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Peter Weir prend son temps: les délais entre ses films lui permettent d'en contrôler les aspects les plus divers et d'y imprimer sa marque. C'est un réalisateur à la personnalité très affirmée, dont on retrouve le style et l'univers depuis ses débuts, quel que soit le genre du film qu'il tourne: thriller historico-politique, évocation onirique, fable ou film d'horreur... C'est pourquoi on ne sera pas surpris de le retrouver aux commandes d'une comédie sentimentale. Par contre, on peut s'étonner de le voir sortir un film juste un an après son grand succès de 1989 (Dead poets society). Mais dire que le film est raté, voire que Green card est le pire film de Weir, c'est prononcer une telle évidence qu'il n'y en a pas besoin. C'est, en effet, un désastre. Un film pour moi parfaitement résumé par le plan un peu embarrassant du linge mis à sécher: une délicate culote féminine, sis à côté d'un gros kangourou qu'on imagine encore fumant.
Brontë (Andie McDowell) est horticultrice, et militante écolo à sa façon. Elle a besoin de décrocher la location d'un appartement possédant une magnifique serre, mais les bailleurs sont récalcitrants à le laisser à une célibataire. Georges (Un gros acteur Sarkozyste) est Français, et son visa de touriste est arrivé à expiration, il désire posséder la carte verte qui l'autorise à rester, et éventuellement à demander la nationalité Américaine. Ils sont faits pour s'entendre... eh bien non justement: l'affaire n'est pas aussi simple, car s'ils s'imaginent devoir se contenter d'une licence de mariage, les autorités particulièrement tâtillonnes vont les embêter jusqu'au bout, et Georges va devoir partager la vie de Brontë, au moins pour un moment. Donc il va venir mettre ses gros pieds aux chaussettes trouées, fumer des Gitanes dans les plantes vertes, cuisiner au beurre et tout et tout dans le bel appartement de la jeune femme qui évidemment va très vite se sentir plus qu'embarrassée d'une telle invasion. On connait la propension de l'acteur en question à se comporter en viking mal éduqué en toute circonstance, et le personnage de Georges ne fait pas exception.
C'est sans doute un cliché de le dire, mais une 'comédie sentimentale' a besoin, afin d'appartenir au genre, d'un certain nombre d'éléments. et pour commencer, on a besoin de croire au couple, de croire par exemple dans It happened one night, que Gable et Colbert s'aiment bien que tout les oppose, et que le mur de Jéricho qu'ils ont placé entre eux tombera un jour. Ici, on n'y croit pas, pas un seul instant, et pas seulement parce que la caricature d'acteur qui joue Georges (Dire qu'il est mauvais est je le pense inutile, ce type salit tout ce qu'il touche) est lancé en roue libre dans une caricature de Français d'un autre siècle: rustaud, anti-végétarien, sans-gène, sans hygiène, etc... Non, l'histoire d'amour tristounette qui se joue entre les deux protagonistes n'a en réalité aucune prise sur le spectateur, car Weir, habitué à son univers, a surtout tout fait pour montrer l'idéal de Brontë. Les plantes, la nature, et à mon sens le film souligne que ça passe par la solitude. Donc il m'apparait qu'on n'a qu'une envie, c'est que l'éléphant se tienne à l'écart de la serre de porcelaine. Si donc le film, paradoxalement, se tient quand même dans une version plausible de l'univers typique du réalisateur (Après tout, les deux héros recherchent tous deux un idéal impossible, un ailleurs hypothétique), il souffre de n'être qu'une version mal fichue de ce qu'il affiche être. Et pour finir, je le dis: c'est comme le désastreux After hours de Scorsese, une comédie se doit d'être drôle. Weir sait le faire, après tout, il l'a fait avec certaines scènes de Dead poets society, et The Truman Show est souvent très drôle... Green card est juste ennuyeux, embarrassant et lourdingue. Comme l'autre, là.