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20 septembre 2014 6 20 /09 /septembre /2014 17:36

Xavier Maréchal, consultant en communication, conseille un ami député qui vient justement de tuer un homme qui s'apprêtait à le faire chanter. Mais l'ami va lui aussi mourir dans des circonstances louches, et ce sera le début d'un vrai jeu de massacre dans lequel le héros sera un peu trop souvent soupçonné des pires turpitudes, et dans lequel un document gênant pourrait bien devenir le fléau de la Ve République...

On pourrait être très cynique, et notamment extrapoler sur la réunion de ces trois anars de droite que sont Delon, Audiard et Lautner, ou ironiser un brin devant ce film qui nous montre une France sous la menace d'un complot d'extrême droite, avec dans le rôle du chevalier blanc, un homme dont les accointances (Actuelles comme passées, il a commencé bien tôt) avec le fascisme à la Française finissent par prendre le pas sur son talent d'acteur. Ce dernier est pourtant, à l'occasion, bien réel, et ici il est évident. Et Mort d'un pourri bénéficie en prime d'être plus ou moins le premier film dans lequel Delon joue un personnage auquel il reviendra souvent, dans les mains moins expertes de Jacques Deray notamment. Mais voilà: Lautner est toujours intéressant (Avant Le professionnel du moins, si on excepte bien sûr l'affligeant Ils sont fous ces sorciers!), et il y aura toujours chez lui une façon de jongler avec l'ambiance lourde, de contourner avec talent les à-cotés du crime: ce metteur en scène ne s'est jamais contenté de filmer la violence de façon frontale, il lui a toujours trouvé un petit je-ne-sais-quoi de surréaliste, un détail, un gimmick, et ce film ne fait pas exception à la règle. Je pense en particulier à la scène formidable durant laquelle Stéphane Audran est confrontée à son tueur, filmée en caméra subjective, d'une façon violente et frontale, qui n'oublie pourtant jamais les petites touches, mais oui, poétiques...

Et puis Mort d'un pourri est totalement inscrit dans les années 70, et l'entre-deux Giscardien est le contexte de ce film où l'on tente de solder les comptes de la machine Gaulliste tout en regardant avec expectative en direction d'un futur qui pourrait bien être à gauche (Daniel Ceccaldi y parle de se prémunir pour l'arrivée des "collectivistes"...). L'urgence de 1977, et d'une situation politique qui menaçait sérieusement de changer, est présente à travers une conversation aimablement enluminée par l'art d'Audiard, mais dans laquelle on devine tout ce qu'on veut: un politicard propose effectivement à Delon de participer à une entreprise de sauvegarde pour se garder de l'éventuelle arrivée de la gauche: on ne sait pas trop s'il s'agit de déplacer des capitaux pour les mettre en sûreté, ou de créer une réplique armée...

Sagement, le héros décline l'offre... Car le film, qui puise dans le climat de la période et ses affaires (Entre le titre et la formule "tous pourris" si chère au Front National d'aujourd'hui, il n'y a après tout qu'un pas...), semble ne jamais en faire trop. C'est une vraie réussite, superbement ornée d'une musique de Philippe Sarde avec Stan Getz en unique soliste de génie, et dans laquelle le verbe d'Audiard évite le clinquant et le voyant de la comédie, sans jamais rien perdre de son percutant, au contraire. Bref: un très grand film de Lautner, sans aucune réserve...

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Published by François Massarelli - dans Georges Lautner Noir Michel Audiard