Key West, Floride, 1962: en pleine période de tensions extrêmes entre Cuba et les Etas-Unis, la ville s'apprête à accueillir Lawrence Woolsey (John Goodman), un producteur de films d'horreur de série B. Sa dernière production, Mant! (L'homme-fourmi) promet pour toute la jeunesse du coin un spectacle inoubliable, avec frissons cinématographiques (Un homme se transforme en fourmi géante après avoir été exposé à des radiations) et d'autres qui le sont moins (Le film est montré en Atomo-vision et Rumble-rama, essentiellement des attractions qui consistent à soumettre les spectateurs à des secousses, projections de faux gaz et autres débilités du genre). Pour Gene Loomis, le jeune fils d'un marin qui vient d'arriver dans la ville, passionné de cinéma fantastique, l'arrivée du producteur sera un évènement déterminant. Et comme toute la ville, située à 90 miles de Cuba, et dont la population est pour une majorité composée de personnel mobilisé par le gouvernement dans une escalade qui risque de dégénérer en apocalypse, les fourmis géantes vont permettre un salutaire échappatoire... Enfin auraient pu, parce que la réalité va bien vite prendre le pas sur la fiction, et la panique va s'installer.
Joe Dante est toujours à son aise quand il mèle fantastique débridé avec la vie quotidienne des Américains, et quand il conjugue chronique de l'enfance et passion pour le cinéma bis, ce qui fait de ce film, qui gagnerait à être mieux connu l'une de ses meilleures oeuvres. S'il s'est bien évidemment plus à entrer dans la peau de Woolsey lui-même, en tournant dans un délectable noir et blanc d'importantes portions du film dans le film (Un abominable navet s'il en est), il use de toute sa tendresse, et de tout son sens de la nuance dans son portrait de le jeunesse locale. Celle-ci est désireuse d'oublier la menace nucléaire dont tous les adultes semblent prétendre qu'elle est sous contrôle, mais on voit bien que ce n'est absolument pas le cas... Et Lawrence Woolsey, mi-profiteur (C'est en réalité un escroc pur et simple), mi-vieux sage (Il a tout compris, est profondément sympathique, et se contente après tout d'offrir un peu de rêve, aussi stupide soit-il), semble véhivuler à lui tout seul toute la morale du film: une fois sortis du cinéma de l'apocalypse, les jeunes gens se rendent bien compte que tout va bien, que demain est un autre jour, et qu'après les foumis génate, le beau temps. Au final, un parfait portrait de l'Amérique de 1960, dans sa diversité, ses errements, et sa cocasserie.