film de Sturges, dans lequel un héros oublié va, avec l'énergie et la manière qui caractérisent les personnages de Sturges, se débattre sans fin dans une situation perdue d'avance, avec naïveté, comme une énième victime de l'illusion grandiose d'un rêve Américain...