Warlock, petite ville du Sud-Ouest, bien trop grande pour que les citoyens fassent justice eux-même, mais trop petite pour qu'un vrai juge ou un vrai Shériff y fasse la loi. Et justement, le "deputy" (Adjoint) en charge de la ville est, au début du film, tué une fois de plus, car la bande d'Abe McQown a décidé de montrer qui est le patron: McQuown lui-même, un riche propriétaire terrien qui sème assez facilement la terreur avec ses cowboys, et qui couvre à peu près tout ce qui peut se pratiquer comme activité illicite: vol, attaque de diligence, vol de bétail, meurtre voire (Pour une anecdote) massacre pur et simple. Dans ce contexte, les habitants font appel à un redresseur de torts professionnel, Clay Blaisedell (Henry Fonda), un homme que sa réputation précède, et qui agit entre une certaine froideur et un sens aigu de la mise en scène: il a une paire de colts à crosse dorée dont tout le monde a entendu parler. Et il ne vient pas seul: Morgan, son alter ego, son ombre au passé trouble (Anthony Quinn) vient avec lui, et pour commencer fait main basse sur le saloon local. Une fois arrivé, le nettoyage commence, et Blaisedell encourage les vocations: un des hommes de la bande McQuown, Johnny Gannon (Richard Widmark) a depuis longtemps des scrupules à faire partie de la bande de malfrats qui tuent les gens en leur tirant dans le dos; il franchit le pas et devient, contre toute attente, le vrai "deputy" shériff de Warlock. Pendant ce temps, les agisements de Morgan font parler d'eux, et il devient assez rapidement clair que si Blaisedell et Gannon vont débarrasser la ville du problème McQuown, qui s'occupera de Morgan?
Les limites de la loi, et les frontières entre le bien et le mal: un bon vieux thème du western, habillé de neuf pour ce film qui louche par de nombreux aspects sur l'anecodte de Tombstone, mais bien loin de My darling Clementine. N'empêche, il est assez ironique de confier à Fonda le rôle, en version bling-bling, d'un autre Wyatt Earp... Et Morgan, avec son pied-bot et sa tendance à l'acoolisme, fait lui aussi bien penser à Doc Holliday, mais on remarquera assez facilement que la relation entre les deux est rendue particulièrement ambigue par le discours permanent de Quinn. Bien sur, d'une part, les deux hommes représentent chacun un aspect de la lutte impromptue contre le crime: une certaine rigueur, une certaine droiture un peu vieux-jeu d'un côté, l'histrionisme triomphant avec vantardise permanente de l'autre... Mais Morgan est obsédé par la place de héros que son ami doit occuper, et va jusqu'à tuer dans son dos les gens qui pourraient entâcher sa légende: homme, femme, peu importe... Et quand Blaisedell envisage de se marier et d'arrêter le cirque, la réaction de Morgan oscille entre le désespoir alcoolisé et l'agression.
De son côté, Johnny Gannon est un rôle en or pour Richard Widmark, un peu moins torturé qu'à l'accoutumée: il sait dès le départ de quel côté de la loi, ou plutôt de la morale, il doit pencher. Choisir de servir la loi comme il le fait est à la fois une façon de régler son compte à son passé de bandit, mais aussi de montrer le chemin, dans une ville en devenir, qui n'a que trop souffert d'être exposée au crime sans que les forces de la police ne puissent agir. Il est, à la fin du film, non seulement un héros local, il est aussi légitime et légal, ce qui ne peut que confirmer le soupçon de Blaisedell, qui avait bien dir en arrivant: ils m'accueillent en héros, mais à la fin ils voudront ma mort. Au moins pourra-t-on dire qu'avec Gannon, la ville s'est dotée d'un vrai défenseur de la loi... Et contrairement à Blaisedll, Gannon aura fait passer la morale avant la tuerie... Mais en attendant, la violence va s'installer, et les armes vont parler! Bref, un western, un beau, un vrai, un grand.