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14 décembre 2014 7 14 /12 /décembre /2014 18:48

On ne va pas ici se lancer dans une discussion sur la validité d'un remake d'un classique aussi établi et définitif que le film de Franklin Schaffner (1968), qui a probablement été à lui seul la cause de l'existence de tout un pan de la science-fiction, avec jusqu'à récemment (Sans parler de remakes douteux et autres suites du film initial) un grand nombre de films métaphoriques d'une humanité en proie au risque de l'extinction pure et simple pour des raisons comportementales ou environnementales. A l'imitation du livre de Pierre Boulle, le classique cinématographique établissait ainsi un lien entre cette fameuse planète des singes, et le monde contemporain, sa politique et ses comportements; il le faisait avec un sens narratif, un gout pour le suspense et un certain sens de l'innovation, sans parler des images-chocs que toute personne qui a vu le film a encore en mémoire. Et bien sur, toute nécessité de réaliser un remake d'un tel classique s'avère immédiatement invalidée, tout comme, si vous voulez mon avis, toute tentative d'y apposer une suite. Seulement voilà, les temps changent, et la Fox a donc confié à rien moins que Tim Burton le soin de réaliser un remake du film... Triple erreur.

Pour commencer, le scénario du film prend comme un malin plaisir à s'éloigner du script original, afin sans doute d'éviter l'impression de redite, jusqu'à l'absurde et le contresens... Taylor, le héros de Charlton Heston dans le film de 1968, était un scientifique cynique, déterminé dès le début à quitter une bonne fois pour toutes sa planète et assez facilement porté sur l'évasion personnelle, roulant essentiellement pour lui, et donc Mark Wahlberg compose ici un personnage bas du front (C'est Mark Wahlberg, donc ça lui va très bien) qui ne comprend rien à rien, mais qui est supposé incarner le héros du film. Quelqu'un a imaginé que cette-fois-ci, les humains pourraient parler, ce qui a pour effet de les rendre aussitôt ouvertement supérieurs eux singes, qui sont globalement de vrais imbéciles: c'est à se demander comment un peuple humain, qui a depuis des temps anciens ou ils étaient les maîtres des singes, conservé son langage, a pu à ce point oublier leur vie antérieure, là ou les singes qui ont du apprendre à parler sans eux, sont devenus leurs maîtres... Et comme les scénaristes ont pris soin de situer le film sur une vraie planète des singes, et non sur la même planète que le premier film (Je fais tout mon possible pour éviter d'en révéler la fin, notez bien), le film perd tout son sens...

Tim Burton, quant à lui, a pris le parti d'accepter la commande, car il rêvait de mettre en scène à son tour, comme tant de grands réalisateurs, un film qui lui serait proposé, dans lequel on attendrait son grain de sel... qui ne vient jamais. Oh, bien sûr, le film est plastiquement très réussi, doté d'une belle partition de Danny Elfman, très allusive de la partition originale de Jerry Goldsmith, mais la tentation de développer occasionnellement une vie intérieure en contradiction avec le travail imposé par la Fox foire lamentablement: il semble que Burton tente de favoriser un semblant d'idylle entre Ari la chimpanzée (Helena Bonham Carter) et Wahlberg, au détriment de la pauvre cruche interprétée par la plantureuse, mais strictement décorative Estella Warren. Cette dernière ne servant décidément à rien, on échappe à toute impression de scène vraiment sulfureuse... Et Wahlberg est semble-t-il souligné de façon insistante par Burton comme un imbécile, un scientifique qui, pas plus que Taylor, n'a une seconde pour s'interroger sur la raison pour laquelle tous ces singes parlent... Anglais. Ce qui était une parabole dans le film initial, passe mal dans ce remake très premier degré avec ses singes militaires intense, donc ridicules. Le constat amer, tout bonnement, c'est que les soit-disant tentatives d'audace de Buron débouchent sur des maladresses encore pires que le film lui-même.

Et pour ne rien gâcher, quelqu'un (L'armée de scénaristes? Burton? Richard Zanuck?) a décidé de souligner la parenté avec le film d'origine en en inversant certains dialogues allusifs, d'un vieux singe (Heston lui-même, assez reconnaissable somme toute) qui meurt en prononçant les mots hurlés par Taylor à la fin du premier film: "Damn them! damn them! damn them all to hell!" à un militaire qui dit à un humain ce que Taylor disait à un singe: "Don't put your filthy, dirty hands on me!"... L'effet voulu est supposé être de créer un clin d'oeil, mais on obtient surtout le rappel que ce film n'est décidément pas Planet of the apes. Enfin, on pourrait parler de la fin, supposée selon les auteurs interviewés à l'époque de la sortie "scotcher les spectateurs sur leurs sièges" (On notera la richesse de vocabulaire): c'est vrai qu'elle est inattendue. Elle est surtout illogique, mais pourquoi pas? un peu d'absurde n'a jamais fait de mal à personne... Pourtant, la fin de la première version, fidèle en cela à la vision de Pierre Boulle, ne se contentait pas de choquer les esprits, elle porte en elle un message. Celle-ci est juste choquante, et désespérément vide de sens... D'ailleurs, si elle invitait une suite, la bonne nouvelle c'est qu'il n'y en a pas eu... Tout va donc bien dans le meilleur des mondes.

On peut sans doute raisonnablement considérer que ce film est bien la pire des oeuvres de Tim Burton, tout en maintenant l'idée que son Alice ne doit pas être très loin... Le pire, c'est qu'il a inauguré une période durant laquelle, de bon (Big Fish) en mauvais films (L'infect Alice in Wonderland, ou le très dispensable Dark Shadows, le trop sage Charlie and the Chocolate factory), Tim Burton a semble-t-il perdu son âme.

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Published by François Massarelli - dans Tim Burton Navets